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Chroniques d'une installation à Dakar

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Les 4 enfants de Michèle, embarqués ! © MdV
Écrit par Lepetitjournal Dakar
Publié le 20 novembre 2019, mis à jour le 6 janvier 2021

Partira, partira pas ?

L’annonce tant attendue est bel et bien là, cette fois c’est officiel, mon mari se voit offrir une proposition de poste à Dakar.

Faisant outil de son tact désormais légendaire, l’annonce se veut non subtile et non délicate :

- «On déménage à Dakar en Août » Point.

À ces mots, la future expat ne se sent plus de joie, elle ouvre un large bec et n’entend plus sa voix : Il semblerait qu’un courant d’air brûlant, tout droit arrivé du désert de Lompoul envahisse subitement mon corps.

Commence alors la valse des questions plus épineuses encore que celles d’un acacia du Fouta :

  • Où allons-nous habiter ?
  • Où les enfants iront-ils à l’école ?
  • Vais-je pouvoir continuer à travailler ?

La fumée noire et épaisse qui émane du pot d’échappement d’un « car-rapide » s’introduit sournoisement dans mon esprit…

Mais, après tout, ces vieux tacos bariolés avancent toujours avec la plus grande témérité, malgré les embuches sur leur route ( et Dieu sait qu’il y en a !), alors pourquoi pas nous ?

C’est décidé, mon époux, nos quatre petits « car-rapides » et moi partirons vers de nouvelles aventures Africaines ! Yallah !

 

Le départ

Une fois les émois de la bonne nouvelle passés, il faut faire place à tout une organisation logistique (les cartons, la voiture, l’inscription des enfants,  la location de la maison …). Moi qui m’étais secrètement auto-proclamée « reine de l’organisation » en gérant toutes ces formalités administratives avec un emploi du temps calé à la minute près du côté Français, j’étais loin de me douter que mon statut royal d’organisatrice redescendrait subitement au grade de roturière côté Sénégalais, pendant que ma couronne resterait coincée un mois dans un container au port de Dakar…

En bonne expat qui programme chaque jour de son été, j’ai fait partir notre container (contenant toute notre vie !) 45 jours avant la rentrée, pensant naïvement me laisser une bonne marge en cas de retard !

Le temps de sillonner la France d’Ouest en Est afin de « dire au revoir » aux amis et à tous les membres de la famille, et nous voici dans l’avion, le cœur (et les valises) un peu chargés… mais impatients de découvrir à quoi ressemblera notre nouvelle vie !

 

L’arrivée

  • Premier jour : 11 Aout 2019

Avion plein, Dakar désert… la faute à la Tabas – qui ? la Tabas – quoi ?

Pas un chat sur la route, pas un chat dans les rues… alors que toutes les personnes ayant déjà séjourné à Dakar (moi y compris) m’avaient décrit une ville bouillonnante, dynamique, agitée… nous arrivons dans un Dakar vide, calme et monotone !

Je réalise alors que nous  arrivons la veille du jour de la fête la plus importante du Sénégal : la Tabaski (Aîd al-Adha). Fête au cours de laquelle tous les habitants de Dakar venant de province, retournent chez eux pour faire la fête en famille. Et la capitale étant une ville essentiellement peuplée de provinciaux, elle se vide pour la semaine au moment de la fête !

La maison que nous avons louée n’est pas encore prête, le container n’est pas arrivé, qu’à cela ne tienne, l’employeur de mon mari nous loge dans une résidence meublée tout confort en attendant ! Un mal pour un bien !

  • Deuxième jour : Tabaski Moubarak !

Impossible de fermer l’œil de la nuit. L’appel de la curiosité d’observer ce qu’il se passe dehors est trop tentant ! Réveillée par le doux son du muezzin qui lance l’appel à la prière du matin et époustouflée par la dévotion des Sénégalais qui, tout de blanc vêtus, marchent fièrement vers la mosquée, profitant d’une brise matinale que je qualifierai de fraîche (ne trouvant pas d’autres mots pour décrire une chaleur un chouïa moins étouffante qu’en journée).

C’est LE jour de l’année où le peuple sénégalais se pare de ses plus beaux atouts : hommes, femmes et enfants portent leurs plus beaux bazins, les esprits sont joyeux et festifs, les odeurs de viande grillée envahissent toutes les maisons et la journée passe au fil des visites successives des voisins, amis, parents venus présenter tour à tour leurs vœux de bonne santé et de prospérité.

  • Troisième jour : en voiture Simone !

Je profite du fait que les routes soient dépeuplées pour me lancer dans ma première chevauchée fantastique ! Je dois dire que j’appréhendais ce moment autant que le jour de mon permis ! Le code de la route n’est pas le même ici… Outre le fait que le revêtement goudronné des routes soit très abîmé ou parfois inexistant, les règles de conduite sont, elles aussi, très approximatives. A vrai dire, je dois l’avouer, ce serait mentir que d’affirmer que ma conduite en France était parfaite et disciplinée… sous prétexte d’avoir de la chance et de toujours trouver une place dans Paris, il m’est arrivé plusieurs fois de me créer mes propres places de stationnement sans compter sur le fait que je retrouvais régulièrement ma voiture quelques heures plus tard chez ma chère amie Madame la fourrière. Et vue ma capacité à faire abstraction des panneaux de circulation, disons que je suis bien contente qu’il n’y en ait pas ici !

Quant à ma voiture, mon cher mari (quelque peu exaspéré par mes multiples expériences de délinquance automobile) avait pris en amont, la sage décision de mettre à ma disposition, une voiture ayant déjà bien servi, afin de « faire mes classes » avec.

Et finalement, forte de mon savoir faire en banditisme routier, je dois dire que je suis plutôt à l’aise ici !

  • Quatrième jour : On ne se laisse pas aller !

Tout juste diplômée du permis sénégalais, j’embarque mes quatre oisillons et nous partons à l’assaut des activités dakaroises ! L’accueil chaleureux des Sénégalais ne se fait pas attendre : partout où nous allons, nous tombons toujours sur quelqu’un de serviable et souriant ! Les enfants sont rois ici ! Ils ne gênent jamais, bien au contraire, il y a toujours une personne pour les taquiner ! J’apprends d’ailleurs que la taquinerie est une philosophie au Sénégal ! Tout le monde passe son temps à se chambrer ! Il m’est arrivé, derrière ma culture occidentale de me vexer parfois, mais ce n’est jamais méchant !

  • Quatre-vingt-dixième jour : Mais pourquoi le mot « hivernage » contient-il le mot « hiver » ?

À la limite, si cette période (Août, Septembre, Octobre) s’était appelée « hiv’air lourd, humide et irrespirable » là, oui, j’aurais compris !!

Sans surprise, la toubab a rencontré quelques difficultés à s’acclimater à cette chaleur ! (Je me suis même étonnée de découvrir qu’on pouvait transpirer des sourcils !)

Quant aux tempêtes tropicales, elles sont aussi éclatantes que fascinantes !

Heureusement, les plages et les multiples piscines de Dakar nous permettent de nous octroyer des pauses rafraichissantes (et salvatrices) !

Place maintenant, à une brise matinale très appréciée, qui laisse présager l’arrivée de températures plus douces (c’est ironique, parce qu’en France, quand Evelyne Dhélia mentionne l’arrivée de températures plus douces, il s’agit de températures plus chaudes et non plus fraîches ! Chacun voit midi à sa porte !)

Chacun voit midi à sa porte…. C’est, je trouve, l’expression qui caractérise le mieux notre nouvelle vie à Dakar ! Ici se côtoient différentes ethnies, cultures, religions, mais chacun y trouve son compte ! Et, au final, quand il est midi, et bien il est midi pour tout le monde !!!

S’il y a bien une image que je veux garder en tête, pendant toute la durée de mon séjour au Sénégal, ce sont les sourires : partout, tout le temps, éclatants, charmants, aimables, édentés parfois, moqueurs souvent mais toujours sincères et spontanés. Ils se lisent partout, sur leurs visages, et sur nos visages !

Au final, au bout de trois mois, je me sens déjà chez moi, parce que cette presque-île est presque-parfaite !

Michèle de Vals

logofbdakar
Publié le 20 novembre 2019, mis à jour le 6 janvier 2021

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