

Parallèlement aux féministes qui luttent pour les droits des femmes et obtiennent au bout d'un travail acharné la modification des lois, il existe des femmes qui ont lutté en free lance. Décidées à ne rien demander, elles se sont travesties en hommes pour jouir de la liberté que la société leur refusait. Les travesties de l'histoire paru chez First retrace leurs aventures palpitantes. Parmi les intellectuelles, les créatrices, les guerrières, les savantes et les aventurières, travesties en hommes pour vivre libres, les femmes pirates tiennent une place de choix.
La puissance évocatrice des femmes pirates
Les femmes pirates fascinent : le travestissement représente la transgression d'un tabou religieux et social très fort et renverse l'ordre établi. En outre, les femmes pirates surprennent par un désir d'ailleurs puissant, une violence inouïe, une fougue et une énergie pour échapper à la vie misérable que leur réservait la société. Parmi les flibustières, la légende retient les noms d'Anne Bonny et de Mary Read qui se sont travesties en hommes, travestissement obligatoire puisque les marins, livrés aux puissances incontrôlables de la mer, sont très superstitieux et sur un bateau, il est dit qu'une femme porte malheur.
Deux vies qui commencent mal
Anne Cormac, née en 1702 à Cork (Irlande) est la fille illégitime du procureur William Cormac et de sa domestique Mary. William, chassé par sa riche épouse, s'enfuit en Caroline du Sud avec Mary et le bébé. Lorsque Mary meurt, Anne devient rebelle, coupe ses cheveux, s'habille en homme, fréquente les tavernes et s'acoquine avec les mauvais garçons dont James Bonny qui l'épouse et l'emmène à New Providence repère de pirates aux Bahamas. Une aubaine pour cette audacieuse qui n'hésite pas à tirer sur le premier qui lui manque de respect. Mais James est un pleutre, il renonce à la piraterie pour un lopin de terre. Anne s'enfuit avec un pirate plus audacieux, le bouillant Jack Rackham
Mary née vers 1685 à Plymouth est la fille illégitime d'une servante. L'enfant fut travestie en garçon par sa mère pour percevoir une pension Voilà pourquoi, Mary s'engagera comme marin et ensuite comme hussard. Le « petit hussard » devient l'aide de camp d'un maréchal des Logis nommé Read. Amoureux l'un de l'autre, ils se marient, doivent s'enfuir. Lorsque son mari meurt, Mary sans ressources, reprend son costume de marin, s'engage sur un négrier et croise le destin d'Anne Bonny.
Une rencontre romanesque
La rencontre des deux personnages Anne Bonny et Mary Read se passe sans doute sous le signe du trouble, trouble amoureux et trouble identitaire. Adam Bonny (Anne) écume la mer des Caraïbes en compagnie de Jack Rackam. Un jour, peut-être dans quelque port grouillant de pirates, Adam Bonny (Anne) rencontre un jeune marin fort sympathique : Willy Read. L'entente est immédiate. Adam Bonny (Anne) force un peu la main de Jack pour qu'il enrôle le jeune Willy (Mary) tombé sous le charme d'Adam Bonny(Anne). Les deux femmes ne se quitteront plus. Leur amitié ( ou plus ) envahissante et sans doute orageuse ne dérange personne : sur les bateaux pirates, les m?urs sont plus libres, l'homosexualité y est tolérée par exemple dans la coutume du matelotage.
La vie à bord
Lors des combats, Anne et Mary se battent comme des hommes, à la machette et au pistolet. Grâce à leur bravoure, l'honneur d'aborder en premier le navire ennemi leur revient, à elles, les deux femmes pirates ! On raconte que Mary, portant le coup final à son adversaire dénudait sa poitrine non seulement pour montrer à l'agonisant le courage des femmes mais aussi pour l'humilier au seuil de la mort. Comme tous les pirates, ces exclues n'ont personne à qui transmettre leur bien et savent que leurs jours sont comptés : elles pillent, tuent et gaspillent leur butin dans la joie sauvage de l'instant présent. Sur le bateau, pourtant, la vie est difficile : l'ennui, les conditions d'hygiène douteuses, les rats, le scorbut, les querelles et la promiscuité pourraient décourager les plus braves. Mais pour ces exclus du monde, ces parias, le bateau demeure un univers clos et protecteur où règne une solidarité fragile mais réconfortante.
La fin de l'aventure
En 1720, le gouverneur des Bahamas décide de mettre un terme à la piraterie. Le bateau des pirates ne peut résister à un navire bien armé d'autant que, ce jour là, Jack et ses compagnons, cuvent leur vin dans la cale. Malgré les invectives et menaces d'Anne et de Mary, ils ne se défendent pas, seules les deux femmes se battent ?
Le 16 novembre 1720, tout l'équipage pirate emprisonné à Spanish Town en Jamaïque est condamné à « danser la gigue au bout du chanvre ». Anne aurait murmuré à Jack en guise d'adieu : « Si tu t'étais battu comme un homme, tu n'aurais pas à être pendu comme un chien » Peu après, tous sont pendus haut et court : haut pour que chacun constate le sort réservé aux hors la loi, court parce qu'aucun d'eux ne mérite la corde pour se pendre.
Anne et Mary sont condamnées à la pendaison le 28 novembre 1720, mais elles se déclarent enceintes. La loi interdisant d'exécuter une femme enceinte, elles échappent à la sanction. Mary meurt de fièvres ou d'une fausse couche en prison. Anne est miraculeusement libérée en décembre 1720. Est-ce son père, riche planteur qui a soudoyé les juges ?
Le temps des légendes
Puis on raconte qu'Anne a repris la mer tout comme Mary qui aurait feint la mort pour s'évader. On prétend également qu'Anne se serait mariée, aurait eu cinq ou huit enfants et aurait coulé des jours paisibles en Virginie jusqu'à un âge avancé. Films, opéras, récits content les aventures de ces femmes pirates dont les exploits ont marqué les esprits. Elles ont contribué, comme les femmes travesties en hommes à faire reculer les préjugés sur la faiblesse et la pusillanimité féminine.
Hélène Soumet
A lire : LES TRAVESTIES DE L'HISTOIRE paru chez First par Hélène Soumet
Site de l'auteure : www.helene-soumet.fr







