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CONJOINT D’EXPAT – Comment valoriser votre expérience ?

Écrit par Lepetitjournal Santiago
Publié le 26 août 2014, mis à jour le 25 août 2014


Stéphanie Talleux est coach, experte en expatriation et en gestion des carrières nomades. Dans son livre : Conjoint d'expatrié, votre carrière continue ! 
(Studyrama Pro), elle dresse un état des lieux de l'expatriation du point de vue du conjoint. Son livre est le fruit de trois ans d'enquête au cours desquelles elle est allée à la rencontre de conjoints d'expatriés, de coaches, de médecins, de psychologues, de responsables des ressources humaines ou de spécialistes de la mobilité internationale. Elle a répondu aux questions du Petitjournal.com.

Lepetitjournal.com - Pourquoi vous êtes-vous intéressée à la carrière des conjoints d'expatriés?
Stéphanie Talleux - J'ai moi-même été conjointe d'expatrié. J'ai vécu à Londres, à Singapour et à Hong Kong. Mon parcours professionnel était décousu car il n'était déterminé que par la carrière de mon époux. J'avais le sentiment d'avoir réussi à me "dépatouiller" mais sans véritable fil rouge. J'ai réalisé qu'on parlait beaucoup de la carrière de l'expatrié mais qu'on ne s'intéressait jamais à celle de son conjoint. Or, beaucoup ont le désir de mener un projet professionnel. Ils trouvent souvent un emploi mais cette démarche ne s'intègre pas dans une véritable perspective de carrière. Il arrive que ceux qui suivent et ne sont pas maîtres de l'espace et du temps perdent le sens de leur projet, puis leurs ambitions et enfin portent un regard très sévère sur leurs parcours. En rencontrant des conjoints-suiveurs qui avaient réussi à trouver un fil rouge et à se réaliser professionnellement sur le long terme, j'ai compris qu'il y avait une méthodologie et que cela valait la peine de la partager.

Comment conseillez-vous ces conjoints-suiveurs soucieux de mener un projet professionnel de long terme ?
Je travaille sur les carrières. J'amène les conjoints à réfléchir au retour. Je leur pose la question suivante : Comment voyez-vous votre retour ? Une expatriation réussie, c'est un retour réussi. Il est très important de se projeter et de se donner des objectifs. Ensuite, tout dépend du pays. A-t-on envie d'y être salarié ? D'y créer une entreprise ? Quoiqu'il en soit, il faut s'affranchir des contraintes. Si on n'excelle pas vraiment dans les langues, il ne faut pas en faire un frein. Tous les postes ne nécessitent pas une pratique parfaite et c'est aussi un argument relatif selon les différents pays. Il convient également de ne pas importer une démarche de recherche d'emploi telle qu'on l'a pratiquée en France. Ces techniques sont culturelles et donc différentes selon les endroits où l'on s'installe. Il me semble impératif de saisir les opportunités offertes par l'expatriation et de se créer un réseau professionnel sur lequel s'appuyer.

Justement, quelles sont vos suggestions pour se constituer un réseau professionnel à l'étranger ?
On ne "réseaute" pas de la même façon en France qu'en tant qu'expatrié à l'étranger. En France, cela passe davantage par la famille, les amis ou l'université. En expatriation, le cadre est beaucoup plus large et plus assumé aussi, c'est beaucoup plus proche des pratiques nord-américaines. Il faut se rendre aux réunions thématiques des associations ou de la Chambre de commerce, repérer les sujets en lien avec ce que vous cherchez et en profiter pour nouer des relations. C'est aussi l'occasion de trouver des informations sur les bonnes pratiques de votre nouveau pays. Il est aussi important d'aller à la pêche aux informations dans la presse locale spécialisée. Il ne faut pas non plus hésiter à se tourner vers l'entreprise qui a expatrié votre conjoint. Il faut avoir de l'audace, contacter la DRH, et demander un rendez-vous avec le directeur du service le plus proche de vos compétences. En général, ils sont très heureux de vous recevoir. Il y a aussi le réseau français, auquel on a légitimement accès, du simple fait d'être Français. Mais pensez aussi à élargir au réseau francophone. On se tourne par exemple vers les Canadiens qui sont assez différents et affichent clairement leurs objectifs.

Comment valoriser son expérience à l'étranger lorsque l'on ne dispose pas de visa de travail ?
Lorsque les conjoints ne disposent pas de visa de travail, je travaille avec eux sur les compétences qu'il est bénéfique pour eux d'acquérir au cours de leur expérience à l'étranger. Ce n'est pas parce que l'on ne travaille pas que l'on ne peut pas se former. Il existe toute une série de statuts que l'on peut épouser. Cela peut être l'occasion de reprendre des études. Je me souviens d'une femme qui était retournée à l'université et à son retour avait décroché un poste en mobilité internationale dans une banque. Il y a aussi la voie du bénévolat qui peut permettre de développer ses connaissances. Il y a un frein culturel qui empêche les gens de se prévaloir de compétences acquises dans le bénévolat. Il faut vraiment réussir à se défaire de cette idée reçue. Les directions des ressources humaines ne le voient pas comme ça. Dans les pays anglo-saxons, toutes ces compétences qui peuvent être transférées à l'entreprise sont très valorisées. Vous accumulez aussi des connaissances parce que vous vivez une aventure hors du commun : il y a la langue, la gestion du risque, l'interculturalité. Il faut apprendre à communiquer sur ces compétences comme si elles avaient été acquises en grande école. Avec ou sans visa, le livre propose toute une série de solutions et d'opportunités parmi lesquelles chacun peut piocher en fonction de ses propres contraintes.

Quels conseils donnez-vous aux couples qui se préparent à l'expatriation ?
Avant le départ, essayez d'établir un contrat moral avec votre conjoint, lui dire ce qui est important pour vous : ?J'aimerais travailler? ou ?J'aimerais pouvoir rentrer souvent?... Il est important de mettre les choses au clair, d'évoquer les attentes et les craintes de chacun. Dans le mois qui précède le départ, il se produit souvent une accélération du temps qui conduit à se concentrer sur les choses matérielles. Or, il est impératif de se parler avant de partir. S'il en a un, le projet professionnel du conjoint doit être abordé. Souvent, on n'ose pas vraiment, on le met de côté car on a l'impression que ce la va être mission impossible. Il faut éviter de ne se projeter qu'en tant que suiveur, mais se dire que l'on est aussi expatrié. Le conjoint ne doit pas disparaître au second plan. Il doit pouvoir répondre à des questions essentielles : quels sont les moyens donnés à mon projet ? Le pays le permet-il ? En arrivant sur place, celui qui souhaite travailler ou développer des compétences a tout intérêt à rencontrer des gens qui sont dans la même optique que lui. Par ailleurs, il faut veiller à son bien être avant le départ car l'expatriation demande beaucoup d'énergie !

Propos recueillis par Anne-Louise SAUTREUIL (www.lepetitjournal.com - Brésil pour Santiago) Mardi 26 août 2014

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Publié le 26 août 2014, mis à jour le 25 août 2014

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