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GAROU à Dubaï, rencontre…

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Écrit par Marie-Jeanne Acquaviva
Publié le 28 octobre 2018, mis à jour le 18 février 2021

Une rencontre avec Garou, un chanteur multifacettes, grand interprète, show man, le vrai « entertainer » à l’anglo-saxonne mais aussi un porte parole romantique de la langue française, toujours heureux d’aller à la rencontre d’un nouveau pays, et de toucher un nouveau public.

Il était à Dubaï à l’occasion de son concert au Jumeirah Beach Hôtel et en a profité pour se balader et faire un peu de tourisme dans les dunes « au son de Desert Rose de Sting, la version avec Cheb Mami » qu’il a intégré à son spectacle, un vrai « show » où il voulait surtout transmettre « beaucoup d’amour, de tendresse, d’émotion »

GAROU dubai
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Garou est un chanteur différent, non il ne rêvait pas d’être « une star, comme tous ces gamins d’aujourd’hui » qui pensent être « chanteurs sur Instagram » avant de faire un seul vrai concert. Non, lui il voulait « être archéologue ». Qu’en reste-t-il aujourd'hui? « Visiter tant de pays, aller à la rencontre de tant de gens c’est en quelque sorte devenu ma quête d’anthropologue », il n’y a rien qu’il n’aime plus que s’ouvrir aux autres et voir en contrepartie les autres s’ouvrir à sa musique.

 

Bien sûr tout le monde a fredonné Belle au moins une fois dans sa vie (si, si, avouez), et tout le monde sait que sa carrière a commencé sur le parvis de Notre Dame de Paris, en tout cas sa «  carrière visible », comme la partie visible de l’iceberg, car tout apprenti archéologue qu’il était, il a tout de même reçu sa première guitare dès l’âge de trois ans, et chantait en famille entre son père et sa mère. Puis très vite autour des feux de camps avec ses « chums » et pour charmer les « blondes ».

 

Puis arrive un « accident », un copain le pousse (au sens premier du terme) sur la scène d’un bar, le chanteur habituel n’est pas là, il enchaine un, deux, puis quatre, cinq titres, le succès est tel que le barman fait écouter la salle en délire au téléphone à son propriétaire en lui urgeant de venir voir le phénomène. Celui-ci débarque en 5 ‘ -  heureusement, car Garou vient d’attaquer la 6e et dernière chanson de son répertoire.  C’est l’offre qui ne se refuse pas : mais « en 48 heures je dois trouver un sound system apprendre à m’en servir, imaginer un spectacle …et élargir mon répertoire (rires) ». Au début les copains, les « chums » remplissent la salle, mais la salle ne désemplit pas et Garou ne cesse plus de chanter jusqu'à la rencontre 6 ans plus tard « digne de Cendrillon » avec Belle, ou plutôt avec le duo Riccardo Cocciante et Luc Plamondon.

 

Il faut se souvenir qu’en 1997, il y a plus de dix ans, les comédies musicales en France ce n’était pas vraiment un genre à la mode, pour dire le moins, « mais pour moi : aller jouer sur scène ? à Paris? Traverser l’océan pour aller à Paris? Voir l’Europe? Oui! Oui, Tout de suite! Quelle expérience géniale! Donc j’ai dit oui bien-sûr mais sans m’attendre à rien, et surtout pas à la gloire ou quoi que ce soit du genre - en plus sachant que j’aurais été déguisé en monstre totalement difforme couvert de latex, je voyais pas comment j’allais devenir le « jeune premier » avec cette tête-là - (rires), et sans même connaître les chansons !

 

Riccardo Cocciante m’a quand même joué Belle au piano, et il a tout de suite dit que je devais avoir le rôle quand j’ai commencé à chanter les premiers mots avec lui, pour lui c’était clair. » Le reste c’est de l’histoire ancienne, la chanson dès sa sortie a explosé les classements, et n’oublions pas que « c’était quand même mon tout premier enregistrement, quand on parle d’histoire à la Cendrillon (rires)… » Tout ce dont un chanteur peut rêver en somme, le succès miraculeux, le tube absolu… «Oui mais je ne peux même pas dire que c’était un vœux exaucé, car ce n’est rien de ce que j’avais souhaité au départ. Même si je suis incroyablement reconnaissant, et c’était indéniablement une expérience qui m’a propulsé comme une sorte de porte parole de la culture francophone en touchant le coeur de milliers de gens, juste avec cette chanson »

 

Alors aujourd’hui, Qu’est ce que Garou pourrait encore souhaiter ? Un succès de plus ? Un autre « Belle » à son répertoire ? Non, écoutez la réponse de celui qui au fond de lui est reste le gamin canadien qui jouait de la guitare autour des feux de camps : « si je pouvais exaucer un vœu, ce serait de tout recommencer à zéro, tout pouvoir refaire encore une fois. En tant qu’artiste la chose la plus importante est de garder son enfant intérieur bien vivant, capable de s’émerveiller, d’être naïf. Les enfants ont eux seuls le secret de la communication absolue : regardez un groupe de petits jouer au parc, tout le monde s’attendri, souri….cette émotion-là est la plus forte, cette communion, et si je pouvais exaucer un vœux ce serait oui, de redevenir enfant et d’avoir la joie de tout recommencer encore une fois. »

 

La simplicité, et une sincérité bien rares dans le milieu, peut-être justement parce que c’est un artiste capable de prononcer cette acrobatie verbale, sans arrière pensée « c’est quelque chose que je ne devrais pas dire, et on me dit souvent justement de ne pas le dire, mais tant pis je vais le dire quand même (rires): je ne me considère pas un artiste…Parce qu’un artiste c’est quelqu’un qui a quelque chose a dire en absolu, qui a besoin de s’exprimer absolument, quelqu’un qui je pense est plutôt autocentré tout en cherchant à communiquer quelque chose d’essentiel à ses yeux. Moi je suis plutôt du côté de l’entertainer, un homme de spectacle, j’aime que mes spectateurs s’amusent, avec moi bien sûr, mais surtout tous ensemble : que mes concerts soient un grand happening, donc si les gens ne sont pas heureux, en train de sourire, de danser, pour moi c’est raté».

Garou dubai
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C’est aussi un artiste - quoi qu’il en dise - capable de jongler entre deux langues,  mais plus encore de construire des ponts entre elles : « J’aime chanter dans les deux langues, cela fait partie de mon équilibre. En anglais vous chantez un phrasé, une mélodie, c’est sans doute pour cela qu’il est plus facile de chanter beaucoup de styles différents en anglais, parce que cela s’écoule comme une mélodie, avec une certaine facilité. En français ce sont les mots, et même le mot qui est important. C’est à dire qu’il va y avoir un mot, un seul mot sur lequel vous devez mettre l’accent, et l’impact est si fort, rien à voir avec le phrasé anglais. Mais comme j’aime tout, j’aime jouer avec les deux, je vais essayer de phraser le français et d’accentuer les mots en anglais, d’en faire une sorte de fusion. »

 

En ce sens il est l’essence même du Canadien : un parfait équilibre entre le français et l’anglais, mais aussi un équilibre entre les show, les spectacles, le coaching, ses participations aux concours comme The Voice (des deux côtés de l’Atlantique) et les concerts, le chant, l’écriture…. ce qui lui donne une position vraiment particulière, presque unique, dans le monde de la musique car on ne voit pas tellement d’autres artistes porter autant de casquettes différentes avec autant d’aise. Là où les autres présentateurs sont « très cérébraux «  lui va rester « très spontané et instinctif » considérant qu’ il ne faut pas trop préparer et intellectualiser mais au contraire  « se livrer un peu ! Improviser, être authentique : c’est le Canadian way : l’instinct de survie (rires)  C’est sans doute aussi pour ca que je n’ai pas peur de grand chose dans mon travail, en particulier sur scène, car en fait j’adore les erreur : si quelque chose tourne mal, c’est fantastique : car l’instinct doit prendre le relais, et tout devient plus vrai ! »

 

Cette année où nous avons perdu Aznavour et Johnny, on a envie de le rattacher à cette lignée de grands interprètes, des grandes voix profondes, un phrasé particulier et un répertoire francophone aimé partout dans le monde… alors bien sûr ce sont des chanteurs avec lesquels il a « beaucoup partagé, j’ai chanté quelques fois avec Aznavour et bien entendu il était une source immense d’inspiration, certainement un des trois plus grands chanteurs français de tous les temps, une stature immense. Et Johnny aussi à sa façon, avec qui j’ai passé beaucoup de temps et chanté souvent, on voulait même ouvrir un resto ensemble !… Deux grandes pertes et deux vies et carrières immenses. Soyons honnête ceci dit, au delà de la peine de leurs familles, il est difficile d’être triste pour Aznavour qui s’en est allé à 94 ans pratiquement sur scène, et même pour Johnny qui a vraiment brûlé la vie par les deux bouts, vivant toujours à 300 à l’heure. …Parfois je réalise oui, que je suis un des rares chanteurs français aussi populaire dans autant de pays, alors je ressens une certaine responsabilité, mais je n’ai pas envie de l’endosser, je la laisse volontiers à d’autres. Ça m’est arrivé à moi par hasard et je veux rester le même, garder mon instinct, ma spontanéité et  je ne veux pas y penser trop.  Ceci dit il y a un héritage du français, et ça je suis très heureux de le porter. »

 

C’est tout de même une des rares si ce n’est la seule star d’envergure internationale à chanter toujours en français partout où il va, sans vouloir pour autant se montrer obtus, « c’est à dire que je ne vais pas conduire une conférence de presse comme celle-ci en français, car évidement ce que je veux c’est communiquer, me faire comprendre, transmettre ce que je suis, mais oui : je chante dans tous les concerts en partie en français. C’est incroyable de pouvoir inviter les gens vers ça, partager avec le français et je suis très fier de pouvoir le faire »

 

Cette fierté, c’est aussi un désir d’enseigner, de transmettre, passer à cette jeune génération souvent obsédée de gloire, cette attitude « cool » , ce sens de la musique et la joie de jouer avant tout, en somme une autre forme de responsabilité et « oui cette responsabilité-ci je veux l’endosser. De plus en plus j’anime des shows parce que je veux leur montrer ma vision des choses. Il faut les amener à se poser la question « ah je veux réussir, être une star… » Oui mais pourquoi ? Je veux être fameux ? Donner un grand spectacle ? Parce que je veux communiquer une émotion… Oui, voilà, c’est ça !… Il faut revenir à la naissance de la musique : ce sont les bruits de la nature, les battements du cœur de la mère pour le nouveau né qui pleure, la berceuse de vos mères : c’est ça la première musique du monde. Tous ces jeunes qui veulent devenir chanteurs sont un peu comme des bébés pleurnicheurs « je veux, je veux, je veux… » Mais au lieu de jouer ce rôle peut-être un peu malgré eux, ils devraient prendre la place de la mère, celle qui apaise, transmet une émotion en fredonnant une mélodie, apporte de la douceur au monde, qui aide et inspire les gens autour de soi »

Garou dubai
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Difficile de donner des conseils à la nouvelle génération biberonnée aux téléchargements instantanés et à la musique jetable, mais Garou, lui, veut les faire venir dans son studio d’enregistrement construit en pleine nature dans sa forêt Canadienne, leur montrer autre chose, le plaisir de jouer de « faire un jam »,  parce que fondamentalement la musique n’est pas une carrière, comme le disait son père mécanicien - qui aurait peut-être voulu faire un peu plus que jouer en famille - la musique ce « n’est qu’un hobby » .

 

Et c’est là sans doute un peu du secret de l’authenticité de Garou « la musique ça demande énormément de travail, mais il ne faut pas travailler en pensant qu’on a un métier et une carrière musicale, il faut travailler par passion, oui comme si c’était « juste un hobby », et avec un peu de chance, vous n’aurez pas besoin d’avoir un travail (en plus) ! »…La musique c’est simple au fond, comme un sourire : le grand sourire contagieux de ce loup aux dents blanches qui nous entonne a capella de sa voix grave reconnaissable entre mille le mythique Smile, though your heart is aching…Smile, even though it’s breaking…When there are clouds in the sky, you’ll get by… (musique originale de Charlie Chaplin, Les Temps Modernes, 1936, ndlr)…. « Sourire chasse les nuages, et donne un peu de chaleur aux gens, c’est tout ce que je veux faire avec ma musique »

 

C’est son tout premier concert à Dubaï, nous l’avons rencontré juste après les répétitions finales, et ce qu’il avait envie de présenter ici comme show c’était encore une fois faire la part belle à la spontanéité être juste « contagieux » emmener ses musiciens «  s’amuser, aller jouer avec mes vieilles chansons, les transformer, prendre des risques…Les gens s’attendent à mon côté romantique mais je suis profondément rock & blues ! Je jongle avec plein de styles en fait,  j’aime toutes les chansons si elles sont belles et bien jouées, et j’aime surtout improviser, me faire plaisir et faire plaisir à ceux qui viennent m’écouter ». Gageons qu’au vu du succès du concert,  la « jam session façon Garou » en aura séduit plus d’un.

 

 

 

 

 

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Publié le 28 octobre 2018, mis à jour le 18 février 2021

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