Yancouba Diémé, 29 ans, a publié fin août 2019 son premier roman aux éditions Flammarion, Boy Diola. « Boy Diola », c’est ainsi qu’on surnommait le villageois de Casamance venu à Dakar pour trouver du travail. Dans ce livre, Yancouba Diémé retrace l’histoire de son père, Apéraw, agriculteur et producteur d’arachides, qui quitte son village de Casamance au moment où la sécheresse commence à se faire sentir, d’abord pour Dakar puis pour la France, en bateau, à la fin des années 60. Après Marseille, Apéraw découvre Paris et le quartier joyeux de Pigalle, puis il travaillera près de quinze ans dans les usines Citroën à Aulnay-sous-Bois pour faire vivre sa famille nombreuse, avant d'être licencié et de trouver des petits boulots. A la retraite, il repartira vivre en Casamance, mais, ayant vécu de nombreuses années en France, il ne s'y sentira plus totalement à l'aise.
Né à 1990 à Villepinte, Yancouba Diémé est le petit dernier d’une fratrie de neuf. Après des études d'anglais, il part à l'université de Norwich en Angleterre pour suivre un cours d’écriture créative sur la non-fiction biographique, avant d'effectuer un master d'écriture à Paris 8. C'est durant ses études qu'il décide de raconter la vie et la jeunesse de son père qu'il connait en réalité très peu. Il décide de l'interroger sur son passé, mais celui-ci se braque et refuse de se livrer. A force de patience, le fils reconstruira petit à petit le puzzle de la vie de son père, notamment son enfance en Casamance et ses quelques années à Dakar, avant de partir pour la France.
Après ses études, Yancouba Diémé voyagera ensuite pendant un an en Afrique, notamment au Sénégal, mais aussi en Côte d'Ivoire et au Libéria, pour suivre les traces de son père. Il travaille actuellement dans une médiathèque en banlieue parisienne.
Dans ce récit, il mêle la vie de son père et ses propres souvenirs de Casamance, qu'il découvre pour la première fois à l'âge de 11 ans, lors d'un grand voyage familial. Il évoque la vie laborieuse des agriculteurs-riziculteurs, les croyances animistes que la religion musulmane n'a pas réussi à faire disparaître, la solidarité entre villageois, etc., un monde si différent de celui de la banlieue parisienne où il a toujours vécu.
Puis il évoque, mais de façon un peu survolée et pas toujours chronologique, les années de travail chez Citroën, le pavillon de banlieue, la polygamie de son père, la mort brutale de sa mère à l'âge de 42 ans, alors que lui n'en a que 7, le début de la dégringolade suite au licenciement, les petits boulots de plus en plus rares, puis le retour dans son pays natal, où son père se sent maintenant un peu un étranger.
"Boy Diola" est un récit plutôt touchant, un témoignage tendre sur ces Sénégalais qui sont venus travailler en France pour des raisons économiques et qui, lorsqu'ils rentrent au pays se sentent un peu déracinés. Mais il passe sur certains épisodes un peu trop rapidement (la polygamie de son père alors qu'il vit en France, la mort de sa mère, ses sentiments par rapport à la France, etc.). On a un peu de mal à saisir la personnalité de ce père taiseux et fier. Le style est simple, fluide, mais il aurait mérité d'être un peu moins oral et davantage travaillé.
Boy Diola, août 2019, 192 pages , éditions Flammarion, 17 euros (prix en France)