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DOSSIER ÉCOLOGIE 1ère partie : L'Australie vers la transition énergétique ?

Écrit par Lepetitjournal Sydney
Publié le 5 juin 2017, mis à jour le 5 juin 2017

À l'heure actuelle, le pays-continent est encore l'un des premiers pollueurs de la planète par habitant. Au classement mondial des émetteurs de CO2, le pays se classe 13e. Mais l'Australie souhaite mettre le cap sur le 100% énergies renouvelables dans le secteur de l'électricité, des transports et de l'industrie d'ici 2050. Le pays est-il vraiment sur la bonne voie pour parvenir à cet objectif ?

En Australie, les énergies fossiles comptent encore pour 82% de la consommation d'énergie primaire. Le charbon joue un rôle central dans son économie puisque le pays dispose de la plus grande réserve prouvée de charbon au monde, derrière les Etat-Unis, la Russie et la Chine. Ces dernières années, l'Australie a par ailleurs été l'un des deux principaux exportateur mondial de charbon, ce dernier étant la source d'énergie la plus polluante.

Les énergies renouvelables, l'hydroéléctricité et l'énergie éolienne, représentaient ensemble 17% de la production électrique australienne selon les dernières données du Clean Energy Council fin 2016. En 2009, le pays s'est fixé pour objectif de porter ce chiffre à 20% d'ici 2020. Avant le 20 juin 2016, cet objectif avait même été "allongé" à 30% d'ici 2020, avant d'être annoncé finalement à 23,5%, afin de paraître plus "réaliste". Au niveau national, cela signifie que l'Australie devra apporter quelques 6 GW de puissance verte entre 2016 et 2020. Soit l'équivalent de 18 fois le plus grand parc solaire du monde qui verra le jour en Australie dans les prochaines années.

Pour ce qui est de l'objectif ambitieux de 100% d'énergie renouvelable d'ici 2050 dans le secteur des transports, de l'électricité et de l'industrie, il n'a pas changé. Pour se faire, ce sont 800 milliards de dollars qui devraient être engagés afin de mettre en place les infrastructures nécessaires. Un investissement impressionnant, certes, mais qui permettra d'économiser jusqu'à 90 milliards de dollars d'ici 2050 en supprimant les besoins en carburants fossiles. Sur le long terme, cet investissement pourrait même faire économiser 740 milliards de dollars à l'Etat australien.

Malgré le frein porté à la consommation australienne de charbon lors de l'instauration d'une taxe carbone en juillet 2012, celle-ci avait été abrogée suite à l'accession du parti conservateur au pouvoir, Tony Abbott - fervent défenseur de l'électricité produite par énergies fossiles - ayant fait de la suppression de cette taxe un argument de vote électoral, au vu de l'impact de cette dernière sur la facture d'électricité des ménages et pour le secteur minier. Pour opérer un changement de direction par rapport à celle suivie pas son prédécesseur, Malcolm Turnbull a donné beaucoup d'espoirs aux défenseurs du climat en soutenant ardemment le retour de la taxe carbone. À son arrivée au pouvoir en tant que Premier ministre, il a vite changé d'avis, saluant la politique de Tony Abott, qui a pourtant réduit de 31% les investissements dans les énergies propres pendant ses deux années de mandat.

Désireux tout de même de faire de la protection de l'environnement une priorité, le Premier ministre Malcolm Turnbull avait affirmé en mars 2016 vouloir "relever le défi du changement climatique de manière intelligente et innovante". Il avait alors annoncé la création d'un fond d'un milliard de dollars australiens (672,3 millions d'euros) pour relever le défi de l'innovation dans les énergies propres. Ainsi, pendant dix ans, 100.000.000 dollars seront investis chaque année dans les technologies de pointe "les plus intelligentes", précisait Malcolm Turnbull.

Pour l'heure, si les projets de développement concernant les énergies renouvelables, photovoltaïques notamment, sont toujours plus nombreux, ceux concernant le charbon ne sont pas en reste. Depuis quelques années, le gouvernement australien est en discussion avec le conglomérat indien Adani pour que celui-ci creuse une mine de charbon gigantesque au niveau du bassin de Galilée, dans l'est du Queensland. Un projet controversé rejeté par les défenseurs de l'environnement, ayant lancé une pétition sur Internet*, et pour lequel l'entreprise indienne devrait pourtant donner son accord définitif dans les semaines à venir. Le projet, s'il devait voir le jour, serait à l'origine du rejet dans l'atmosphère de centaines de milliers de CO2 par an. Par ailleurs, l'ouverture de cette mine induirait également la construction d'un terminal portuaire titanesque au niveau de la Grande Barrière de corail, menaçant grandement cette dernière.

Pour le moment, la production d'électricité renouvelable de l'Australie est encore faible -même si cette dernière a largement augmenté entre 2013 et 2016, passant de 5 à 17% - et ne permet pas de répondre à une demande importante, ce qui maintient des prix extrêmement élevés, loin d'être concurrentiels avec l'électricité produite avec des énergies fossiles. Paradoxalement, l'Australie est le leader mondial en ce qui concerne les ménages possédant des panneaux solaires sur le toit de leur maison puisque 17% en sont dotés. Et pour cause : sur les 4,500 dollars à placer dans l'installation d'un système de production d'électricité verte produisant 1,5 kW par heure, le gouvernement australien propose un remboursement de plus de 1.000 dollars. Pour les chefs d'entreprise dont le chiffre d'affaire ne dépasse pas les 2 million de dollars à l'année, installer l'un de ces systèmes (panneaux solaires, petite éolienne, etc.) revient à leur apporter une réduction d'impôts de 6.500 dollars par an.

Concrètement, l'Australie, c'est un pas en avant, un pas en arrière... Le gouvernement créé des centrales photovoltaïques et autres parcs éoliens, ferme des centrales à charbon, mais cherche à en ouvrir d'autres dans un second temps pour continuer à approvisionner en électricité les ménages australiens. Au rythme auquel l'Australie développe les projets liés aux énergies renouvelables - 35 projets en cours de construction ou en voie d'acheminement rien qu'en 2017 - le pays-continent n'aura sûrement pas de mal à atteindre l'objectif qu'il s'est fixé concernant la part des énergies vertes dans sa production énergétique globale d'ici 2020. En revanche, si l'Etat continue à développer en parallèle de grands projets de développement miniers, on voit mal comment l'Australie parviendra à son objectif de 0% d'émission de gaz à effet de serre en 2050...

*www.acf.org.au/stop_adani

Crédit photos : Flickr.com

Adrien Lévêque, lepetitjournal.com/sydney, lundi 5 juin 2017

Le Petit Journal Sydney
Publié le 5 juin 2017, mis à jour le 5 juin 2017

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