

En Allemagne, la question de la parité fait débat depuis plusieurs années. A l'occasion de la journée internationale de la femme, rapide point sur la situation du deuxième sexe des deux côtés du Rhin.
" Qui détermine ce qui est écrit dans les journaux ? Et ce qui est diffusé à la radio et à la télévision? Presque toujours : les hommes. Nous, femmes journalistes, demandons l'introduction de quotas ! " C'est par ces quelques phrases que plusieurs centaines de journalistes allemandes ont demandé à ce que 30% des postes à responsabilités dans les médias soit réservé aux femmes? il y a un an? sans succès. Seuls 2% des postes de rédacteurs en chef des 360 quotidiens ou hebdomadaires allemands sont aujourd'hui occupés par des femmes et sur les douze responsables de la télévision publique, on ne dénombre que trois Frauen. Même si les chiffres ne sont pas glorieux, la télévision publique française a déjà été dirigée par une journaliste et l'un des principaux quotidiens, Le Monde, est en train de choisir à sa tête une Nathalie. Même chose dans d'autres secteurs. Si en 2010 Deutsche Telekom avait été la première entreprise du Dax à mettre en place un quota de 30% de femmes, elle a peu été suivie et l'introduction générale de ce type de système fait toujours débat au sein du gouvernement Merkel.
Dans les derniers du classement concernant les écarts salariaux
Mise à part la représentation parlementaire (à 32,9% féminine en Allemagne contre 26,6% en France), toutes les statistiques de genre sont défavorable à Berlin. En décembre, une étude de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) l'a une nouvelle fois placé dans les tout derniers rangs pour ce qui concerne l'égalité entre les sexes, et la France dans les premiers. Ainsi pour l'écart de salaire hommes-femmes, l'Allemagne se place 32e sur les 34 pays de l'OCDE. Les Allemandes sont moins nombreuses à travailler (malgré une augmentation continue, la part des femmes actives reste de 45,8% contre 51,5% en France en 2011) et surtout, elles sont beaucoup moins représentées dans les échelons supérieurs (en 2011, il n'y avait que 25,1% de femmes dans la catégorie des gérants et entrepreneurs, contre 37% dans l'Hexagone). Cela tient beaucoup au travail à temps partiel : 62 % des femmes allemandes occupent ce type d'emplois (contre 26 % des Françaises). Pourquoi ces chiffres ?
Une des explications tient au fait que les Allemandes en couple n'en ont pas besoin, ou en tout cas moins besoin, de travailler que dans d'autres pays de l'Union, car un salaire suffit à faire vivre un foyer. Mais surtout, les structures pour les enfants sont inadaptées au travail des femmes : l'école finit tôt encore en très grande majorité et les moyens d'accueil des plus jeunes sont inadaptés et insuffisants. Aussi les emplois à mi-temps réellement intéressants sont peu nombreux et souvent pas à la hauteur de la formation des femmes.
D'autre part, les mentalités et la tradition jouent un rôle très important. "La mauvaise image des mères ayant un travail en Allemagne est l'une des causes de la faible natalité, les femmes préférant ne pas avoir d'enfant plus que d'être vues comme indignes", explique l'Institut fédéral de recherche démographique (BIB), dans une étude publiée en décembre. Cause ou conséquence : l'un taux de fécondité le plus faible d'Europe, moins de 1,4 enfant par femme.
Effets démographiques, économiques et sociaux
" En Allemagne, on trouve plus de femmes sans enfants qu'en France, note Angela Luci, chercheuse à la fondation Friedrich Ebert à Paris dans une interview à RFI en juin. Un quart voire même un tiers des femmes allemandes n'ont pas d'enfants. Parmi les académiciennes, cette statistique s'élève même à 40%. En France, au contraire, seulement une femme sur dix n'a pas d'enfants et il y a nettement plus de familles à trois enfants (?) Ceci implique qu'en Allemagne, la conciliation entre vie familiale et travail est plus difficile qu'en France. L'activité professionnelle réduite des femmes et les faibles taux de fécondité ont pourtant des conséquences négatives à mi et long termes pour l'équilibre économique et social. "
Mais les dirigeants allemands ne semblent pas avoir pour priorité de sortir de ce cercle vicieux. Outre leurs atermoiements sur les quotas, difficile de suivre leur politique familiale. Ainsi si, à partir d'août, tout parent d'enfants âgés de moins de trois ans pourra prétendre à une place en crèche ou chez une nourrice agréée, à cette même date sera également mise en place une allocation de 100 à 150 euros mensuels pour les familles gardant leurs bambins de moins de trois ans à domicile, surnommée "prime au fourneau" par ses détracteurs.
Anne Le Troquer (www.lepetitjournal.com/francfort) vendredi 8 mars 2013
A l'occasion de la journée de la femme, à lire également dans les autres éditions allemandes du petitjournal.com :
-les grandes figues du féminisme allemand et portrait d'Alice Schwarzer, symbole du mouvement féministe en Allemagne à Cologne
-portrait d'Ursula von der Leyen à Munich








