

A la veille de l'ouverture du festival de Cannes 2013, lepetitjournal.com a voulu savoir la place que tenait le cinéma français au Maroc. Déception !
Deux responsables ont été interviewés : Jamal Mehyaoui, responsable communication du Mégarama, grosse structure construite en 2002 avec ses 26 salles dans le royaume, et Hassan Belghiti, trésorier de la chambre des exploitants de cinéma au Maroc et gérant du Rialto, petit cinéma de quartier construit en 1930, témoin de l'architecture Art Déco de Casablanca.
Une "fracture culturelle" entre la France et le Maroc
Que ce soit dans les petites ou les grosses structures cinématographiques, le film français a aujourd'hui bien du mal à faire sa place.
Messieurs Belghiti et Mehyaoui baignent dans le cinéma français depuis leur enfance, le connaissent et l'apprécient beaucoup. "J'ai grandi avec Gabin, Delon, Belmondo, Pierre Richard ou encore Brigitte Bardot" nous dit J. Mehyaoui. "Mais aujourd'hui, nous assistons à une véritable chute du cinéma "classique" français".
Ils nous avancent multiples raisons :
La nouvelle génération cherche avant tout à se distraire. Or le cinéma français serait pour elle "trop intellectuel".
Par ailleurs, ce nouveau public est jeune et ne connait pas vraiment le cinéma français, ses réalisateurs et ses acteurs, mis à part ceux qui se sont faits connaître à l'étranger, notamment aux Etats-Unis, comme par exemple Marion Cotillard ou Jean Dujardin.
Enfin, le cinéma est devenu très commercial et le public marocain est davantage attiré par les films américains présentant un beau casting, de belles images, des effets spéciaux, du rythme et des happy end.
Les films français qui s'en sortent le mieux
Face à la montée en puissance du film américain, le cinéma français fait encore un peu recette dans certains domaines :
Les comédies, à partir du moment où le public arrive à comprendre l'humour français ou tout du moins, peut s'identifier à l'histoire : La vérité si je mens (touche locale), Bienvenue chez les Ch'tis (idée de régionalisme qui existe également au Maroc).
Les films familiaux (Boule et Bill) ou d'animation
Les films à gros succès, comme Intouchables.
Les films avec la présence d'acteurs marocains comme Jamel Debbouze ou Gad Elmaleh : Les seigneurs, Le bonheur n'arrive jamais seul ou encore Le capital.
La réaction des cinémas marocains
Malgré la popularité fléchissante du cinéma français au Maroc, Hassan Belghiti continue à programmer des films de l'Hexagone au cinéma Rialto pour "habituer le public" car, selon lui, "le cinéma français s'exporte très bien aux Etats-Unis donc ça devrait fonctionner également au Maroc. J'ai envie que les gens s'ouvrent l'esprit". Concernant les derniers films programmés au Rialto : le film les Infidèles n'aurait que moyennement fonctionné à cause de son "humour spécial et son caractère osé", Intersections a été retiré de l'affiche au bout d'une semaine faute d'avoir rencontré le public marocain. Seul Astérix et Obélix au service de Sa Majesté a relativement bien fonctionné.
Le film franco-marocain à l'affiche actuellement, Goodbye Morocco espère attirer le public.
Par ailleurs, pour équiper le cinéma Rialto en numérique, des travaux vont être entrepris dans les semaines à venir, ce qui pourrait élargir son éventail de films.
De son côté, Jamal Mehyaoui nous confie qu'il ne prend même plus le risque de programmer un film français car "la vocation du Mégarama est avant tout l'exploitation cinématographique à but commercial" en proposant les meilleures conditions de son et d'images pour du grand spectacle. Aussi, il ne peut se "permettre d'avoir une approche culturelle du cinéma d'auteurs". C'est pourquoi il vérifiera d'abord que le film français est un gros succès avant de le programmer dans ses salles.
Chiffres du cinéma international au Maroc
H.Belghiti a fait une étude pour la Fox qui relève que les films qui fonctionnent le mieux au Maroc sont américains (50%), puis les films marocains (environ 25%). Viennent ensuite les films égyptiens (12%), et français (10%), les autres nationalités se partageant les 5% restant. J. Mehyaoui confirme cette tendance. Le cinéma turc et indien ne fonctionnent pas, non plus que le cinéma espagnol ou encore italien.
Lorraine Pincemail (www.lepetitjournal.com/casablanca) mardi 14 mai 2013
Films français actuellement à l'affiche :
l'Ecume des jours
Goodbye Morocco
Boule et Bill



