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Des peintures sur cerfs-volants traditionnels pour la première fois à Phnom Penh

Fin 2022, lepetitjournal.com s’est intéressé à la tradition locale de cerf-volant. Depuis la semaine dernière, Yann DEFOND, propose ses créations à la vente en boutique. Il s’agit plus précisément de cerfs-volants pnong de 90 centimètres. Le fondateur de la marque KLENG n’est pas Cambodgien. Il s’est pourtant approprié une part du patrimoine culturel khmer après avoir été initié par un maître.

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Écrit par Lepetitjournal Cambodge
Publié le 6 avril 2024, mis à jour le 6 avril 2024

Publi-reportage

 

 

lepetitjournal.com : Votre collaboration avec Shack Collective indique-t-il un changement de stratégie commerciale ?

Yann DEFOND : Mes aérodynes restent disponibles à toute commande via le réseau social facebook. Shack Collective me permet de toucher une clientèle nouvelle : les touristes étrangers. Outre le débouché commercial, il s’agit pour moi de faire connaître une facette de la richesse du savoir-faire artisanal khmer. Il se murmure d’ailleurs dans les couloirs du ministère de la culture que le cerf-volant pnong pourrait prochainement faire l’objet d’une demande d’inscription au registre du patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO.

 

LPJ : Les jouets que vous confectionnez ont-ils réellement leur place dans cette  boutique ?

YD : Il ne me semble pas, en effet, que Shack Collective vende d’autres jouets. Mes cerfs-volants sont évidemment faits pour voler. Cependant ils sont confectionnés à l’ancienne, c’est à dire avec des matières naturelles locales. Or tout cerf-volant est sujet à détérioration lorsqu’il retombe brutalement au sol. Abimer un cerf-volant bon marché ne prête pas particulièrement à apitoiement. En revanche, casser un cerf-volant de qualité, confectionné à la main est plus regrettable ! Ainsi, s’en servir comme objet de décoration, en particulier s’il est peint, est judicieux. Et puis un objet d’art prend de la valeur avec le temps s’il est bien conservé. De surcroît mon parti pris s’inscrit parfaitement dans la politique de Shack Collective qui privilégie le biologique et l’équitable.

 

LPJ : Que peignez-vous au juste ?

YD : Dans la péninsule du sud-est asiatique, la peinture sur cerf-volant est une pratique artistique ancienne. Je peints à l’huile.

Les être fabuleux constituent mon premier thème de prédilection. Il s’agit d’êtres animés imaginaires que je répertorie à travers les contes et légendes cambodgiennes. Ils sont généralement issus de la mythologie indienne. Ma manière de les représenter perpétue la tradition. Je privilégie ceux qui sont pourvus de la faculté de voler. Dernièrement, j’ai peint un yaksha, un ogre de la mythologie. Entre monde civilisé et monde sauvage, ces esprits belliqueux symbolisent la force non tempérée, la puissance incontrôlable de la nature. On peut y voir une analogie avec le souffle du vent qui fait voler les cerfs-volants.

Les yantras khmers constituent mon second thème de prédilection. Ces symboles graphiques d’origine indienne ont pour base des caractères alphabétiques. Pour autant, ils ne se lisent pas. Relativement simples ou d’une extrême complexité, ils sont au nombre d’environ 850. Ce nombre est approximatif car de multiples variantes existent. On peut les regrouper en 3 catégories : (1) les ensembles constitués de lettres et autres signes, (2) les ensembles de lettres et signes organisés selon des diagrammes de formes variées et (3) les ensembles de lettres et signes déployés autour de dessins d’êtres animés. A l’origine, il y a plus de 2000 ans, ils révélaient les concepts et aspects du monde. Leur sens est obscur. Beaucoup y voient des formules magiques voire des sortilèges à destination de leurs ennemis. Il y a néanmoins consensus sur le fait que ces symboliques mystiques offrent protection. Ils sont généralement dessinés sur tissu voire sur papier ou bien sur l’épiderme humain, en particulier chez les hommes qui se font ainsi tatouer.

 

LPJ : Si ce n’est pour la partie artistique, avez-vous des employés qui confectionnent les cerfs-volants ?

YD : Il m’est arrivé d’embaucher pour une grosse commande mais ce n’est pas ce que je recherche. Habituellement, je fabrique moi-même les cerfs-volants. Selon le modèle, cela prend entre une demi-journée et trois jours. Le plus délicat est la courbure du bambou à chaud.

 

LPJ : Que signifie KLENG ?

YD : KLENG est une romanisation du mot khmer ខ្លែង [khlaɛ:ɲ] qui signifie cerf-volant. En réalité, ce mot avait à l’origine un autre sens qui de nos jours est devenu désuet. Il désignait le balbuzard pêcheur (pandion haliaetus), espèce de rapaces diurnes répandue dans une grande partie du monde dont l’Asie du Sud-Est.

 

cerf volant

 

Yann DEFOND est français. C’est au Cambodge qu’il s’est établi pour la vie. Il est également connu pour son livre Un chrétien au Cambodge. Dans ce témoignage, il met au profit des lecteurs toute la richesse de son expérience de 20 ans d’assimilation.

Shack Collective est une boutique d’artisanat à orientation équitable et biologique. Elle propose à la vente des produits divers de marques indépendantes locales. Le magasin est située derrière le palais royal au 189 de la rue 𝐏𝐫𝐞𝐚𝐡𝐀𝐧𝐠 𝐘𝐮𝐤𝐚𝐧𝐭𝐡𝐨𝐫 à Phnom Penh. Shack Collective est ouverte du mardi au dimanche de 10h à 18h.

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