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INTERVIEW - Olivier Weber : « En passant les lignes de front, on voit des personnages extraordinaires »

Écrit par Lepetitjournal Sydney
Publié le 28 novembre 2016, mis à jour le 28 novembre 2016

 

En visite en Australie pour présenter son nouveau livre Frontières, Olivier Weber a fait une halte à Sydney lors d'une conférence à l'Alliance Française. Lepetitjournal.com a rencontré le reporter de guerre, qui conjugue toujours ce travail risqué avec l'amour de l'écriture. 

Photo Thesupermat

Qu'est-ce qui vous pousse à aller dans des zones de conflit ? Avec quel état d'esprit y allez-vous?

J'y étais pour terminer mon nouveau livre et avec des organisations humanitaires. C'est d'abord le témoignage qui m'intéresse. Si on est attiré par la guerre pour l'excitation, c'est très dangereux parce qu'on légitime la guerre, donc il vaut mieux faire de l'alpinisme. En revanche en passant les barrières de feu, les lignes de front, il y a des personnages extraordinaires à rencontrer, des gens de la vie de tous les jours. Je suis très prudent et souvent j'ai peur sur le terrain. Mais ce n'est pas de l'adrénaline. Pour être en sécurité, on fait confiance aux gens qui nous emmènent. Quand on ne leur fait plus confiance, par exemple lors des guérillas, cela devient problématique. Par contre, il y a des paramètres humains qui nous échappent comme l'enlèvement.

Trouvez-vous qu'il est plus simple de toucher le public avec le roman qu'à travers les formes d'actualités traditionnelles quand on parle de la guerre ?

Les romans que j'ai pu lire sur les conflits que je n'ai pas vu, parce que j'étais trop petit, sur la Guerre du Vietnam ou la Guerre du Liban, m'ont, je pense, plus appris que les reportages ou récits. Les romans ne sont jamais de la pure fiction puisque l'on parle aussi de ce que l'on a vécu. Même si on croit inventer une histoire, c'est du vécu, des sensations, des valeurs et des messages que l'on veut faire passer. Le dernier roman, avant Frontières, s'appelle L'enchantement du monde. C'est un livre sur un peintre vénitien de la Renaissance qui part au XVème siècle pour aller voir le grand ennemi de la chrétienté, le sultan ottoman. J'en ai fait une parabole sur la lutte contre le fanatisme. On est dans une histoire vraie que j'ai totalement romancée avec une histoire d'amour et d'aventure. Le dernier livre, Frontières, est un essai ; c'est le retour au réel.

Vos livres restent quand même empreints d'actualité, vous n'arrivez pas à vous séparer de cette prise avec l'actualité ?

Je pense que les frontières sont très floues entre ces deux formes d'écriture que sont d'une part le reportage et d'autre part le roman, la fiction pure. On parle d'un réel qu'on réinvente et je trouve ça extrêmement enrichissant. Les Américains appellent ça la creative nonfiction. Depuis l'âge de 8-10 ans je rêvais d'écrire et de voyager. Donc je n'avais pas beaucoup de possibilités : être reporter ou écrivain ou les deux. Je me disais qu'un jour je voudrai être dans un studio pour écrire et ne faire que ça. Mais à présent je dirais qu'il ne faut pas se désengager du réel parce que sinon on est face à son nombril, face à soi-même. Ecrire c'est vivre, c'est raconter la vie des autres. Et donc j'ai besoin de retourner sur le terrain d'abord pour moi-même.

Vous avez beaucoup écrit sur le fondamentalisme religieux, trouvez-vous qu'aujourd'hui, en France comme ailleurs, il y a une montée de la religiosité ?

Oui beaucoup. Je crois que l'on n'est pas dans une guerre des civilisations mais en revanche à l'intérieur de l'Islam il y a une guerre, que l'on pourrait peut être qualifier de guerre de civilisation intra-Islam. Je crois que c'est aussi aux responsables religieux musulmans de dire assez c'est assez, d'arrêter d'être récupéré par des fondamentalistes, des radicalisés qui ne connaissent pratiquement pas les sourates du Coran et qui tuent des femmes des enfants.

Propos recueillis par Lucie Lespinasse et Nicolas Fleury, lepetitjournal.com/sydney, lundi 28 novembre 2016.

Le Petit Journal Sydney
Publié le 28 novembre 2016, mis à jour le 28 novembre 2016

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