Après avoir rassemblé près de 3 millions de voix lors des pré-consultations dimanche dernier, Gustavo Petro est l'homme qui monte à l'approche des élections du 27 mai et du 17 juin. Il pourrait devenir le premier président de gauche en Colombie.
57 ans, économiste, diplômé de l’université catholique de Louvain en Belgique, cet ancien membre du groupe M-19 a été Maire de Bogota. Venu d’une famille modeste, il est aujourd’hui candidat à la Présidence de la Colombie avec le mouvement Colombia Humana.
Un ancien membre du M-19
Le M-19 est un mouvement de guérilla urbaine créé par des universitaires et des intellectuels issus de différentes tendances de la gauche. Il est connu pour la prise d´otages du palais de justice de Bogota en 1985, et le vol de l'épée de Bolivar. Au cours de cette période, Gustavo Petro a été torturé par l'armée, et emprisonné pendant deux ans pour port d´arme illégal.
Le mouvement a ensuite rendu les armes en 1990 à la suite d’un accord avec le gouvernement colombien. Un processus suivi par l'élection d'une Assemblée Constituante chargée de redéfinir la Constitution Colombienne en 1991.
Premières responsabilités politiques
A la suite des accord de paix, il exerce rapidement des fonctions politiques : député, sénateur et maire de Bogota. Il est le premier sénateur à dénoncer le scandale de la parapolitique dans les années 2000 (plusieurs personnalités politiques, proches de l'ex-président Uribe Velez ont reçu de l’argent de groupes paramilitaires).
Gustavo Petro fait de la lutte contre la corruption son cheval de bataille, ce qui lui vaudra de nombreux adversaires politiques.
Maire de Bogota de 2012 à 2016
Il mène de nombreuses actions sociales réformatrices :
→ Facilite l'accès à l'eau pour les habitants les plus démunis
→ Ouvre des centres de contrôle des naissance où l’on pratique l’IVG, dans le cadre défini par la loi, et crée un département consacré à la place de la Femme
→ Crée le Centro de Ciudadania LGBTI pour lutter contre les discriminations
→ Crée des centres d'attention mobiles pour les populations dépendante des drogues
→ Durcit les mesures contre le port d'arme à feu
→ Plaide pour la baisse du tarif des transports
→ Rompt avec le monopole des sociétés privées de ramassage des ordures
→ Tente de mettre fin à la pratique de la corrida, toujours pratiquée à Bogota mais se heurte à la Cour Constitutionnelle
Il est destitué de son poste de maire à mi-mandat, et interdit d’exercer des fonctions politiques pendant 15 ans, par le procureur général Alejandro Ordoñez, proche du gouvernement et de l'extrême droite malgré une injonction de la Commission interaméricaine des droits de l´homme (CIDH). Le Tribunal supérieur de Bogota ordonne 15 jours plus tard au Président Santos de rétablir Petro dans ses fonctions.
Vers la Présidence...
En 2010 il sort du Polo Democratico Alternativo pour créer le Mouvement Progressiste, rebaptisé Colombia humana pour les élections présidentielles 2018.
Son programme
Colombia Humana veut promouvoir la protection de l'environnement, l'indépendance de la justice, la lutte contre la corruption et veut promouvoir davantage de justice sociale. Petro a notamment inscrit dans son programme :
→ La défense des accords de paix
→ La création d'un système d'éducation gratuite
→ La démocratisation de l'accès à la santé en renforçant l´hôpital public
→ L'utilisation des énergies propres face au modèle productiviste et extractiviste
Un candidat menacé
Pour le candidat les menaces de mort ne sont pas rares, depuis plusieurs années il le dit répétitivement : “on” veut le tuer. Il a notamment été attaqué alors qu’il était en campagne à Cucuta, et a publié une vidéo montrant un impact de balle sur la vitre de son véhicule. Jusqu'à maintenant, les autorités démentent que l’impact ait été causé par des tirs. Durant la fin du 20e siècle en Colombie, pas moins de 5 candidats présidentiels ont été assassinés. Depuis janvier 2016, 282 militant syndicaux ou communautaires ont également été tués.
Mis à l’écart par les médias
Ses envolées anti-élites et son ex-appartenance au mouvement de guérilla M-19 sont souvent décriées. Les médias mainstream colombiens, qui appartiennent à de grands conglomérats économiques le boudent. Mais si le discours de classe de Petro effraie la droite qui le taxe de “populiste”, et l’accuse de vouloir faire de la Colombie “un nouveau Venezuela”, ses propositions et son style ont un écho certain chez les jeunes et parmi les classes populaires. Ce mois-ci il est crédité de 22% des intentions de vote selon l’institut de sondage Cifras y Conceptos, quasi ex aequo avec le candidat de la droite Ivan Duque.
Photos du compte officiel flickr et Facebook de Gustavo Petro.