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L'ILE A VACHE - Henri Morgan et le trésor

Écrit par Lepetitjournal Haiti
Publié le 16 août 2016, mis à jour le 17 août 2016

 

 Dans un article soumis à AlterPresse le 21 avril 2014, Marie-Thérèse Labossière Thomas sonnait la sonnette d'alarme en dénonçant le gouvernement haïtien de l'époque de  faire des pirates le thème central de la promotion culturelle et touristique de l'Ile-à-Vache.

« Ces forbans sans foi ni loi du temps passé semblent aussi avoir inspiré la course actuelle à cette « île au trésor », en prélude à d'autres aventures. Le plan de développement, proposé par le ministère du Tourisme, a tout aussi négligé la culture locale, de même que l'héritage amérindien soigneusement documenté des nombreux sites archéologiques répertoriés à l'Ile-à-Vache » écrivait-elle.

Au cours du dix-septième siècle les flibustiers aidés des boucaniers  terrorisaient les navires naviguant dans les Caraïbes. Ils étaient de toutes nationalités. Certains venaient de France, de Hollande, d'Angleterre et ils étaient pour la plupart d'anciens brigands. Le mot « boucanier » vient du terme "boucan" qui était une technique, utilisée par les Indiens d'Haïti, qui consistait à  sécher de la viande pour la conserver, en utilisant les flammes.

Henri Morgan n'aimait pas la vie paysanne qu'il menait en Europe. Rêvant d'autres choses il se débrouilla pour joindre les Caraïbes à un très jeune âge et put se faire embaucher sur un bateau pirate. Comme mousse et ensuite comme marin, il passa de nombreuses années d'apprentissage dans la région de la Jamaïque, lors colonie anglaise.

Les années passèrent et notre marin en herbe devint pirate. Il était sans scrupules et encore l'un des plus grands corsaire de la mer des Caraïbes. Dans le domaine de la piraterie, il se fit rapidement une solide réputation. Sa brutalité autant que son intelligence lui firent acquérir le respect nécessaire pour mener à bien de telles entreprises.

Sous sa conduite, les anglais terrorisèrent non seulement les galions espagnols, mais aussi toutes les villes de la région. Il fut connu comme celui qui dirigea les attaques de Camagüey à Cuba, Maracaibo, Portobelo en Amérique du Sud. Il  assiégea la ville de Panama où il laissa le souvenir d'une brute et d'un individu  privé de moral.

D'après plusieurs histoires racontées par d'anciens matelots, certains réussirent à mettre en place les pièces d'un puzzle et purent reconstituer la saga de Morgan près des rives de la colonie de Saint-Domingue.  Après son attaque de Portobello, Morgan  navigua vers la côte de l'Ile-a-Vache, ile faisant partie d'Haïti. Apparemment, il y attendait un navire français qui avait l'habitude de faire des transactions avec les Britanniques.

Ceux-la lui demandèrent de donner une leçon aux français parce qu'ils n'étaient pas satisfaits du résultat d'un ancien accord. Lorsque le navire arriva, Morgan invita le capitaine et son équipage à une fête à bord de son navire "L'Oxford". Quand ils ne s'y attendaient pas il les captura et les emprisonna sous le pont.

Après cette traîtreuse victoire, comme de coutume, Morgan et ses hommes  commencèrent  à célébrer. Beaucoup de tafia fut ingurgité au point que  les hommes a un point d'ivresse tel qu'ils ne se rendirent pas compte qu'un incendie s'était déclaré à bord. Un incendie dû aux tirs nourris pour célébrer leur victoire. Il suffisait bien sur que d'une étincelle pour enflammer le dépôt de munitions, bourré de poudre à canon.  Le navire explosa et c'est ainsi que le Oxford coula. Plus de trois cents morts, les prisonniers français ainsi que les pirates anglais. Seuls survivants de cette calamite : Morgan lui-même et certains de ses officiers. Cela se passait en 1669.

 

Muni d'un autre navire, quelque temps après, l'audacieux pirate retourna sur le site du drame ou se trouvait ensevelie sous les flots l'énorme fortune qu'il avait prise  de la Colombie. Ce trésor était telle qu'il ne pouvait pas se permettre de le perdre, mais la chance n'était pas de son côté, son navire coula de nouveau.

En 1672, quelques années après cette catastrophe, l'Espagne et l'Angleterre signèrent un traité de paix, mais Morgan, continuant ses attaques sur les galions espagnols, fut arrêté et envoyé en prison à Londres. Il n'y restera pourtant pas longtemps, il put acheter sa libération grâce à la grande fortune qu'il avait amassée au cours de ces nombreuses années de piraterie. Le roi Charles second d'Angleterre était si satisfait de lui qu'il le nomma Lieutenant-gouverneur de la colonie de la Jamaïque et des 1674, Morgan combattait avec acharnement la piraterie, ses anciens collègues. Il fit périr plusieurs par la pendaison, ou en les laissant s'éteindre à petit feu en prison. Bien sur seuls ceux qui refusaient  de partager leurs butins avec lui.

Plus de 300 ans plus tard, en 2014, l'Île-à-vache, qui compte 128 kilomètres carrés, aurait été promise à des investisseurs du Qatar, de la République Dominicaine, de la Chine, de la région des Caraïbes, du Royaume-Uni et des États-Unis d'Amérique. De la localité de Kay Kòk à celle de Bale Raz, il est fort probable qu'il y ait entre deux à trois mille personnes victimes d'expropriation dans le cadre du projet.

 

Toutes les routes principales de l'Ile à Vache seraient détruites dans le cadre de ce programme d'aménagement de la commune. 

Lancé le 20 août 2013, le projet prévoyait la construction d'un aéroport international avec une piste de 2.6 kilomètres ; la construction de l'axe routier qui y mène ; le dragage du port, l'électrification et l'éclairage de toute la zone environnante ; la construction de plusieurs hôtels-ressorts (1,000 chambres), de 2,500 villas ; d'un centre communautaire ; d'une radio communautaire ; d'un centre d'urgence, ainsi que la mise en place d'infrastructures agricoles. Le coût du projet s'élèvait à plus de 230 millions de dollars américains.

 Dans ce même arrêté, plus particulièrement dans l'article 2, la présidence proclamait « possessions de l'État » toutes les propriétés et terrains de ces zones, ayant fait l'objet de bail ou de transactions entre particuliers, et ce, rétroactivement, soit cinq (5) années auparavant.

Cela signifiait que l'État haïtien annulait, de façon unilatérale, tout droit de propriété légale, qui découlerait soit de la vente, soit de l'affermage, ou de legs entre particuliers. Protestant contre cet état de fait Monsieur Jean Matulnès LAMY fut incarcéré lors de manifestations populaires. 

Les échos de cette affaire parvinrent jusqu'en France et des organismes français des droits de l'homme furent sensibilisés et s'empressèrent de faire parvenir leurs appréhensions à l'ambassadeur d'Haïti à Paris, surtout sur le cas de Monsieur LAMY incarcéré injustement.

Le secrétaire général de France Amérique Latine rappelait  qu'un projet sur l'Ile-à-Vache qui semblait être très important pour le gouvernement haïtien, ne l'était pas pour la population. Il faudrait disait-il arriver à une entente et ceci ne pouvait aboutir qu'en commençant avec la libération du prisonnier.

                        

                   Jean Matulnès LAMY

En janvier 2013, la ministre du Tourisme signait un accord de partenariat avec la compagnie canadienne Air Transat et dans son affiche publicitaire intitulée « Haïti : le secret bien gardé des Caraïbes », cette dernière déclare : « L'île à Vache, en plus de sa beauté, regorge de vestiges archéologiques. De nombreux bateaux ont aussi sombré sur les récifs du nord-est de l'île » rapportait l'agence Alterpresse.

Le ministère du Tourisme offrait, sous la rubrique « Récréatif et reposant » de son Plan directeur de développement touristique ? avec la plongée, la pêche, les sports nautiques, le golf écologique ? la « découverte potentielle de sites archéologiques très anciens (l'île en compterait une grande quantité d'âges très éloignés) et de l'histoire précolombienne à travers les artefacts qui seront exposés dans le musée (dans le respect de la faisabilité et des normes internationales en la matière) » .

Cette invitation à la « découverte potentielle » pourrait facilement s'interpréter en une autorisation au pillage des ressources archéologiques de l'île concluait l'article en soulignant comment il est aussi stupéfiant de constater que, dans le Plan directeur de développement touristique ou les appels d'offre, il n'a été fait mention ni d'une évaluation du patrimoine archéologique de l'île, ni de la participation de des ministères de la Culture ou de l'Éducation, de l'Université d'État ou de l'Institut de sauvegarde du patrimoine national (ISPAN), avant que commencent les travaux de construction et de forage. De plus, parmi les « quatre grandes catégories de voyageurs hautement éduqués et axés vers le luxe », qu'avait ciblés le ministère du Tourisme, les « Explorateurs », comprenant plongeurs, archéologues et historiens, viennent en première place.

Pourquoi donc mettre l'accent sur la plongée, l'archéologie et l'histoire. Etait-ce une couverture pour aller à la recherche du trésor du pirate Morgan ?

Faut-il développer l'Ile à Vache ? Oui bien sûr, mais avec la population et dans l'intérêt d'Haïti.

Sources combinées

avec alterpresse.org

16 août 2016

Lepetitjournal.com/haiti

 

lepetitjournal.com haiti
Publié le 16 août 2016, mis à jour le 17 août 2016

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