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DOSSIER RELIGION - (2) - Une séparation pas si nette entre l'Etat et la religion

Écrit par Lepetitjournal Sydney
Publié le 24 janvier 2017, mis à jour le 25 janvier 2017

Autrefois, la religion définissait un Etat mais désormais la multitude de confessions dans les pays modernes demande à l'Etat de définir clairement le terme de religion. Ainsi, la Haute-Cour d'Australie a défini la religion en 1983 dans une décision concernant l'Eglise de Scientologie. "Pour les besoins de la loi, les critères de la religion sont les deux suivants : tout d'abord la croyance en un Être Surnaturel, une Chose ou un Principe ; et deuxièmement, l'acceptation de règles de conduite dans le but de donner effet à cette croyance, bien que si ces règles de conduite sont contre les lois ordinaires, elles sont en dehors de l'espace d'immunité, de privilège ou de droit conférés dans le cadre de la religion". Lepetitjournal.com a décidé de s'intéresser à la place accordée à la Religion en Australie.

 

La relation entre l'Etat et les religions est toujours un point de discorde. La Constitution Australienne de 1901 établit une séparation entre le Commonwealth et la religion. Mais certains procédés semblent indiquer que la séparation n'est pas aussi hermétique qu'il le parait.

L'Australie se revendique comme un Etat séculier, c'est à dire un Etat laïc, dans lequel l'Etat et la religion sont séparés. Pourtant, les relations entre Etat australien et les religions sont totalement différentes de celles qu'il existe en France. Cela signifie-t-il que l'un de ces deux pays n'est pas séculier ?

Selon le philosophe canadien Charles Taylor, dans L'Âge Séculier, il existe trois sortes de sécularisation : l'effacement complet de la religion dans la sphère publique (une stricte séparation comme en France), la diminution importante du nombre de croyants dans la population d'un pays même s'il y a une religion d'Etat (comme au Royaume-Uni) ou la religion comme option pour l'Etat et la population (l'Etat peut avoir des interactions avec les religions tant qu'il n'en choisit pas une en particulier comme aux Etats-Unis).

L'Australie reste un pays religieux puisque 68% de la population s'est déclarée croyante lors du recensement de 2011. Elle n'est donc pas séculière par la deuxième forme de sécularisation. L'Etat australien ne pouvant pas établir de religion d'Etat, elle n'est ainsi pas séculière par la première forme. L'Etat australien peut interagir avec les instances religieuses, comme le financement d'écoles gérées par des organisations religieuses ou la reconnaissance des mariages célébrés par des autorités religieuses. Si l'Australie est un pays séculier, elle l'est donc par la troisième forme, la religion étant une option pour l'Etat et la population.



La Constitution Australienne de 1901, dans le chapitre 5 section 116, énonce clairement les relations entre le Commonwealth et la religion : "Le Commonwealth ne doit créer aucune loi dans le but d'établir une religion, d'imposer la pratique d'une religion, d'interdire le libre exercice d'une religion et aucun test religieux ne doit être requis comme qualification pour aucune fonction ou confiance publique sous le Commonwealth". Cette clause de la Constitution est proche du Premier Amendement de la Constitution des Etats-Unis d'Amérique : "Le Congrès n'adoptera aucune loi relative à l'établissement d'une religion ou à l'interdiction de son libre exercice". La Constitution Australienne annonce clairement que l'Etat est séparé de la religion même s'il peut avoir des interactions avec elle.

Et si certaines pratiques peuvent laisser sous-entendre que la séparation n'est pas réelle, elles ne sont seulement que des vestiges de la culture britannique. Certains états n'ont supprimé la loi du blasphème qu'il y a quelques années. De plus, le Parlement effectue une prière avant chaque session dont une partie est le Notre Père catholique. Selon Carole Cusack, professeur des Etudes Religieuses à l'Université de Sydney, ces coutumes ne sont que des reliques de culture, toujours présentes mais inactives. Les membres du Parlement, peuvent s'ils le souhaitent, ne pas prendre part à la prière.
 
L'un des contentieux les plus courants et un argument utilisé par le Parti Séculier, est le financement des écoles non gouvernementales et religieuses par le Commonwealth. L'Etat fédéral finance à hauteur de $4,8 milliards les écoles non gouvernementales contre $2,1 milliards pour les écoles gouvernementales. Mais comme le rappelle le Professeur Cusack, si l'Etat finance les écoles non gouvernementales, il finance les écoles de toutes les confessions. Il n'agit pas en faveur d'une religion ; il s'assure que toutes les écoles puissent dispenser un enseignement correct aux élèves.


Et si la Reine d'Angleterre, Elizabeth II, est officiellement le chef de l'Etat australien et le chef de l'Eglise Anglicane, elle n'a aucun rôle religieux en Australie. Ni le monarque régnant, ni le Gouverneur Général, ni les premiers ministres n'ont de rôle religieux.  Aucune autorité politique n'a  un rôle religieux en Australie et l'Etat ne peut pas agir en faveur d'une religion. Cette séparation est nettement moins stricte qu'en France mais elle est bien présente.

D'ailleurs, l'Anglicanisme, dont le chef religieux est la Reine d'Angleterre, est concurrencée depuis une cinquantaine d'année par le Catholicisme, l'Hindouisme ou encore l'Islam.

Image : Flickr

Lucie LESPINASSE (lepetitjournal.com/sydney) Mercredi 25 Janvier 2017

 

Le Petit Journal Sydney
Publié le 24 janvier 2017, mis à jour le 25 janvier 2017

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