

Cent quarante-sept chefs d'État et de gouvernement participeront à la conférence de Paris sur le climat. Cette COP21 permettra-elle de trouver un accord international, afin de maintenir le réchauffement climatique mondial en deçà de 2°C ? Gros plan sur les attentes, les engagements des pays et les initiatives à reproduire en faveur de l'environnement avec l'ensemble des rédactions du petitjournal.com
La participation de 147 chefs d'Etats fait de la COP21 l'une des plus importantes conférences diplomatiques jamais organisées en dehors des assemblées générales des Nations unies à New York. Elle est "d'une ampleur inédite dans l'histoire des conférences climat", d'après l'entourage de Laurent Fabius. Cette mobilisation sera-telle suffisante ? Il y a urgence à réussir : "La crise que nous connaissons aujourd'hui ne concerne que les migrants fuyant des zones de conflits. Ce n'est à rien à côté de celle qui nous attend lorsqu'arriveront les réfugiés climatiques, alerte Cécile Ramstein Membre de l'Institut du Développement Durable et des Relations Internationales, interrogée par notre édition de Dublin. On parle de 200 millions de personnes !"
Les inconnues
John Kerry, secrétaire d'Etat américain, a jeté un froid en déclarant que la conférence de Paris ne fournirait pas de traité juridiquement contraignant obligeant les pays à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Il a vite été recadré par François Hollande. L'Inde jouera gros lors de ces négociations. Déjà troisième émetteur de CO2 du monde, le pays a besoin de se développer et plaide pour un plan ambitieux de développement de l'énergie solaire. Le pays souhaite lancer une alliance internationale du solaire qui favoriserait le partage de technologies entre pays du sud.
La Pologne peut se vanter d'avoir réduit de 30% ses émissions par rapport à 1988, mais elle est aussi l'un des cinq plus gros pollueurs de l'UE, avec des centrales à charbon qui restent sa principale source d'énergie électrique. Quel positionnement aura-t-elle ? La possibilité d'un véto polonais existe.
Les signes encourageants
Le soutien de la Chine est désormais acquis pour la future COP 21 : Xi Jinping s'est engagé sur le principe d'"un accord juridiquement contraignant"
La Chine fait figure d'élément essentiel de la réussite de la conférence. C'est en effet le premier pollueur de la planète, mais aussi la première à montrer l'exemple en matière d'écologie. Cette affirmation pourrait paraître excessive et pourtant le pays est certainement l'un de ceux qui s'attaquent le plus efficacement à la problématique de la protection de l'environnement. (En savoir plus en lisant : ECOLOGIE - La Chine, dans toutes ses contradictions !)
155 pays ont remis une contribution, un engagement de réduction des gaz à effet de serre. L'Espagne fait partie de cette longue liste de pays ?qui représentent environ 89% des émissions mondiales- ayant déjà pris des engagements. En plus de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, l'UE s'est lancé un autre objectif : atteindre un quota de 20% d'énergies renouvelables dans sa consommation d'énergie totale en 2020. Sur ce point, l'Espagne est "en avance sur les prévisions" selon l'article de notre édition de Madrid. (lire aussi :En Espagne, une politique de transition énergétique à l'arrêt)
Enrique Peña Nieto, le président du Mexique a également annoncé qu'il soutiendrait la France afin de faire de la COP21 un véritable succès. Le Mexique a d'ailleurs envoyé un signal fort en étant le premier pays en développement à publier ses intentions de contribution à la lutte contre le réchauffement. A la 10e place des émetteurs mondiaux de CO2 et responsable de 1,5% des émissions de gaz à effet de serre, le pays s'est déclaré prêt à réduire ses émissions de 22% d'ici 2030. 
Le gouvernement australien a annoncé un objectif de réduction de 26% de ses émissions de carbone pour 2030. Un objectif « plutôt dans la moyenne » et « responsable du point de vue économique et environnemental », selon le Premier ministre conservateur Tony Abbott, mais insuffisant pour les défenseurs de l'environnement car l'Australie est retardataire sur ses objectifs de réduction d'émissions de carbone. L'Australie est le pays développé qui émet le plus de gaz à effet de serre par habitant. Le Leader de l'opposition travailliste australienne Bill Shorten a proposé de faire passer l'Australie des 15 prochaines années dans le camp des Etats où plus 50% de la production d'énergie se ferait via des énergies renouvelables. Cet objectif de 50% propulserait l'Australie dans la liste des économies les plus soucieuses de l'environnement, avec le Danemark qui a le même objectif pour 2020 et la Californie. Le pays resterait encore en dessous de la Nouvelle Zélande qui a annoncé un objectif de 90% d'énergies renouvelables d'ici à 2025 et l'Allemagne qui planifie 60% pour 2035. Affaire à suivre.
L'Allemagne est en passe de devenir le premier site d'Europe dans le domaine de l'éolien en haute mer. Dans le cadre de sa transition énergétique, l'Allemagne veut faire des énergies renouvelables sa principale source de production d'électricité ? elles doivent représenter 80% de la consommation à l'horizon 2050. Aujourd'hui elles représentent un quart de la production, le charbon restant pour le moment la première source d'électricité. (Lire aussi : COP 21- Engagements et actions de l'Allemagne)
La version finale de la contribution des Philippines a surpris. Son engagement de réduire les émissions de CO2 de 70% d'ici 2030 apparaît comme l'un des plus ambitieux, particulièrement au regard des engagements d'autres pays asiatiques comme la Thaïlande, qui annonce une réduction de 20%, ou l'Indonésie, qui prévoit de baisser ses émissions de 26% d'ici 2020.
La montée des eaux, une vraie préoccupation
L'augmentation du niveau de la mer peut entraîner des conséquences dramatiques, autant au niveau territorial qu'au niveau économique.
La Chine serait le premier pays concerné : une montée des eaux toucherait 145 millions de Chinois. Shanghai serait particulièrement menacée, les zones les plus vulnérables étant les zones urbaines et les deltas (en savoir plus ici :SHANGHAI SOUS LES EAUX - Un rapport sur le réchauffement climatique inquiète la Chine). Hong-Kong fait également partie des grandes villes en danger.
En Espagne, une étude dresse un constat inquiétant du devenir du littoral espagnol. Selon les chiffres dévoilés, le niveau de la mer le long des côtes espagnoles augmenterait d'ici 2100, dans le pire des cas, entre 60 et 72 centimètres par rapport au niveau moyen de la mer enregistré de 1986 et 2005.
Le Vietnam aussi sera affecté par les changements climatiques. De par sa situation géographique et ses 3200km de côtes, le Vietnam subit des dérèglements qui risquent en outre de retarder la croissance économique du pays. La montée des eaux, notamment dans le Delta du Mékong, menace les populations et les terres agricoles.
Trouver des solutions
Passer à l'économie circulaire ? Pour Antoine Frérot, PDG de Veolia, "Il faut sortir du schéma linéaire : produire, consommer, jeter, et se tourner vers un schéma où l'on transforme les déchets, de façon à ce qu'ils deviennent des ressources », dit-il. « Par exemple, le recyclage d'une petite bouteille de plastique émet 70% de moins de CO2 (gaz carbonique) qu'une production de la même bouteille à partir de matière vierge prélevée dans la Nature."
Pour Christian De Perthuis, "La COP 21 sera un succès si elle contribue à la mise en place d'un prix du carbone à l'échelle mondiale". Le fondateur de la chaire Economie du climat estime que ?La transition vers une économie bas-carbone a un coût. Ce coût peut être fortement réduit si on met en place un prix international du carbone qui va réorienter les investissements existants?.
Du courage !
Jean-Marc Jancovici est ingénieur et lanceur d'alerte sur les questions énergétiques et climatiques auxquelles il a consacré de nombreux ouvrages. Interrogé par notre edition de Hong Kong, il explique : "Il n'y a pas de solution sympathique au problème du climat. Si demain, nous n'avons plus d'énergie fossile, nous sommes privés de monnaie. Avec un PIB qui serait instantanément divisé de 20 à 50. Sans énergie, aucun approvisionnement par voie maritime, aérienne ou terrestre n'est possible. Des villes dépendantes de l'importation comme Hong Kong mourraient de faim. Pour relever les défis climatiques, il faut intégrer cette donnée dans toutes les décisions que l'on prend?. Le réquisitoire est sans appel.
François Gemenne est un spécialiste des migrations et des politiques environnementales, Directeur exécutif du programme de recherche interdisciplinaire « Politiques de la Terre » à Sciences Po et chercheur qualifié du CNRS : "Il ne faut pas s'y tromper, a-t-il expliqué à notre édition de Dubaï. La lutte contre le changement climatique impliquera des coûts et des sacrifices, tout le monde n'en sortira pas gagnant. Et si on ne s'y engage pas maintenant, alors nous sommes partis pour un réchauffement de l'ordre de 4°C en 2100, qui impliquerait des conséquences catastrophiques. La COP21 sera donc avant tout un test de courage politique".
MPP (www.lepetitjournal.com) vendredi 27 novembre 2015

