LINDA BONNAR – Le coaching pour les jeunes

Linda Bonnar a l’esprit aussi dynamique que ses jambes et une volonté à toute épreuve. Cette enseignante en histoire devenue coach de vie sait ce que veut dire « atteindre un objectif » et pour preuve : elle courre des marathons. Sa pertinence décapante matinée de douceur et d’empathie fait d’elle l’alliée précieuse des ados et jeunes adultes… et de leurs parents. À leur demande, elle a même récemment publié l’ouvrage Press Play - un livre comme un coach - qui s’adresse directement aux jeunes. Comment ? En parlant leur langue, en leur posant les bonnes questions et en lien avec les problématiques qui leur sont propres.
lepetitjournal.com/dubaï : Comment êtes-vous devenue coach plus spécifiquement pour les adolescents et jeunes adultes ?
Linda Bonnar : J’étais enseignante en histoire. Au début, face à une réaction négative de mes élèves recevant un énième devoir à faire, je disais simplement « c’est la vie, débrouillez-vous ». Mais j’ai vite perçu l’inefficacité de ma réponse et pensé qu’il y avait autre chose à faire. J’étudiais en parallèle la PNL (programmation Neurolinguistique) et le coaching, et instaurai un dialogue: « je ne peux pas annuler le devoir car mon rôle est de vous enseigner l’histoire mais aidez-moi à comprendre… Quelles solutions pourriez-vous trouver ? Comment s’organiser mieux ? » Ensemble, nous avons trouvé des solutions et sommes allés de l’avant.
Comment votre travail aide-t-il concrètement les jeunes (et éventuellement leur parents) ?
Beaucoup de jeunes veulent des conseils, par exemple savoir comment se faire plus d’amis etc. Alors j’essaie de leur montrer leurs options, de les faire réfléchir sur eux-mêmes, leur comportements, de donner des exercices de confiance en soi.
Il s’agit aussi de savoir comment aborder tel ou tel sujet avec son père ou sa mère, comment avoir une conversation même difficile plutôt que de cacher les choses.
Parfois, les parents font appel à moi et me mettent sur une piste. C’est à moi de creuser et si je perçois autre chose, de le faire savoir. Il y a toujours un débriefe après la séance. Certains parents ne croient pas ce que leur enfant m’a confié. Il ne s’agit en aucun cas de défendre un côté ou l’autre. Je ne prends jamais parti. Certaines personnes n’aiment pas ce que je leur dit, tant pis, je n’enjolive pas la réalité.
Le plus important est de créer une plateforme pour un dialogue ouvert où l’on peut être honnête envers soi-même. Je veux les aider à devenir leur propre coach, avec une plus grande conscience de soi et davantage d’outils pour s’autogérer.
Avez-vous un exemple spécifique que vous pouvez nous donner ?
Oui, dans ce cas précis une opportunité a été créée pour dialoguer et comprendre « comment » changer. Une jeune adolescente adorable était frustrée par manque de liberté et cela se ressentait dans sa communication avec ses parents. Les parents, frustrés aussi, la punissaient. Ils s’adressaient à elle de la manière qu’ils pensaient juste et sa réaction lui semblait sa meilleure option (elle faisait le mur). J’ai organisé une conversation où chacun aurait son temps de parole. Puis, en privé, j’ai demandé à cette jeune fille de se mettre à la place de sa maman. Elle comprit ses craintes. Enfin, la jeune fille a demandé comment regagner la confiance de ses parents. Sa mère a répondu que c’était une question de temps. Le père et sa fille ont eu cet échange : – « J’ai déjà confiance en toi. Je n’aime simplement pas la façon dont tu nous parles ». – « Je pensais que tu m’enfermais pour que je ne voies personne ! » - « Au contraire, évidement que je souhaites que tu aies des amis. Je veux ton bonheur. »
Et parfois cela se passe moins bien ?
Oui. Une mère insistait sur le fait que tous les problèmes de son fils étaient de la faute de l’école, son fils n’y était pour rien. Elle souhaitait que je parle à l’école puis négociait mes honoraires. (Je dû expliquer que je n’agirai pas ainsi et que ce n’était pas « Ramadan sales »). Lors de la première séance, le jeune garçon plaisantait beaucoup. Je lui ai demandé pourquoi, lui ai fait remarquer qu’il omettait de me raconter 100% de l’histoire. Je l’ai mis face à ses contradictions : il est plus facile de blâmer l’école, les profs pour quelque chose qu’il n’a pas pu obtenir (à 19 ans passé, il aurait préféré être à l’université). Il n’a pas voulu l’entendre et a rejoué sa carte de victime en disant que personne ne pouvait le comprendre. Lui et sa mère auraient voulu une solution instantanée, un raccourci. Il n’y en a pas.
Comment est né Press Play ?
Press Play est né, ici aux EAU en Février 2017. Alors que j’avais aidé une élève tourmentée, elle m’a suggéré d’en faire un livre qui offre ce type d’accompagnement. J’ai rassemblé des élèves, leurs parents, leurs idées… J’ai préservé un langage à leur attention.
Qui est votre lectorat ?
Le livre est un outil qui passe de main en main : il est utilisé principalement par des élèves d’école secondaire, d 12 ans à 18, 19 et même 20 ans ! Il est arrivé qu’une grande sœur le lise avec sa cadette pour l’aider. Parfois se sont des papas et des mamans qui y trouvent des clés pour comprendre, gagner en empathie, changer de perspective, ils posent des questions différentes et finissent par avoir des conversations qu’ils n’auraient jamais pensé.
Vous êtes en train de revoir et compléter l’ouvrage en vue d’une publication plus internationale (UK et USA)? Quelle différence cela fait-il ?
Certains éléments étaient plus complexes à aborder dans notre contexte régional. Par exemple, chez les jeunes il y a de nombreuses problématiques liées au corps. Il y a aussi des conflits internes : beaucoup de jeunes gens courageux ont exprimé la difficulté de se sentir eux-mêmes. Certains renient une part de leur personnalité pour coller aux valeurs familiales. Il y a le poids de la tradition, de la culture. Cela est d’ailleurs aussi valable pour nous, adultes ! Il y a toutes les questions de sexualité chez les adolescents… Je veux intégrer ces problématiques à l’ouvrage.
Et après ?
Un livre de coaching pour adultes « Just three things ». Pour beaucoup, c’est un nombre accessible. Je viens d’en terminer la préface pour une publication au premier semestre 2019.