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Vivre à Dakar : Marta, photographe espagnole

Marta Moreiras dakar photographe portrait expatriee senegalMarta Moreiras dakar photographe portrait expatriee senegal
Marta vit au Sénégal depuis 2015
Écrit par Gaëlle Picut
Publié le 13 novembre 2018, mis à jour le 6 janvier 2021

Rencontre avec Marta Moreiras, 37 ans, photographe et journaliste espagnole freelance, installée à Dakar depuis 3 ans.

Quand et pour quelle raison es-tu venue au Sénégal, la première fois ?

Mon premier contact avec le Sénégal s’est fait en 2008. Je suis venue au Dakar pour une ONG qui m’avait commandé un reportage photos à l’hôpital Aristide Le Dantec. C’était ma première rencontre avec l’Afrique sub-saharienne. A l’issue de ce travail, je suis partie faire le tour du Sénégal durant un mois avec un ami espagnol qui venait de terminer un documentaire sur les migrants sénégalais qui partent en Espagne en pirogue. J’ai adoré parcourir le pays dans tous les sens. Puis je suis retournée à Londres où je vivais à l’époque et j’y suis restée pendant 7 ans. Mais je faisais régulièrement des allers-retours au Sénégal pour des ONG. En 2011, je suis revenue en voyage avec des amis et ma sœur et j’ai trouvé que Dakar était en pleine transformation et cela m’a interpellée. A côté, je trouvais que l’Europe ne changeait plus. La crise de 2008 avait frappé l’Angleterre, l’Espagne, etc. tandis qu’à Dakar, je voyais beaucoup de choses bouger sur des sujets qui m’intéressaient : l’éducation, la santé, le développement durable. Je trouvais ma vie stressante, le mode de vie européen fatigant. Londres me prenait plus d’énergie qu’elle ne m’en donnait.  Entre 2012 et 2015, j’ai donc pris des contacts pour voir comment je pourrais m’installer au Sénégal et exercer en tant que freelance mon métier de photographe.

Parle nous de ton travail.

Je travaille à la fois pour des clients sénégalais et des médias ou ONG nationales ou internationales. Je fais des reportages photos, des vidéos et des textes aussi parfois. (NDLR : vous pouvez découvrir les travaux de Marta sur son site).

peres marta moreiras dak'art 2018

L’an dernier, j’ai réalisé une exposition intitulée Pères dans le cadre de la Biennale de l’Art africain contemporain, Dak’Art 2018.

Je me suis rendu compte que j’avais des milliers de clichés avec des mères sénégalaises qui portaient leurs bébés mais aucune d’homme. J’ai voulu représenter des hommes qui s’occupent et portent leurs bébés. L’image de la mère est omniprésente dans l’espace public, mais celle du père est quasiment absente. Pourtant, les pères s’occupent aussi de leurs enfants, mais leur rôle n’est pas représenté. En continuant à ne montrer que des mères avec leurs bébés, on reproduit les clichés, les stéréotypes. Mes photos veulent  symboliser l’égalités des genres. J’ai voulu montrer des hommes qui soutiennent leur femme dans la recherche de leur indépendance et qui oeuvrent à un meilleur équilibre au sein des couples. Il y a un énorme travail à mener pour faire évoluer les mentalités et les habitudes culturelles, au Sénégal, mais aussi ailleurs dans le monde. Les réactions ont été globalement très positives.

Mon prochain projet personnel photographique sera autour de la jeunesse sénégalaise.

Qu'aimes-tu particulièrement au Sénégal ?

L’ambiance, la facilité d’entrer en contact avec les gens, de les approcher, d’échanger avec les Sénégalais.

Leur joie de vivre également malgré les difficultés : cet état d’esprit « on va s’amuser, profiter de la vie » malgré tout.

La société sénégalaise est très ouverte et les rencontres humaines sont riches.

Et ce que tu trouves plus compliqué ?

Le chaos de la ville, le trafic, le désordre. Mais c’est un désordre qui peut devenir ordonné lorsqu'on arrive à comprendre comment il fonctionne.

Les modes de vie européen et africain sont très différents. J’avais besoin de changer de rythme. A Londres, le rythme de vie était frénétique, il ne nous laisse que peu de temps pour réfléchir, se (re)poser.

Au Sénégal, grâce au climat et à ce chaos, on est obligé de réduire la marche, de ralentir (le slow life), et d’accepter que les choses soient différentes.

Que te manque-t-il ? 

Les espaces verts. Je viens de La Galice en Espagne, une région très verte où la nature est très intégrée aux villes.

Quel est ton endroit préféré à Dakar ?

Tous les endroits où l’on voit la mer ! Dakar est une ville très chargée et très peuplée, c’est l’Océan atlantique qui la sauve. Elle respire, et nous aussi, grâce à lui. Voir l’horizon est essentiel pour moi et l’Océan exerce un fort pouvoir d’attraction sur moi !

C’est pour cette raison que j’aime toute la Corniche, du Nord au Sud : Soumbedioune, les plages, le parcours sportif, la Mosquée de la Divinité, le phare des Mamelles, etc.

Et ton quartier préféré ?

Ouakam, un concentré de Dakar selon moi. D’un côté, le petit village, les ruelles, les arbres... et de l’autre les nouveaux quartiers, les maisons toutes neuves. J’aime ce mélange de quartier populaire et de modernité. Le quartier de la Mosquée de la Divinité avec sa plage, son côté religieux, ses pêcheurs traditionnels, ses surfeurs est un bon exemple de ces contrastes, de ces mélanges. Et je trouve qu’à Ouakam, il y a une bonne ambiance entre les locaux et les étrangers.

Ta région du Sénégal préférée ?

La Casamance ! Mon compagnon vient de cette région. J’y vais très souvent pour le travail ou les loisirs. Tout est vert ! Cela me rappelle la Galice. Et de la même façon que ma région natale, la Casamance est une région isolée et un peu oubliée des pouvoirs centraux. Beaucoup d’ONG travaillent là-bas sur des projets de développement.

Quels conseils donnerais-tu à des personnes nouvellement arrivées ou qui souhaitent se lancer dans la vie active au Sénégal ?

Se donner du temps pour comprendre la vie ici. Ne pas juger, beaucoup observer. Au début ce n’est pas facile car on arrive avec une liste des références, de réflexes qui ne s’appliquent pas ici. Mais si on décide d’aller vers l’essentiel, de privilégier les relations humaines, on se rend rapidement compte que l’on a beaucoup de choses en commun.

Ne pas imposer son rythme, sa mentalité, s’adapter.

Enfin, pour les freelances comme moi, il ne faut pas avoir peur de prendre son téléphone, d’aller à la rencontre des gens pour leur présenter votre travail et puis être patient aussi !

Vous pouvez également suivre Marta sur twitter ou instagram.

Gaelle Picut
Publié le 13 novembre 2018, mis à jour le 6 janvier 2021

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