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INSOLITE – Visite chez Giorgio Trebino, l’horloger de Dieu

Écrit par Lepetitjournal Turin
Publié le 29 septembre 2014, mis à jour le 29 septembre 2014

Temps de Dieu ou temps des hommes ? Aujourd'hui, le son des cloches ne rythme plus la vie quotidienne, remplacé par un temps plus laïc et scientifique. Mais les cloches sonnent toujours, grâce à des mécanismes de plus en plus compliqués qui ne sont maîtrisés que par quelques spécialistes de plus en plus rares. Voyage en Ligurie, où se trouve l'une des dernières entreprises familiales spécialisées dans ce secteur peu banal.

Giorgio Trebino devant un engrenage du musée des horloges de tour appartenant à son entreprise

"Une cloche sonne, sonne", chantait la voix émouvante d'Edith Piaf, une cloche dont les échos soulignaient les grands moments de la vie du personnage évoqué, son baptême, son mariage et son enterrement. Le temps d'une chanson, elle soulignait le rapport indissociable entre le temps et la religion qui s'est longtemps trouvé au cœur des sociétés chrétiennes, un lien maintes fois mis en évidence par les historiens. En France, les cloches ne sonnent plus guère. En Italie, plus de tocsin (son de cloche destiné à sonner l'alarme) ni de glas (tintement d'une cloche pour annoncer le trépas d'un fidèle) mais on les entend encore, en ville comme à la campagne, sonner les heures (et parfois même les demi-heures et les quarts d'heure), l'angélus, l'office du jour ou une fête particulière. Il faut bien vivre avec son temps : si les cloches sont toujours les mêmes, souvent fort anciennes, le système de réglage de la sonnerie s'est bien sûr modernisé. Il a d'ailleurs parfois été remplacé par un logiciel diffusant le son à nul autre pareil des cloches d'un lieu de culte bien précis (chaque cloche possède une sonnerie qui lui est propre) par l'intermédiaire d'un puissant haut-parleur. Depuis bien longtemps la fonction du sonneur de cloche immortalisée par Quasimodo, le célèbre bossu de Notre-Dame de Paris, est tombée dans l'oubli.

Voyage à Uscio, au cœur de la "Vallée du temps"
Le secret des mécanismes ultra-modernes de sonnerie se trouve en Ligurie, dans une petite bourgade peu connue, un "village au fond de la vallée, comme égaré, presque ignoré", pour reprendre les paroles de la chanson d'Edith Piaf : c'est à Uscio, situé à une trentaine de kilomètres de Gênes, dans l'arrière-pays, que l'on trouve l'une des dernières entreprises familiales spécialisées dans les horloges de tour qui ont autrefois valu à la vallée du torrent Recco le surnom de "Vallée du temps". Il s'agit de l'entreprise Trebino, fondée en 1824 par Roberto Trebino et représentée aujourd'hui par l'un de ses descendants directs, Giorgio Trebino, qui fournit des cloches et des horloges de tour au monde entier. Au XIXe s. et pendant une grande partie du XXe siècle, de Recco à Uscio, on comptait pas moins de sept entreprises spécialisées dans ce secteur. L'une après l'autre, les six autres ont fermé, mais celle-ci résiste encore. Depuis 1958 son meilleur client est le Vatican : de la construction des horloges de la basilique saint-Pierre au système de sonnerie complètement automatisé mis en place en 2008, l'entreprise a toujours été à la pointe de l'innovation et de la technique, condition indispensable pour survivre dans un monde de plus en plus exigeant. Uscio est donc bien plus qu'un de ces pittoresques bourgs sommeillant à l'ombre de ses murs médiévaux dont l'Italie regorge : le musée des horloges de tour, exemple réussi de musée d'entreprise, en témoigne. Il atteste à la fois d'un savoir-faire unique au monde et de l'histoire des rapports entre l'homme et le temps.
Christine Correale (www.lepetitjournal.com/Turin) mardi 30 septembre 2014

Publié le 29 septembre 2014, mis à jour le 29 septembre 2014

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