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DOSSIER HIP-HOP - Quand les artistes sont à la rue – Partie 1

Écrit par Lepetitjournal Francfort
Publié le 18 janvier 2016, mis à jour le 11 février 2016

Une danse, un art, un sport, une sonorité, un rythme, une philosophie, une conscience, un langage, un moyen d'expression, une culture : le hip-hop est tout cela à la fois et il incarne à lui seul des valeurs à la fois morales et éthiques. Mouvement contestataire né dans les ghettos noirs de New-York dans les années 70, il s'est développé et exporté aux quatre coins du globe en à peine un demi-siècle, y compris en France et en Allemagne.

(Crédit photo Pixabay)

Le hip-hop. Un terme parfois injustement caricaturé et associé à une jeunesse perdue, plongée dans la délinquance, la violence et la pauvreté. Le hip-hop : deux mots derrière lesquels se cache en réalité un mouvement culturel riche se déclinant en plusieurs catégories, toutes porteuses d'un même message que l'on retrouve dans son étymologie : l'une des traductions de ?Hip? est ?intelligence?, à comprendre dans le sens de l' ?ingéniosité?, ?Hop? représente l'onomatopée d'un bond, venant de ?to hop? qui est un équivalent anglais de ?danser?. C'est un appel à évoluer et progresser socialement par la créativité et l'intelligence et non par la violence et la bêtise. Deux termes qui ne peuvent donc pas aller l'un sans l'autre. Ils sont indissociables, ils forment une unité. Une unité qui est le fondement de cette culture et le message porté depuis sa création par des figures emblématiques du mouvement ainsi que par l'ensemble de la communauté à travers les temps. 

Un mouvement né du ras-le-bol de la communauté afro-américaine

New York, 1960, dans les quartiers d'Harlem, Brooklyn et du Bronx, les conditions de vie des Noirs se détériorent. La communauté est marginalisée et repliée sur elle-même dans des ghettos abandonnés par l'Etat et où les gangs font la loi. La violence y est quotidienne. Les mouvements identitaires sont violemment maîtrisés, parfois même dans le sang et leurs meneurs sont tués (Martin Luther King, Malcolm X). Criminalité, insécurité, drogue, prostitution,... les jeunes, qui n'ont pour la plupart reçu aucune éducation, sont sans avenir ni espoir. C'est dans ce contexte de tensions raciales, socio-économiques et politiques que se crée un mouvement au début des années 70 qui tend vers un état d'esprit positif basé sur la créativité : la culture hip-hop est née, incarnée par les figures de Grand Master Flash, Afrikaa Bambaataa et la Zulunation dont le slogan est ?Peace-Love-Unity, Get busy ! Moove ! Having fun !?. C'est un exutoire, une alternative pacifiste à la violence et la criminalité qui cristallise le sentiment d'amertume et les revendications civiques d'une population qui souffre dans l'indifférence générale. Leurs mots, leur corps, leur talent, leur spontanéité et leur créativité deviennent leurs armes. La rue se soulève et les trottoirs deviennent des scènes sur lesquelles un message politique est véhiculé et diffusé au-delà des ghettos. 

(Crédit photo Patrice Guyon)

Le hip-hop, c'est de la danse

Le hip-hop est une grande famille qui englobe plusieurs disciplines. Pour simplifier, ces différentes catégories sont comme les branches d'un arbre dont leur tronc commun est le hip-hop. 

Pour poursuivre la comparaison, la danse est l'une des branches de l'arbre. Et sur cette branche poussent encore d'autres branches. C'est-à-dire que le hip-hop s'exprime à travers de nombreuses formes de danses urbaines : la house, le newstyle, le popping, le krump, le break dance et bien d'autres. Certaines d'entre elles se dansent presque exclusivement debout, d'autres, au sol et d'autres sont une alliance des deux styles.

Un principe de base enseigné par Afrika Bambaataa, l'un des pères du hip-hop, s'applique à toutes : ?canaliser la colère et la frustration et transformer cette énergie négative en une énergie positive?. Danser nécessite aussi un certain état d'esprit et le respect d'un ?code de conduite? lors des ?battles? (batailles en anglais) de danse où les danseurs s'affrontent seul ou en équipe (?crew?) : le fair-play, le partage et l'authenticité. 

(Crédit photo Ouasmine Hamdane)

Le hip-hop, c'est de la musique

Comme pour la danse, la musique est l'une des branches de l'arbre sur laquelle se déploient encore d'autres branches. Le funk, le rap, le gangsta rap, le DJing, le beatboxing, le G-funk sont autant de catégories qui forment la grande famille musicale du hip-hop.

Le mouvement lancera même la musique électro grâce une fois de plus à l'ingéniosité d'Afrikaa Bambaataa, qui mélangea funk, rap et rock blanc.  


Le hip-hop, c'est du graffiti

Longtemps considérés comme une nuisance publique et même interdits par la loi, les graffitis étaient à la base de simples signatures (appelées aussi ?tags?) sur les murs ou transports des villes pour faire connaître son nom. Le principe, victime de son succès, a provoqué une surabondance de signatures sur la moindre surface exploitable. Il a donc fallu se différencier du reste en stylisant son tag : une autre branche de l'arbre a poussé. Des compétitions s'organisent de façon informelle pour essayer d'obtenir le titre de meilleur graffeur de la ville. Cette tradition a su perdurer jusqu'à aujourd'hui mais dans un cadre plus légal, si bien que le graffiti est maintenant classé dans la catégorie ?street art? (ou ?art urbain?) au même titre que la mosaïque par exemple. Il se peint sur tout le mobilier urbain et désormais il se peint aussi sur toiles. Des expositions sont d'ailleurs entièrement consacrées aux graffitis. Certaines oeuvres se vendent même à prix d'or sur le marché de l'art.

(Crédit photo Nouri El Mazoughi)

Un mouvement en constante évolution  

On pourrait penser qu'avec l'évolution de la société, le hip-hop perdrait de son intérêt. Or, il n'en est rien. Ce n'est pas parce que le contexte historique et social n'est plus le même aujourd'hui que le mouvement s'essouffle, bien au contraire. En effet, il n'y a plus de revendication civique ou politique à l'heure actuelle mais le mouvement a su rester dans l'air du temps en évoluant. Un élément de plus qui fait sa particularité : il se réinvente, s'enrichit et se diversifie constamment grâce à l'apparition de nouveaux styles artistiques. D'autres danses, à la base extérieures au hip-hop, s'y incorporent comme le reageton, le dancehall, le contemporain et même le classique. De nouvelles compétitions émergent comme les épreuves de salsa-break. De nouveaux genres musicaux naissent comme le rap alternatif. Les branches de l'arbre bourgeonnent grâce à l'imagination et la créativité des personnes qui l'entretiennent.

Qu'en est-il de la France et de l'Allemagne ?

Le hip-hop arrive dans les deux pays dans les années 80 mais son évolution a été très différente. En 1984, l'Hexagone est le premier pays au monde à programmer une émission télévisée régulière entièrement consacrée au hip-hop (?H.I.P H.O.P?) qui va fortement contribuer à rendre la culture si populaire auprès des Français. Le hip-hop allemand est extrêmement dynamique mais reste pourtant peu connu et s'exporte très mal à l'étranger contrairement à la scène hip-hop française. Aujourd'hui, de grandes compétitions et évènements mondialement connus ont lieu tous les ans dans les deux pays. Les plus célèbres sont le ?Juste debout? à Paris et le ?Battle of the year? à Brunswick en Allemagne.

Grâce à ses investigations, lepetitjournal.com/francfort a pu constater que cette différence de concept entre la France et l'Allemagne se ressentait fortement. Le hip-hop français est beaucoup plus subventionné, beaucoup plus actif et beaucoup plus médiatisé d'où sa plus grande portée à l'international. Le message de base du mouvement s'éclipse parfois au profit d'enjeux commerciaux très importants. La compétition y est d'ailleurs bien plus féroce lors des fameux ?battles? de danse. En Allemagne, le hip-hop est plus ?underground?, originel et toutes les catégories sociales et tranches d'âge se confondent contrairement à la France où le hip-hop est plus souvent représenté par une population jeune issue de la classe moyenne. 

Sounkoura-Jeanne Dembélé (www.lepetitjournal.com/francfort), mardi 19 janvier 2016

La suite du dossier hip-hop (partie 2 et 3) :

DOSSIER HIP-HOP - Paroles de danseurs : comment la nouvelle génération vit-elle le hip-hop ? ? Partie 2 

DOSSIER HIP HOP - Où aller faire du hip-hop dans la région ? Partie 3

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Publié le 18 janvier 2016, mis à jour le 11 février 2016

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