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ARIÉ ELMALEH - "J’ai été adopté par la France, je m’y sens bien"

Écrit par Lepetitjournal.com International
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 5 janvier 2018


À 35 ans, Arié Elmaleh s'installe doucement mais sûrement au c?ur de la comédie à la française. Après Plan de table il y a trois semaines, il est à l'affiche du film d'Arnaud Lemort Dépression et des potes (en salles aujourd'hui), une comédie de? potes à la dérive. Rencontre décontractée dans un restaurant parisien

Lepetitjournal.com - Quelle est la définition d'un bon pote selon vous ?
Arié Elmaleh - Être là quand ça ne va pas. Dans le film, notre meilleur pote Franck (Fred Testot) nous annonce qu'il ne va pas bien, qu'il fait une dépression. Au début, on ne sait pas trop comment le prendre. C'est délicat de savoir quoi faire quand un ami vous dit qu'il ne va pas bien. Et, paradoxalement, c'est au travers de sa déprime que l'on va se rendre compte qu'on ne va pas bien nous non plus ! Du coup, on va se débattre avec nous-mêmes, avec nos vies pour essayer de remonter la pente. Tous ensemble.

La dépression, vous connaissez ?
Non, pas vraiment. J'ai bien eu quelques mauvais moment, liés au boulot notamment, des questionnements. Pour penser à autre chose, je fais du sport, du yoga. Il y a plusieurs très bons remèdes à une petite dépression : un bon gâteau dans une pâtisserie, un bon resto, un bon vin, les potes, pleurer un bon coup, aller au cinéma.

Êtes-vous d'accord avec ceci : c'est souvent lorsque l'on perd une chose ou une personne importante (travail, petite amie,?) que l'on rebondit vraiment ?

Je crois à cette équation là. Dans ces moments-là, il y a finalement une opportunité pour se refaire, repartir du bon pied. C'est dur de rester tout le temps au top et de faire fi de tout le reste. On ne repart jamais vraiment de zéro, mais il faut savoir oublier pour avancer. C'est peut-être mon côté acteur mais j'ai tendance à vouloir me réinventer en permanence. Je ne sais pas si j'y arrive, mais l'intention de changer de vie est là, même si j'habite toujours au même endroit, et que j'ai toujours la même femme et les mêmes enfants !

Ary Abittan-Jonathan Lambert-Arie? Elmaleh ou un trio de choc au secours de Fred Testot

Votre personnage, Franck, passe par la musique de publicité avant de toucher à la "vraie" musique. Un peu comme vous avec le cinéma en réalité (Arié Elmaleh a été rendu célèbre grâce, notamment, à des pubs pour un réseau mobile, ndlr)?
C'est un hasard du scénario ce côté pub ! Franck rêve en effet d'être musicien, il a le potentiel pour, mais il n'y arrive pas. Il gagne sa vie en faisant des musiques de pub. Ce n'est pas déshonorant comme métier, mais cela ne l'épanouit pas. Le vrai point commun est que je suis moi-même musicien. J'aime bien ça. Peut-être ferais-je un album un jour, qui sait ? Je pense à un spectacle musical, je fais des compositions pour m'amuser. Mais, comme mon personnage, je n'ai pas encore passé le cap de me produire sur scène.

La trouille peut-être ?
Une inhibition plutôt. Je ne chante pas trop mal, mais je ne suis pas chanteur. C'est une histoire de légitimité. J'ai mis quinze ans avant de me sentir légitime en tant qu'acteur, je pense que ça prendrait également un bon bout de temps dans la chanson.


"J'ai découvert le cinéma avec les films de Fernandel et Claude Sautet"


Surtout que la passerelle acteur-chanteur est délicate en France?
Si on est acteur et que l'on veut devenir chanteur, c'est que l'on est un mauvais acteur ! Ou l'inverse ! Les Français catégorisent, sont très communautaires. Il y a les gens qui font de la télé, ceux qui font du cinéma, ceux qui chantent. Mais, heureusement, cela tend à changer. Certaines personnes arrivent à tout faire sans avoir peur d'être exclues par ceux qui détiennent, soi-disant, la vérité.

L'actrice Mélanie Laurent s'est tout de même faite beaucoup critiquer pour son album?
Qui est bon d'ailleurs. Si elle n'était pas actrice, elle aurait sûrement eu des critiques plus favorables. C'est comme si c'était indécent de faire plusieurs choses en même temps. Notamment la musique. Il doit y avoir un truc dans l'inconscient collectif qui est rabaissant dans le fait de chanter et jouer.

Un petit se?jour en prison, rien de tel pour renforcer l'amitie?


Vos publicités à la télévision vous ont-elles desservi et casé dans une certaine catégorie ?

Non. Cela m'a ouvert plus de portes que cela m'en a fermées. J'avais très peur avant de les faire, justement à cause de ça, ce côté être enfermé dans l'acteur de pub. Finalement non. J'ai fait mon métier au service de petites histoires sans dialogue pour des portables. Pendant deux ans et demi. J'ai eu la chance de tomber sur un metteur en scène génial, Rémy Belvaux. Ses pubs avaient du cachet et j'ai pu y exploiter un peu de mon talent. J'ai eu pas mal de propositions grâce à cette pub. Et je constate qu'aujourd'hui, on peut faire de la pub sans que ce soit déshonorant. Et puis la pub, c'est plutôt chouette. On gagne bien sa vie, on peut s'acheter des choses dont on a toujours rêvées, on se fait de bons restos?

D'où vous est venue l'envie de devenir acteur ? De votre enfance au Maroc ?
C'est une nature. Je me sens artiste, j'aime la musique, la comédie. Quand j'étais gamin, j'habitais à Casablanca. J'écoutais énormément de musique, et après j'ai découvert le cinéma avec les films de Fernandel. J'ai bien tripé en regardant en boucle Ignace, Le Schpountz, La cuisine au beurre? J'aimais également les films de Claude Sautet. Ils représentaient une certaine image de la France et de Paris. J'avais l'impression d'être dans l'un de ses films lorsque j'ai découvert Paris à 16 ans, j'étais rue de Rivoli, comme ça? À cette époque, je voulais faire du théâtre, pas du cinéma, qui avait un côté inaccessible. Je me destinais à faire une carrière de théâtre en espérant jouer des grands classiques, de grands rôles. Et puis le cinéma est arrivé, je jouais le rôle d'un travesti algérien (dans Change moi ma vie, sorti en 2001, ndlr). Et là je me suis rendu compte que c'était possible.

"L'une des meilleures façons de découvrir la France est de manger"

Que connaissiez de la France depuis votre Maroc natal ?
Pas grand chose en fait. Je l'ai découverte quand je suis arrivé à 18 ans, après avoir passé mon bac au Maroc. Selon moi, l'une des meilleures façons de découvrir la France est de manger ! Partout où l'on va, on bouffe ! Et la France m'a fait découvrir et aimer le vin. Il y a un lien spécial entre ce pays, le vin et moi. Lors de mes premiers mois à Paris, j'ai pris plaisir à boire des petits verres dans les bars : Bourgueil, Côtes du Rhône, Bordeaux, puis Bourgogne récemment. Je ne suis pas un poivrot, mais j'aime bien ça !

Vous retournez souvent à Casablanca ?

Régulièrement, oui. J'ai encore un peu de famille là-bas, et des potes. C'est toujours un plaisir. Et en même temps, je pense vraiment que j'ai posé mes valises à Paris. J'ai été adopté ici, je m'y sens bien. Je ne me vois pas quitter Paris pour aller vivre au Maroc. Travailler là-bas, oui. J'ai d'ailleurs un projet de film avec un réalisateur marocain. Mais si je devais quitter la France, je me verrais bien tenter une aventure d'une année ou deux à New York ou Tel Aviv. Artistiquement il s'y passe beaucoup de choses.

Un quatuor de come?diens fac?on Beatles


Durant votre carrière, j'imagine que le nom "Elmaleh", porté par votre célèbre frère Gad, a suscité beaucoup d'interrogations vous concernant?

Très sincèrement, c'était vraiment chiant quand on me comparait sans arrêt à lui. Les gens vous mettent toujours dans une certaine rivalité que vous n'avez pas demandée. Ils s'en foutent de savoir qui vous êtes. Mais parfois, cela m'a servi. La curiosité de certains était éveillée. J'ai tout de même dû travailler beaucoup pour parvenir à faire mes preuves.

Plus que certains selon vous ?

Peut-être car il y a un climat de suspicion : "Ah, tu veux être acteur, comme ton frère donc ?". Bah non, je veux tracer ma route. Même aujourd'hui c'est encore un peu chiant, mais bon?

Vous verra-t-on un jour à l'affiche d'un même film avec Gad ?

Franchement, j'adorerais le faire. Lui aussi, mais personne ne nous a proposé un projet assez enthousiasmant. Du coup, nous avons décidé d'en écrire un. Notre s?ur, Judith, a pondu une pièce que nous allons bientôt jouer, au théâtre. Je ne peux pas encore en dire plus !

Jérémy Patrelle (www.lepetitjournal.com) mercredi 2 mai 2012 (best of de l'été)



LE FILM

Dépression et des potes
Un film de Arnaud Lemort (1h35) avec Fred Testot, Arié Elmaleh, Jonathan Lambert, Ary Abittan?
Responsable du doublage de films d'animation, et en couple avec une bombe brésilienne, Franck (Fred Testot) a tout pour être heureux. Il passe pourtant sa semaine de vacances à l'Île Maurice à déprimer pendant que sa belle nage en eaux claires. Son problème ? La dépression. Sa fiancée le quittant, il ne lui reste plus que ses potes, qu'il n'a pas vus depuis six mois, pour lui remonter le moral. Malheureusement, ces derniers sont aussi mal dans leur peau que lui? Sur le mode comédie de potes à la française, Dépression et des potes fait naviguer le spectateur au c?ur d'une aventure simple mais pas trop simplette. En prison, dans les bars, en voiture ou en boîtes de nuit, chacun tente de donner un petit coup de pied aux fesses de son camarade pour retrouver les sommets. Le quatuor Testot-Elmaleh-Lambert-Abittan a la bonhomie communicatrice. Un film sympathique, sans prise de tête au programme.



logofbinter
Publié le 8 août 2012, mis à jour le 5 janvier 2018
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