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RETOUR EN FRANCE – Faut-il avoir peur ?

Écrit par Lepetitjournal.com International
Publié le 26 juin 2011, mis à jour le 26 septembre 2013



Baguette croustillante le matin, numéro 270 dans la file d'attente de la sécu, paquet de cigarettes à 6 euros, musée et ciné à gogo ! Bienvenue en France ! Rentrer dans son propre pays peut s'apparenter pour certains à une nouvelle expatriation. Pour d'autres, il s'agit juste d'un simple retour à la normale

 


Au retour d'expatriation, les premiers mois ne sont pas toujours simples à gérer. Pas facile de passer d'une situation professionnelle à responsabilité et de se retrouver noyé parmi les 30.000 employés du siège ; pas facile de troquer sa grande maison contre un petit appartement parisien ; pas facile de quitter son chauffeur et de s'enthousiasmer sur les visages fermés du bus 63 sans se morfondre. La contre partie d'une expatriation réussie ne passerait-elle pas par un retour au bercail en demi-teinte ? Suite à son retour des pays de l'est, Nora raconte "Expatriée, j'avais un statut particulier, il m'était facile de lier connaissance avec les gens (expatriés et autochtones); en France j'ai un peu eu le sentiment de n'être plus rien pendant quelques mois. Là-bas, j'avais un vaste appartement qui me conférait un peu un rôle de notable. Le retour à ma condition normale a été un choc."

Loin des yeux, loin du c?ur
Beaucoup d'expatriés ne cachent pas avoir été un peu déçus de l'accueil qu'ils ont reçu lors de leur retour dans l'Hexagone. Sans en attendre trop, bien souvent les souvenirs cocotiers sont tellement loin des préoccupations de leurs compatriotes, qu'ils ont du mal à faire valoir leur expérience. Imaginez deux jeunes mamans au square, l'une ventant les mérites de son personnel de maison et l'autre parlant de son marathon consistant à jongler en permanence entre le bureau, les courses, la lessive et la visite chez le pédiatre? Que faire ? Chloé, suite à son retour du Vietnam, se souvient : " J'ai très vite compris que ce que j'avais vécu n'évoquait rien aux personnes qui m'entouraient. Cela ne m'a pas posé de problème. Je l'ai accepté. Je me suis pliée aux coutumes françaises comme je l'avais fait en arrivant au Vietnam. Je me suis ré-acclimatée sans lutter, en gardant mes anecdotes pour moi !"

Une autre vie

Agnès de retour des Philippines a pris quelques bonnes claques les premiers temps en France : "Sur Paris : l'horreur : les loyers !!! Sans parler des prix de la nourriture. Mais le plus dur, je crois, que ca a été le climat et les ballades à Fontainebleau le week-end, pas exotiques  pour deux sous." Pour Anne-Claire, après 10 ans d'expatriation en Asie, la flamme de l'enthousiasme s'est éteinte : "Sur la plan qualité de vie : la grande muraille nous manque terriblement ! C'est quasi indécent de dire ça, mais nous avons perdu cette excitation qui nous menait jusqu'aux fins fonds de la Chine... Rien ne nous dit... C'est comme si plus rien n'avait de saveur." Coté vie pratique, Nora se souvient : " Dans les pays de l'Est, la main d'?uvre est très bon marché. Elle est utilisée là-bas pour tous les services de la vie quotidienne (parking, plombier, jardinier, changer un pneu dans la pampa, faire porter ses courses, faire faire ses habits sur mesure...). Au retour de l'Est, je me suis sentie invalide."

Un autre rythme
La France fait bien partie de cette vielle dame qu'est l'Europe. Après avoir connu l'effervescence asiatique et des taux de croissance avoisinants les 8% par an, pas facile de se replonger dans un environnement quasi immobile. Chloé se souvient : "Au Vietnam, tout le monde travaille énormément. Que vous soyez Vietnamien ou expatrié. Il y a une énergie débordante qu'on constate au bureau mais aussi jusque dans les rues. Lorsque je suis rentrée en France, j'ai rencontré des gens éreintés, fatigués de devoir se battre pour essayer de mener à bien des projets." Dans un tout autre contexte, Laurent, de retour d'Istanbul, a subi, lui, l'immobilisme social de plein fouet:" Nous sommes arrivés dans une petite ville de Bretagne avec la farouche intention de nous intégrer ! Mais la réalité a été toute autre. Nous avons été confrontés à des gens qui n'étaient jamais sortis de leur cadre de vie et qui n'aspiraient à rien d'autre. Cette indifférence nous a vraiment cassé notre enthousiasme et je me suis senti comme un étranger dans mon propre pays."

Enfin à la maison !
Mais rentrer en France n'est pas toujours aussi difficile que l'on veut bien le croire. Le retour peut parfois être un véritable soulagement. Philippe*, expatrié en Chine pendant 5 ans, raconte : "Vivre quelques années sous une dictature amène fatalement à apprécier à leur juste valeur tous les droits fondamentaux allant de soi sous nos latitudes démocratiques". Il permet également de relativiser. Nora explique que suite à ses deux expatriations, elle a trouvé "au retour que globalement vivre en France était doux, facile, agréable et d'une façon générale je crois que j'ai plus de tendresse pour les Français après ces expériences(...). J'ai moins ici (en France) mais cependant plus qu'avant ma première expatriation. " Agnès, elle, a apprécié de retrouver sa famille " J'ai ma petite s?ur à 10mn à pied de chez moi et j'en profite bien." Chloé, elle, a apprécié de "se glisser les soirs d'hiver sous une couette bien douillette, juste le plaisir d'avoir de nouveau  froid !"


Anticiper pour mieux apprécier

Une chose est sure, un retour, ça se prépare."Quand on part vivre ailleurs, on s'attend évidemment à vivre un choc culturel , on s'y prépare et on le vit comme un enrichissement personnel. Mais quand on rentre chez soi, quand on revient au pays, ça n'est pas la chose à laquelle on pense? Et pourtant, après 10 ans d'absence, pour nous en tout cas, le choc est d'autant plus rude qu'on ne s'y était pas forcément préparé?" reconnait Anne-Claire. Anticiper le plus possible permet une arrivée plus douce et évite de se frotter de trop près aux décalages socioculturels. Nora en a fait l'expérience lors de sa deuxième expatriation en Asie : "Le deuxième retour est passé comme une lettre à la poste : celui-là, je l'ai vraiment préparé. J'avais pris un appartement d'expatrié moins grand, j'avais moins largué les amarres avec la France, je suis davantage rentrée pendant mon séjour, pris des abonnements à des hebdos... J'avais aussi gardé mon appartement parisien et le retour s'est fait en trois coups de peinture. Je suis arrivée en sachant ce que j'avais à faire, mon cercle d'amis inchangé. J'ai aussi moins parlé de mes aventures et plus écouté les histoires de varicelle ! "

Claire Largillière (www.lepetitjournal.com) lundi 27 juin 2011 (réédition)



A lire :
* France, je t'aime je te quitte ? Christian Roudaut, éditions Fayard document

Notre dossier :
CARRIÈRES - Bien préparer son retour d'expatriation
De notre édition de Milan : Retour en France, des expériences tellement différentes
De notre édition de Lisbonne : Expat : Je t'aime, je te quitte, tu nous quittes, il/elle nous quitte

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