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Rencontre avec ce volcanologue français dans la campagne de Taupo

Nico FournierNico Fournier
Écrit par Lepetitjournal.com Auckland
Publié le 2 juin 2013, mis à jour le 30 octobre 2017

Nicolas Fournier fait partie de l'équipe du centre de recherche GNS qui s'occupe de la surveillance des volcans en Nouvelle Zélande. Rencontre avec ce volcanologue français de 37 ans, dans la campagne de Taupo, où siège un des bureaux du GNS 

Lepetitjournal.com : Qu'est ce qu'il se passe dans ce bâtiment ?
Nicolas Fournier 
: GNS est institut des sciences de la terre en Nouvelle Zélande. Il y a trois bureaux principaux : à Wellington, ici à Taupo et un à Dunedin. Nous avons trois spécialités à Taupo : l'hydrogéologie (l'eau souterraine), la géothermie pour des raisons évidentes puisqu'il y en a partout ici, et la volcanologie. Je fais donc partie de l'équipe volcanologie qui compte une quinzaine de personnes chacune avec des spécialités différentes. Nous approchons les volcans par l'angle physique : étudier les tremblements de terre, essayer de faire de la modélisation sur ordinateur. On peut regarder ça du côté chimique en étudiant la composition chimique des roches. On peut aussi s'intéresser à la géologie d'un volcan, regarder la nature des cailloux. On peut aussi étudier ça d'un point de vue historique, il y a des gens qui passent en revue tous les anciens journaux parus à Taupo ou dans le pays pour essayer de mieux comprendre ce qu'il s'est passé avant d'avoir installé un réseau de surveillance. Il y a d'autres personnes qui approchent les volcans du côté sociologique en essayant de comprendre quelle est la meilleure façon de communiquer afin que tout le monde comprenne bien les risques? Ici, c'est un melting-pot d'approches pour un seul objet de recherche qui est le volcan !

Quelle est votre fonction ?

Je suis volcanologue. Cela veut dire que je fais partie de l'équipe qui s'occupe de la surveillance des volcans en Nouvelle Zélande. Nous faisons également de la recherche, nous essayons de mieux comprendre comment les volcans fonctionnent, comment ça se passe avant, pendant et après une éruption. Ce travail de recherche nous permet d'améliorer la surveillance des volcans.

Comment le budget du centre est-il géré ?

C'est un institut gouvernemental à la base, au statut un peu particulier. L'idée, c'est que le GNS soit un peu autonome au niveau financier, ce qui veut dire que nous devons aussi ramener de l'argent. En géothermie par exemple, nous avons beaucoup de contrats avec les compagnies géothermiques à côté, nous leur donnons notre expertise et notre. Faire des études pour les entreprises, c'est quelque chose qui rapporte de l'argent.

Quel est votre parcours et comment êtes-vous arrivé en Nouvelle Zélande ?

Pour faire court? Je suis de Clermont donc Auvergnat à la base. J'ai fais la plupart de mes études de sciences de la terre à Clermont. Après ça, je suis parti faire une thèse en Angleterre. Mon sujet de recherche était sur les volcans d'Amérique centrale, au Costa-Rica et au Nicaragua. Je passais deux à trois mois tous les ans sur le terrain, à bosser sur les volcans puis je revenais en Angleterre travailler sur mes données. Ensuite, je suis revenu en France pour un CDD en recherche. Après ça, je suis allé dans les Caraïbes où j'y ai vécu pendant cinq ans. Je travaillais en tant que volcanologue, je faisais de la recherche et de la surveillance sur les volcans dans les petites Antilles. Et puis il y a tout bêtement un poste qui s'est ouvert ici. J'ai candidaté et je suis donc en Nouvelle Zélande depuis un peu plus de quatre ans.

Comment avez-vous eu envie de devenir volcanologue ?

En tant qu'Auvergnat, les volcans c'est quelque chose qui a toujours un peu fait partie du paysage. C'était aussi pas mal enseigné à l'école, les excursions scolaires se déroulaient souvent dans les volcans car il y avait des choses à raconter dessus. Je pense que ça a joué son rôle. Ce qui m'intéressait aussi, c'était de faire un métier en rapport avec la science, où je pouvais passer du temps dehors et où j'avais un peu le sentiment d'être utile. J'ai travaillé tout à fait par hasard avec une équipe française sur un volcan en Italie quand j'avais à peu près 20 ans. Et j'ai su que c'est ce que je voulais faire.

Quand on parle de "volcan actif", ça veut dire quoi ?

Un volcan actif c'est un volcan qui est soit en éruption soit qui peut rentrer en éruption. C'est un volcan qui n'est pas mort, qui a toujours une source de chaleur en profondeur. Lorsque l'on parle de « volcan éteint » il s'agit d'un volcan qui a été actif et qui est entré en éruption il y a très longtemps mais qui n'a plus de magma en dessous, où il ne se passe plus rien. Comme le Cantal en France par exemple.

Aujourd'hui, quelle est la situation volcanique en Nouvelle Zélande ?

Il y a pas mal de volcans actifs en Nouvelle Zélande. certains sont même entrés en éruption en 2012 et sont toujours plus ou moins en phase éruptive. Concrètement, les volcans les plus actifs à l'heure actuelle sont White Island (éruptions en 2012 et début 2013), Tongariro (deux éruptions en 2012) et Ruapehu (la dernière éruption remonte à 2007).

Est-ce qu'il s'agissait de grosses éruptions ?

Non, c'était des petites éruptions. Cela aurait pu être dangereux à White Island s'il y avait des gens à proximité. A l'époque nous avions beaucoup limité nos visites de surveillance là-bas.

Concrètement, qu'est-ce qu'une "éruption" ?

Il y a plein de styles d'éruptions différents. Il peut y avoir du magma qui arrive à la surface (des roches fondues avec du gaz dissout dedans) et qui fait des gros panaches de cendres. Si le magma n'est pas trop visqueux il peut y avoir des jets de laves ou des coulées de lave comme on voit à Hawaï ou à l'Etna en Europe, c'est quelque chose de moins explosif. Il s'agit d'éruptions magmatiques qui ont différentes formes en fonction de la quantité de gaz et de la nature du magma. Après, il peut aussi y avoir des éruptions sans magma à la surface, c'est ce qu'il s'est passé à Tongariro. Le magma n'est pas arrivé complètement à la surface, il y avait de l'eau souterraine, le magma a vaporisé l'eau, la pression a augmenté et ça a explosé. Les cendres n'étaient pas faites de magma mais de tous les restes de cailloux qui se trouvaient sur place.

Quelles sont les conséquences pour le pays et pour ses habitants s'il y a une grosse éruption demain ?

Ça dépend? Nous n'avons pas parlé de la zone d'Auckland où il y a énormément de petits volcans. Ce sont principalement des volcans jetables, il y a une éruption et ça s'arrête. Si jamais il y a une autre éruption, ça formera un volcan ailleurs et ainsi de suite. Le problème d'Auckland par rapport aux autres volcans, c'est que l'on ne sait pas vraiment où ça va péter. Auckland est la plus grosse ville et le centre économique de la Nouvelle Zélande, ça veut dire que même une toute petite éruption peut avoir des dégâts assez ennuyeux. S'il y a éruption, par forcément à Auckland, les gens qui vivent à proximité recevront beaucoup de cendres, il faut faire attention en zone rurale de bien couvrir les réservoirs à eau. Le plus gros impact en zone rurale c'est que les cendres tombent par terre et les animaux sont les premiers touchés, ils respirent sans arrêt ces cendres qui vont directement dans les poumons. Il peut aussi y avoir des conséquences sur le trafic aérien, avec la fermeture de certains aéroports.

Quels sont les gestes à adopter en cas de problème ?

Déjà il faut savoir que les autorités tiendront les gens au courant, il y a tout un système en place qui permet de prévenir et d'indiquer à la population ce qu'il faut faire. L'impact majeur se fait principalement sur les cendres qui sont des particules très fines et nocives pour la santé. Il faut fermer la maison, les portes, les fenêtres pour éviter que les cendres rentrent. Pour les gens vraiment affectés par ce phénomène, il faut envisager de porter des masques anti pollution.

Les Néo-Zélandais sont-ils bien informés sur ce sujet ?

Pour moi c'est un des pays où il y a le plus de choses en place même s'il y a encore beaucoup de choses à revoir. Sur l'aspect "impact volcanique et moyens de communiquer", la Nouvelle Zélande est vraiment un des pays à la pointe. Il y a énormément de travail qui est fait, nous travaillons dessus, d'autres universités en volcanologie aussi. Au niveau de la surveillance des volcans, la Nouvelle Zélande est également très bien placée. Nous essayons de nous améliorer mais en comparant avec les autres pays, nous sommes assez bien lotis.

Mathilde Malnis (www.lepetitjournal.com/auckland) lundi 3 juin 2013

le petit journal auckland
Publié le 2 juin 2013, mis à jour le 30 octobre 2017

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