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A Minca, les paramilitaires opèrent toujours dans l’ombre

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“Les paramilitaires continuent de faire la loi, mais dans le silence.” Crédits : Dr
Écrit par Nicolas BAGGIONI
Publié le 16 janvier 2020, mis à jour le 16 janvier 2020

Minca, petit village touristique au nord de la Colombie. Nombreux sont les voyageurs qui viennent profiter du calme et de la forêt tropicale. Mais “huit ans plus tôt”, des groupes de paramilitaires d’extrême droite semaient violence et terreur. Aujourd’hui, les milices se font discrètes, mais n’ont pas disparues pour autant.

J’ai vu beaucoup de mes amis se faire tuer”, souffle Mizael, ex-membre de la police de Minca. Des témoignages comme celui-ci, il y en a la pelle dans ce petit village. Nombreux sont les habitants ayant perdu des proches, tués par les paramilitaires. Une époque désormais révolue, qui, aujourd’hui, laisse place à un tourisme florissant.

Mais les milices continuent d’oeuvrer dans l’ombre. “A chaque fois qu’un étranger arrive dans le village - autre qu’un simple touriste- il se fait espionner”, explique l’ancien policier. Assis sur le bord d’un sentier, il poursuit : “Souvent, ce sont les motos-taxis qui leur servent d’indic’, ils te posent plein de questions : d’où tu viens? qu’est-ce que tu fais là? Et puis même s’ils sont moins actifs qu’avant, il y a désormais les narcotrafiquants qui contrôlent le territoire, en vendant de la cocaïne aux gringos.”

 

“Les paramilitaires continuent de faire la loi, mais dans le silence.”

..confirme Milena, venue ouvrir son commerce de souvenirs il y a cinq mois. Bon nombre de commerçants s’installent à Minca depuis que la paix semble régner sur le village. Selon elle, les milices extorquent toujours de l’argent aux riches propriétaires terriens. Une odeur d’encens parfume la pièce, l’espagnole chuchote : “Le propriétaire d’un hôtel [anonyme] a reçu il y a quelques mois la visite de ces hommes. Ils leur ont demandé une somme de 1 200 000 pesos [350€]. Mais il a refusé..

Lire aussi : Les spoliations de terres qui ont mis la Colombie à feu et à sang

Lors de la discussion, elle nous tend une carte de visite, qui comporte le message : “Yo no pago, yo denuncio, contra la extorsión y secuestro” [Je ne paie pas, je dénonce, contre l'extorsion et l’enlèvement, ndlr]. Des messages comme celui-ci sont souvent diffusés dans le quartier. Preuve que la bataille n’est pas terminée. “Il y a plusieurs mois, une touriste britannique s’est faite racketter par un immigré Vénézuélien. Quelques jours plus tard, j’ai appris que les paramilitaires lui ont fait un gros coup de pression pour qu’il ne recommence pas.

 

Un doux climat de “paix” repose sur Minca

Dans une petite épicerie, la musique latino résonne avec le bruit du ventilateur. Derrière le comptoir, trois jeunes bavardent. “La vie est bien meilleure maintenant”, témoigne l’un d’entre eux. Le plus vieux se rappelle : “Il n’y avait presque aucun commerce. On devait descendre sur Santa Marta [à 14km] pour faire les courses”.

En face, dans une boutique voisine, Alejandra range un à un les paquets de cigarettes. “C’était très violent avant, mais les paras ne l’étaient pas avec nous [les petits commerces], ils se concentraient davantage sur les propriétaires des Fincas [fermes locales, ndlr].” Sa soeur partage le même avis. Alors que la chaleur alourdit chacun des ses mouvements dans cette petite pièce, elle ajoute : “Je préfère la vie d’aujourd’hui, même si la présence des touristes me dérange, avec leur façon de vivre et leurs tatouages de partout. On n’a pas la même culture. Mais bon, mieux vaut plus de gringos et moins de violence que l’inverse.”

Nicolas Baggioni
Publié le 16 janvier 2020, mis à jour le 16 janvier 2020

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