À l’affiche des Tirailleurs, Omar Sy campe un père sénégalais envoyé de force avec son fils combattre les Allemands lors de la Première Guerre mondiale. Il rejoue à l’écran l’histoire méconnue des tirailleurs sénégalais sacrifiés par la France et laissés pour compte après la victoire des Alliés.
Film remarqué de ce début d’année, Tirailleurs est une fiction de Mathieu Vadepied qui prend appui sur un fait historique oublié. De 1914 à 1918, 200.000 Africains des colonies ont combattu les Allemands dans l’armée française en métropole. Malgré leur participation, ils n’ont jamais reçu de reconnaissance de la France.
Du Second Empire à la Première guerre mondiale, l’histoire vraie des tirailleurs
Ils étaient 200.000 enrôlés dans l’armée française pendant la Grande guerre, souvent de force. 30.000 d’entre eux sont décédés en Europe dans les combats face aux Allemands. Les tirailleurs venaient principalement de Sénégal, comme Bakary (Omar Sy) et son fils Thierno (Alassane Diong), mais aussi de Côte d’Ivoire, du Mali, du Niger ou encore du Gabon. Créé en 1857 sous le Seconde Empire, le régiment des tirailleurs se développe nettement lors de la Première Guerre mondiale.
Face à la supériorité numérique des soldats allemands, les Français cherchent à tout prix à conscrire de nouveaux hommes dans l’armée. La « Force noire » apparaît donc aux chefs des armées comme la solution idéale pour venir gonfler les rangs français. Alors que la conscription volontaire ne suffit pas à gagner de nouveaux soldats des colonies, les Français décident d’enrôler de force les hommes africains. Ils sont ainsi envoyés en métropole combattre sur le front. Mathieu Vadepied a d’ailleurs choisi d’ouvrir son long-métrage à Verdun, théâtre des violents affrontements de la Grande guerre.
Un film de guerre qui reprend les codes du genre sans originalité
Les Tirailleurs est avant tout un film de guerre qui emprunte tous les codes du genre. Par ses scènes de combat dans les tranchées et d’assauts lancés au milieu des bombardements, le film est très semblable à des longs-métrages tels que Cheval de guerre de Spielberg ou Tu ne tueras point de Mel Gibson. La manière de traiter le thème est donc assez classique, et aurait sans doute mérité de plus longs développements sur la situation des tirailleurs après la guerre. La musique d’Alexandre Desplat (compositeur français récompensé des prix les plus prestigieux) accompagne en revanche à merveille le drame qui se noue à l’écran.
Omar Sy et Alassane Diong, au cœur du drame familial et historique
À la brutalité de la guerre et l’arrachement inhumain des tirailleurs à leur famille, se superpose la peur de Bakary pour son fils. La relation qu’il entretient avec Thierno est au cœur de la fiction. Alors qu’il essaie de le protéger à tout prix de cette guerre et des combats, Thierno se fait peu à peu sa place dans le régiment, au point de monter en grade. S’installe un sentiment d’incompréhension chez Bakary, alors que son fils semble vouloir prendre part au combat de son plein gré. Des réactions qui illustrent les différentes facettes de ce corps d’armée, mêlant soldats volontaires et enrôlés de force.
Non seulement acteur, Omar Sy est également co-producteur du film. Le sujet lui tenait à cœur puisque son père est sénégalais. Il rend hommage à cette page de l’histoire du Sénégal avec son neveu, Alassane Diong, qui interprète son fils dans le film.
Les tirailleurs, grands oubliés après la guerre
Si le long-métrage de Mathieu Vadepied ne dit rien du devenir des tirailleurs qui ont survécu, après la guerre, il ne laisse que peu de doute sur leur sort. Naturalisation française, versement d’une pension de guerre...aucune des promesses faites par la France aux tirailleurs venus rejoindre les rangs de l’armée n’ont été tenues.
Le 4 janvier, jour de la sortie en salles des Tirailleurs, le ministère des Solidarités français a annoncé que les tirailleurs africains pourraient désormais rentrer dans leur pays en continuant à toucher leur minimum vieillesse. Ils devaient jusqu’ici passer au moins six mois de l’année en France pour pouvoir le toucher. La mesure, attendue depuis longtemps par les vétérans, va pouvoir bénéficier à vingt-deux tirailleurs africains de la Seconde guerre mondiale. Une reconnaissance tardive, permise en partie par la fiction de Mathieu Vadepied. Grâce à elle, ces soldats inconnus entrent finalement dans l’Histoire.