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ALEX RIGAUD, la nouvelle app Pockero sauvera-t-elle le monde ?

Alexandre Rigaud Alexandre Rigaud
Écrit par Marie-Jeanne Acquaviva
Publié le 18 août 2019, mis à jour le 19 août 2019

Né en Chine d’une mère australienne et d’un père français, il a vécu au Liban, au Koweït, et aux Émirats. Aujourd’hui de retour à Dubaï où il se sent plus moyen-oriental qu’expatrié, il vient présenter, à tout juste 24 ans, un projet d’économie collaborative élaboré avec ses partenaires Tuan Pham, Fabien Chung et Gustavo Montero: Pockero. À l’aise comme un poisson dans l’eau avec le jargon et le monde de la Blockchain, des crypto-monnaies et globalement de ce qui constitue notre futur proche et l’avenir de nos enfants; enthousiaste et didactique - il prend même la peine de gribouiller un petit schéma pour clarifier ses explications techniques auprès de la néophyte que je suis – cette application qui marie technologie et humanisme est destinée à rendre le monde meilleur, tout simplement.

 

Lepetitjournal.com/dubaï : Quels sont vos premiers pas dans la technologie ?

Alex Rigaud : Je commence le codage en autodidacte dès 12 ans et deux ans plus tard je code pour des associations, je fais ça pour m’amuser, bénévolement. Quand je finis mon lycée - je fais toute ma scolarité aux Émirats - je décide de chercher d’autres compétences et donc de me former à autre chose que l’informatique et l’ingénierie, que j’ai pratiquement appris seul. Lorsque je passe mon bac, je me dirige donc vers une école de commerce, en France.

 

Comment se passe le retour en Métropole ?

Ma première année en France est un gros choc culturel, c’est indéniable,  je me sens encore aujourd’hui plus oriental que français !

 

Qu’est-ce qui vous étonne ou vous choque le plus ?

Honnêtement ? Le jugement perpétuel, des heures à poser un regard excessivement critique les uns sur les autres, pour un oui pour un non… et puis le fameux « caractère de cochon » des Français au quotidien : ce n’est pas une légende ! Mais je tiens bon et je vais passer deux ans et demi en France et effectuer énormément de stages en extérieur. Au bout d’une année, je me fais débaucher par Apple…

 

Comment se passe ce recrutement, comment vous ont-ils repéré ?

Tout simplement par Linkedin… mais au moment où je reçois leur offre, je suis de retour d’une mission humanitaire et la dernière chose dont j’ai envie c’est de travailler pour une grosse multinationale… Je passe de longues heures vraiment partagé, mais le choix de la raison l’emporte, il est difficile de dire non à Apple à 19 ans !... Je vais y suivre plusieurs programmes de formation et évidemment c’est super intéressant. Je vais monter par la suite plusieurs start-up en Californie, dont une qui va traverser une faillite majestueuse, un plantage dans les règles de l’art !

 

Qu’est-ce que c’était comme projet et pourquoi selon vous a-t-il échoué?

Une entreprise dans les objets connectés… et si ça n’a pas fonctionné c’est parce que lorsqu’on a confronté le produit au public, il était évident pour moi qu’il fallait le modifier et le faire évoluer. Le reste de l’équipe - plus âgée - n’a pas du tout vu cela comme une opportunité mais plutôt comme une sorte de déchéance en soi et ils se sont cramponnés à leur idée avec beaucoup de rigidité.

 

Comment rebondissez-vous ?

Je me lance dans une autre start-up et c’est ce projet-là qui va nous amener jusqu’à Pockero. Je travaille à l’époque avec deux associés sur une idée qui marie le concept de Spotify et de la Blockchain, un moyen de gratifier les petits artistes oubliés par les grandes Majors, ceux qui passent à travers les mailles du filet. Mais nous jouons de malchance avec le timing car c’est le moment ou Apple Music est lancé et matériellement il n’y a plus de place pour notre projet sur le marché.

 

Mais le concept reste ?

Oui, c’est un peu ça: nous remettons l’ouvrage sur le métier, à l’ancienne, et l’idée de Pockero naît d’un constat tout bête : faciliter, sécuriser et récompenser l’entraide entre voisins. Les deux anecdotes - désormais connues - qui précèdent à la naissance de notre APP c’est d’abord ce que vit mon associé Tuan Pham lorsqu’il déménage à Lille. Il monte tout seul ses trois caisses en carton, mais impossible de monter le frigo bien-sûr ! Il passe trois heures à toquer aux portes, personne ne lui répond. Les gens ont peur, se méfient, ils ne le connaissent pas. Il part d’un constat tout simple: si seulement il existait un moyen de mettre en relation ceux qui ont besoin d’un coup de main à l’instant et ceux prêts à le donner.  De telle sorte que les deux parties se trouvent facilement, en temps réel et puissent se sentir en totale confiance... En même temps je me souviens de mon grand-père qui pratiquait le troc quotidiennement, c’est à dire que concrètement il allait à la poste et achetait ses timbres avec les œufs de ses poules  ! Dans ma tête c’est alors très clair : la technologie est l’élément clé qui peut combiner le troc et l’entraide de manière efficace, sûre et facile.

 

Ce qui va à l’encontre des lieux communs non? Comme quoi la technologie tuera l’humain?

La technologie est isolante, ce n’est un secret pour personne, c’est très bien expliqué dans 21 leçons pour le XXIe siècle (Yuval Noah Harari, Albin Michel, 2018), mais chez Pockero, nous pensons - et nous ne sommes pas les seuls - que la technologie peut également être un outil de reconnexion. Qu’elle peut faire table rase du passé, éliminer tout ce que les relations humaines ont de faillible, de dangereux, de prône à la perversion pour créer une plateforme instantanée et interactive, infalsifiable, impossible à détourner.  Le tout couplé à un système de récompenses et de fidélité bipartite.

 

C’est finalement, avec les défauts que l’on connaît aujourd’hui, une Überisation de tous les échanges non ?

En quelque sorte, même si je préfère imaginer cela comme la toute première brique d’un salaire universel…

 

C’est-à-dire ?

Et bien la plateforme en question étant fondée sur la technologie Blockchain, c’est ce qui la rend infalsifiable et le système de récompense quant à lui est à la base d’une monnaie virtuelle ou crypto-monnaie (comme le Bitcoin), elle aussi infalsifiable, horodatée, impossible à dupliquer. Le principe repose sur le fait que tout être humain qui ne contribue pas à la société est en quelque sorte “dormant”, comme peut l’être de l’argent en banque par exemple. Or, pour qu’il contribue à la société, il faut le motiver:  d’où la récompense. Par exemple, nous venons de signer un partenariat avec une boîte de Wellness (bien-être) où les participants vont gagner des “points” à chaque action sportive effectuée. Points qu’ils pourront utiliser sur Pockero et bientôt partout, ce que nous espérons, donc le début d’une monnaie et d’un salaire universel.

 

Soyons un peu l’avocat du diable dans cette belle utopie : comment être certain que la Blockchain ne sera jamais falsifiable, même avec l’arrivée des ordinateurs quantiques, qu’elle ne pourra jamais “tomber en de mauvaises mains”?

 

Jusqu’à présent, il est matériellement impossible de la hacker, c’est-à-dire que techniquement ce serait envisageable, en théorie, mais cela demanderait cinq quintillions d’années… en gros il y a statistiquement plus de chance de gagner 9 fois - de suite - à l’Euro million. Disons que pour l’instant et pour encore un certain nombre d’années, c’est concrètement impossible. C’est d’ailleurs avec un projet de crypto-monnaie que nous avons participé au Monaco Better World Forum www.monacobwf.com (qui met l’art cinématographique au service de grandes causes humanitaires et environnementales) pendant le Festival de Cannes en Mai dernier. Notre équipe a le projet de créer la Better World Coin (le token pour un monde meilleur – ndlr) ce qui permettra au MBWF de lever des fonds de manière transparente, infalsifiable et sécurisée. Ceci sera valable tant pour le donneur que pour le receveur. Par la suite, ce token pourra être décliné pour servir la cause d’autres organismes de charité. Mes partenaires, mon équipe et moi sommes également sur un autre projet pour appliquer toujours ce même principe de traçabilité pour des pièces détachées dans le domaine de l’aviation…

 

Une utopie très concrète au fond, et qui semble, à vous entendre, pouvoir sauver le monde, tant ses applications sont protéiformes. Et demain ? Vers quoi allez-vous vous tourner ?

 

Pour savoir où j’irai demain - ce qui pour moi reste encore un mystère, j’imagine ma vie en continuité, je n’ai pas de plan préétabli- il faut savoir d’où je viens. Mes tout premiers pas dans le codage, je les dois à ma grand-mère, une femme très « hippie » que j’adorais et de qui je tiens toutes mes valeurs centrées sur l’humain, le partage, l’équité. Lorsqu’elle succombe au cancer je suis dévasté et du haut de mes 9 ans j’imagine que si j’apprends à coder, ce nouveau langage me permettra d’une manière ou d’une autre de communiquer avec elle - les enfants n’ont pas de limites à l’imaginaire, et c’est tant mieux.... Pour moi, comme pour mes partenaires, la technologie est donc non pas ce qui perdra l’humain, mais ce qui va le réparer, le rendre meilleur. Oui, quelque part le sauver… Ce qui ne m’empêche pas de rêver aussi parfois d’un avenir d’ermite cloitré en pleine campagne avec mes chèvres ! Ou de revenir à la restauration, le métier de mon père.

 

Comment pensez-vous que Dubaï et les Émirats vont réagir à Pockero ?

 

Les Émirats tels que je les connais depuis mon enfance sont très loin de cette bulle d’expats ultra gâtés décris à gogo dans les media Européens ou Américains. C’est au contraire une société traditionnellement fondée sur l’entraide bédouine et c’est aussi un système nucléaire de communautés d’expatriés qui reposent également beaucoup sur l’entraide et le réseau… Pockero apporte la possibilité de s’entraider de façon plus efficace et plus fiable puisque tout repose sur le groupe.

 

Où vous rencontrer et comment en savoir plus sur vos projets ?

 

Cette année, je donne des cours auprès de Google for entrepreneurs Middle East ainsi que des cours en Master sur l’économie collaborative auprès de l’INSEC France où j’organise un Hackaton pour les élèves. Gustavo Montero (un de mes partenaires et Chairman de notre société) ainsi que moi-même, participons à de nombreuses conférences internationales sur la Blockchain tout au long de l’année, dans la région ou à l’étranger. J’adore également aller à la rencontre des plus jeunes dans les écoles, leur dire simplement que s’ils l’imaginent, c’est possible !

 

Vous êtes un enfant des Émirats, qu’est-ce qui, aujourd’hui que vous êtes revenu y vivre, constitue « votre Dubaï » ?

 

Beaucoup de choses… J’adore ce grand melting pot typique du Moyen-Orient, le rythme de vie oriental, les rapports humains plus détendus et plus sincères. Si je devais chercher une madeleine de Proust locale, ce serait bien sûr la maison de mon père, et sans doute mes virées et mes randonnées autour de la ville, depuis Fossil Rock jusqu’aux montagnes voisines. Et puis bien entendu aller manger sur le pouce à Satwa, chez Ravi ou dans mon petit coin à Shawarma favori, où je vais depuis que je suis petit et où rien n’a changé, ni le prix (5 drh) ni les gens. Je m’y sens vraiment chez moi.

 

Pour plus d’informations sur la société SmartBlock technologies, ses produits et services ainsi que l’application Pockero visitez: www.smartblocktech.io et www.pockero.network

 

pockero

 

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Publié le 18 août 2019, mis à jour le 19 août 2019

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