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EXPATRIATION – Le retour en France, regret ou soulagement ?

Écrit par Lepetitjournal.com International
Publié le 18 juillet 2014, mis à jour le 18 septembre 2014


Dans le monde des expatriés, été rime souvent avec mobilité. Ce mois de juin marque pour quelques uns une rupture, avec un retour (anticipé ou précipité) en France. Entre nostalgie de la vie à l'étranger et joie des retrouvailles, cette étape est envisagée avec plus ou moins de sérénité

Faire ses cartons pour un retour en France n'est pas facile pour tout le monde. Le décalage entre la réalité et nos souvenirs ? surtout si l'on est parti longtemps - peut faire peur. Car il est indéniable que vivre longtemps à l'étranger nous change. C'est ce qu'explique Fernanda Azevedo, psychologue francophone au Brésil (voir notre article):  "Il est évident qu'une expatriation est pour chacun une expérience marquante. Je ne pense pas que l'on puisse ne pas en sortir, au moins en partie, transformé. Après s'être senti soi-même, au moins les premiers temps, à l'écart des coutumes locales, on porte un regard différent sur l'autre. Même les gens les plus fermés ont tendance à être plus ouverts ou plus attentifs après une expatriation".

© Radius Images/Corbis

Un bilan positif
D'expérience, Jean-Luc estime que "L'expatriation est un véritable enrichissement. Elle permet de se sentir vraiment citoyen du monde". Pour Johan, "le choc subi quand le Français de souche se trouve soudainement n'être qu'un être humain parmi d'autres, sans aucune certitude de la vie en France qui vaille, laisse des traces indélébiles. Peu à peu on devient un peu étranger partout, un peu citoyen de plusieurs pays. C'est un état parfois insatisfaisant, mais la plupart du temps d'une richesse difficile à égaler." "S'expatrier c'est recommencer sa vie, donc ne pas vieillir, reconnaît Roland. Bien souvent sa famille on la subit alors que ses amis on les choisit". Pour Annie, "Le choix de l'expatriation était le choix de la liberté de tenter de vivre autrement que ce qu'on a connu".  
Il est donc difficile, quand on a vécu des moments très forts, et fait des rencontres inoubliables, d'accepter de tourner la page, de rentrer au bercail. Mais comme le dit Pierrette, "il y a départ et départ, ceux qui partent pour aller retrouver un nouveau travail. Ceux qui ont eu une expatriation mal vécue et qui n'ont qu'une hâte, de rentrer dans leur pays. Et il y a le départ définitif à la retraite, qui s'ajoute au départ du pays où l'on a vécu beaucoup d'années et que l'on a apprécié". ?

L'heure du départ est bien souvent aussi l'heure du bilan. Reste à retenir les leçons que l'on a apprises au contact des autres peuples : Cyril a passé près de 12 ans en Grèce "avec un immense plaisir dû à la qualité de vie et surtout à l'amabilité des habitants de toutes régions. Les Grecs savent vivre, sans trop de stress, et devraient donner des leçons de vie à beaucoup de gens dans le monde et en premier lieu à l'Europe. Bon courage à tous les Grecs dans cette période difficile, et merci pour leur savoir vivre."

Attention à l'atterrissage
Chantal a vécu quatre ans l'expatriation en famille en Afrique francophone. Pas de problème de langue, l'école consulaire française pour les enfants et un mode de vie très agréable. Le retour en France a été très difficile : "un quotidien bien différent où tout est un problème surtout quand la femme travaille. Le niveau de vie bien en dessous de celui que nous avions en qualité d'expatriés (salaires nets, impôts prélevés à la source, logement de fonction et charges payées par la société, voiture de fonction, voyages en avion pour toute la famille payés et pour certains le personnel de maison payé également). Toute la famille peine à retrouver ses marques. Nous idéalisons souvent cette période et avons tendance à occulter quelques moments difficiles vécus là-bas. Cet épisode de vie nous a donné une grande ouverture d'esprit et une meilleure connaissance des Africains. Nous gardons donc un souvenir positif de cette période."

Pierrette suggère de bien préparer son arrivée, "choisir la région, acheter ou louer son futur logement, et se dire que rien n'est définitif. Attention au changement de statut car en qualité d'expatrié les avantages ne manquent pas ! Vous bougez, vous visitez, vous découvrez, vous apprenez, c'est une autre vie, de nouveaux amis, une nouvelle langue, coutumes et malgré les heures passées au travail 48/50 h par semaine, il y a une sensation de vacances et une part d'insouciance. Quand vous rentrez dans votre pays, il n'y a plus la magie du dépaysement... Il faut se préparer mentalement et oublier ce que vous aviez quitté il y a 20 ans.  Car la France d'aujourd'hui ne ressemble plus à la France d'hier, vos amis ont déménagé, vous ne retrouvez plus la même famille que celle que vous aviez quitté même en ayant toujours gardé le contact avec elle. Croire que retrouver le camembert, la charcuterie et les fruits de mer vont vous aider est faux. Vous apprécierez au début puis ensuite la routine s'installera et le porte monnaie criera 'stop'. Il faut je pense deux années pour trouver ses repères, se réhabituer à la vie française, faire d'autres connaissances..."

Face aux regrets de ne pas continuer l'aventure hors de France, beaucoup n'ont de cesse de vouloir repartir. C'est le cas de Jordi : "Même si je suis revenu en France, je me sens du 102ème département français : celui des expatriés, des voyageurs, des routards. Je suis toujours aussi fier d'être Français, mais ma vision du monde et des choses a complètement changé et continuera de changer. Ce que je réalise surtout, c'est que le monde va à 10.000 à l'heure, il grandit, il évolue à une vitesse fulgurante et les Européens restent là, comme si de rien était. J'ai la chance de travailler quotidiennement avec des personnes qui viennent du monde entier, bizarrement c'est quand je me retrouve avec des Français que je me sens étranger. Je pense que les mentalités finiront par évoluer et les réalités par nous rattraper, espérons que ça ne sera pas trop brutal !"
Claudie, partie 2 ans en Martinique, a toujours la nostalgie de cette époque : "comme le dit Aznavour, la vie est moins difficile au soleil."
Stéphanie "rêve de repartir depuis deux ans que nous sommes rentrés! Je ne me sens plus chez moi en France mais n'ai pourtant pas d'autre patrie... Ce mal-être qui confine parfois à la grosse déprime alors que la France, c'est pourtant un pays qu'on nous envie... mais les Français? Ça, c'est moins sûr, et comme je le comprends..."

Le retour, enfin !
Si c'est dur pour ceux qui ont attrapé le virus des voyages, il y a heureusement beaucoup de retours qui se passent bien. C'est même un soulagement pour ceux qui souffraient d'être trop loin de leurs proches. Aline a mal vécu son séjour dans le Minnesota  : "c'est un apprentissage rude, que celui de l'éloignement, de la séparation. Je ne me suis jamais sentie à l'aise aux Etats-Unis, ce qui m'a d'ailleurs surprise ! Je trouvais les relations avec nos voisins d'une superficialité révoltante. Je me suis sentie très seule, isolée. On a eu la possibilité de rentrer plus vite, on s'est dit que cela ne valait pas la peine de continuer à être malheureux loin des nôtres."
Marie-Laure, en Espagne, ne s'est jamais habituée non plus à être loin : "les retrouvailles lors des voyages c'était génial, mais trop dur de se séparer ensuite à nouveau!" ?Carla aussi est ravie de rentrer : "A moi tout me manque! Je prends la France cash. Avec ses défauts et ses qualités. J'aime sa diversité de saveurs, de paysages, de gens, d'accents. J'aime son art de vivre et sa culture. Et je suis amusée par l'insolence, le snobisme, et la façon qu'ont les Français de débattre des heures pour ne rien dire... Après 30 ans d'exil, j'aspire à revenir dans mon pays, en connaissant tous ses défauts. J'aurai l'impression de retrouver une vieille amie, un peu acariâtre mais pleine de charme."
Pour Isabelle, "après plusieurs années aux USA, le retour en France n'a pas été facile. Et pourtant cela a été un bon choix pour notre famille, en priorité pour mes enfants étudiants. Ils ont vraiment besoin de nous sentir proche d'eux et de nous savoir disponibles." Christian également est ravi de rentrer, pour pouvoir plus profiter de ses parents : "Je suis content de pouvoir être plus près d'eux, de renouer le lien avec chacun et faire en sorte que mes enfants profitent de leurs grands-parents. On a passé trop de Noëls tous seuls, et eux aussi !" ??

Au boulot !
Patricia, expatriée de nombreuses années en Asie et de retour depuis peu en France, avait suivi avec enthousiasme son mari. "Noyée dans ce confort, je ne me suis pas précipitée pour travailler. Femme au foyer dans une belle villa avec du personnel domestique, j'ai pu profiter à fond de mes enfants. Mais vivre dans un cadre doré n'a vite pas suffi à me combler. J'avais l'impression de ne pas m'épanouir totalement (voir aussi notre article Femme d'expat, la vie enchantée ?). Avocate de formation, je retrouve ici avec grand plaisir mon travail, mon indépendance financière, bref, ma carrière."

Home sweet home
Dans les moments difficiles de l'expat, combien d'entre nous n'ont pas juré qu'ils allaient faire leurs valises et rentrer en France ? On peut être agacé par certains aspects de la vie dans l'Hexagone, ou de la mentalité de nos chers compatriotes, finalement la France, c'est quand-même la maison ! "Un Mauritanien m'a dit un jour : 'la Mauritanie c'est le plus beau pays du monde', raconte Mishe. J'ai souri et pensé à l'Afrique noire, à l'Asie... Il vivait au milieu de caillasses, de biques bouffant du plastique, et dans un dénuement complet. Mais il avait aussi raison, comme tous ceux qui parlent de leur pays. Son pays, sa ville, ce sera toujours le meilleur coin du monde. Un copain à moi vit dans la splendide Australie depuis 1975. Il rêve maintenant de revoir sa cité minière de Lorraine où il a passé de si bons moments de sa jeunesse."
Alors que l'on ait choisi ou pas de rentrer, l'important, comme toujours, c'est de positiver et d'aborder cette étape... comme une nouvelle expatriation. ?

MPP (www.lepetitjournal.com) ??lundi 25 juin 2012

En savoir plus :
de notre édition de Singapour : La vraie expatriation, c'est le retour
et nos articles de la rubrique Expat :
Une fête de départ, pourquoi ?
CARRIERE - Réussir un retour gagnant

logofbinter
Publié le 18 juillet 2014, mis à jour le 18 septembre 2014

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