

Les pépiniéristes sont souvent les seuls à apporter un peu de verdure dans la fourmilière cimentée et bétonnée de Dakar. Ce sont des travailleurs acharnés et méticuleux, auxquels on ne porte pas toujours attention. Sene Samba, pépiniériste près du Monument de la Renaissance nous parle de son travail.
Sene Samba a dix ans d’expérience de pépiniériste à son compteur. Il a appris en pratiquant avec ses grands frères. Ceux-ci possédaient une pépinière derrière le centre de formation à l’horticulture des Parcelles Assainies. Il a fini par lancer sa propre pépinière à deux pas du Monument de la Renaissance.
Tous les jours, Sene Samba se lève à six heures du matin pour arroser ses plantes, sans vraiment savoir à quelle heure il finira sa journée. Son emploi du temps varie en fonction des saisons. Si la saison est chaude, c’est le bouturage et le rempotage qui occupe la majeure partie de sa matinée. “Il faut être très délicat lorsqu’on déplace les petites plantes des petits aux grands sachets par exemple, ça prend du temps”, explique-t-il. Il ajoute aussi l’engrais qu’il fait lui-même. La fabrication de l’engrais nécessite deux semaines. Il le fait à base de feuilles de filaos séchées et des déchets des chevaux. Il y ajoute du sable et de l’eau régulièrement.

Pour lancer sa propre pépinière, Sene Samba a dû s’armer de patience : il a commencé par récolter les petits sachets, les bouteilles en plastique qui servent de pots aux jeunes pousses, puis il a dû trouver des graines, faire garder les plantes la nuit… “Maintenant, j’ai plus de soixante espèces de plantes et d’arbres qui demandent des traitements différents”, raconte-t-il. Il en a fait l’acquisition petit à petit. Certaines espèces ont été vendues, d’autres servent de “pied mère”. “Par exemple, le papayer planté à même la terre dans ma pépinière ne pourra jamais être déplacé sans le tuer, mais il me donne des graines que je plante dans les petits pots”, explique-t-il.

Les clients achètent des plantes à l’année à la pépinière, mais c’est surtout en octobre qu’il est surchargé de travail, ainsi qu’à l’occasion des fêtes de fin d’année, après le réveillon. “La plupart du temps, si on nous achète une plante, c’est nous qui allons la planter”, explique Sene Samba. Evidemment il faut payer le déplacement et la main d’oeuvre, mais replanter un végétal sans que celui-ci ne perde la vie dans le processus est une affaire délicate. Les devis, comme l’aménagement d’un jardin ou d’une maison, demandent de la réflexion : "on ne peut pas planter un bougainvillier comme on poserait un fauteuil de jardin" affirme Sene Samba qui prend toujours le temps de discuter longtemps avec son client. Ce n’est pas seulement le déplacement des végétaux qui est un travail d’orfèvre, le bouturage comme l’arrosage est aussi une affaire de précision. Certaines espèces, comme l’épine du Christ, peuvent très facilement se noyer et pourrir ou, au contraire, mourir de soif.

Sa pépinière ne compte que deux employés et lui-même. Ces derniers ont eux aussi appris le métier en pépinière, “et ne cessent d’apprendre”, précise-t-il. “Je ne sais pas si j’aimerais que mes fils fassent la même chose. Au Sénégal nous ne sommes pas forcément respectés, mais j’aime ma pépinière car elle est le fruit de mon travail”, conclut-il.
