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Retour vers le passé : à San Telmo, la pharmacie la plus ancienne d’Argentine

Sur la Plaza de Mayo, les touristes se pressent pour photographier des monuments emblématiques de Buenos Aires. Peu savent qu’à quelques pas, au croisement des avenues Alsina et Defensa, se trouve un véritable morceau d’histoire de la capitale. Il s’agit de la Estrella, la première pharmacie d’Argentine, ouverte depuis 1834. Visite de ce musée hybride situé en plein cœur de San Telmo.

plus vieille pharmacie de Buenos Airesplus vieille pharmacie de Buenos Aires
"La Estrella" plus vieille pharmacie de Buenos Aires. Crédits: Clara Monteiro
Écrit par Clara Monteiro
Publié le 7 août 2025, mis à jour le 8 août 2025

Depuis la rue, difficile de savoir que cette vieille enseigne attire des touristes du monde entier. Pourtant, en entrant, tout fait sens. L’endroit a conservé son charme d’antan : les lustres se reflètent sur les murs de bois sculpté, d’un style art nouveau. Un portrait du XIXe siècle est accroché au-dessus d’une étagère remplie de produits de soin pour bébé. 

 

Alberto Paredes, pharmacien, y travaille depuis trente huit ans. “Quel privilège de pouvoir retourner dans le passé tous les jours ! C’est évidemment une fierté d’être ici. Les gens viennent de partout dans le monde pour la visiter. Beaucoup pensent d’ailleurs qu’il s’agit d’une église rénovée.” Ouvert de 8h à 19h, l’endroit voit passer autant d’argentins venus récupérer leurs prescriptions médicales, que de visiteurs curieux armés de leur appareil photo. 

Un lieu de réunion secret

D’abord une boutique d’apothicaire, elle fournissait toutes sortes de drogues et de médecines anciennes. Elles sont désormais consignées dans des flacons poussiéreux derrière des vitrines : huiles de plomb, éther, alcool pur… L’enseigne est fondée en 1834 par un apothicaire italien, Pablo Ferrari, à la demande du premier président argentin, Bernardino Rivadavia. Ce dernier n’est pas le seul homme politique qui a un lien avec la Estrella : “À l’époque, vers 1895”, explique Alberto, “des hommes politiques comme Hipolito Irigoyen ou Bartolomé Mitre venaient se réunir tous les samedis dans le sous-sol de la pharmacie.” La boutique est en effet située à 300 mètres de la Casa Rosada. Discrète, elle permettait aux personnages importants de l’époque de se réunir et d’élaborer des stratégies politiques. Au cours du XIXe siècle, La Estrella devient l’une des pharmacies les plus importantes d’Amérique latine.

 

PHARMACIE PLUS ANCIENNE DE BUENOS AIRES
Les flacons d'époque. Crédit: Clara Monteiro

 

Un véritable musée

Au plafond, trois fresques représentent les allégories antiques de la Santé, de la Maladie et de la Pharmacopée. L’édifice devient Monument historique en 1969. La Municipalité de Buenos Aires le déclare alors officiellement comme Site du Musée de la Ville. Au-dessus d’Alberto, une frise représente une scène antique d’anges qui dansent et jouent de la musique. “Beaucoup de ces objets sont d’époque : évidemment les portraits, mais aussi l’horloge. Et même ce comptoir : il est importé d’Italie par Ferrari dès 1834.” Les visiteurs croient retourner à l’époque où la pharmacie était encore une affaire d’apothicaire. Les flacons antiques sont exposés au milieu des médicaments modernes. Devant le comptoir, un banc en bois massif, “conservé tel quel”, assure le pharmacien. Le sol est également d’origine, avec des mosaïques fines de style vénitien.

 

PLUS VIEILLE PHARMACIE DE BUENOS AIRES
Crédits: Clara Monteiro


Deux portraits de femmes nobles sont également accrochés sur les murs : “deux nièces, respectivement celle de Facundo Quiroga, écrivain argentin, et celle de Juan Manuel de Rosas” (Ndlr : un ancien gouverneur de la province de Buenos Aires). Pourtant, au sein de ce musée, les affaires continuent : “le fonds de commerce reste la vente de médicaments”, explique Alberto. “Nous sommes une pharmacie classique, à cela près que beaucoup de gens viennent uniquement pour admirer !

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