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INTERVIEW – Thierry Mariani, député de la 11ème circonscription des Français de l'étranger

Écrit par Lepetitjournal Tokyo
Publié le 18 avril 2016, mis à jour le 6 janvier 2018

Député des Français de l'étranger pour la 11ème circonscription, Thierry Mariani était en déplacement au Japon du 14 au 17 avril. Il a bien voulu répondre à nos question

- Quelle est votre opinion concernant le récent décret relatif au permis de conduire pour les Français de l'étranger. Que faudrait-il selon vous modifier ?

Il est très décevant. Ce que je ne comprends pas, c'est que l'on attendait le décret depuis 3 ans et, qu'au final, peu de nos demandes ont été prises en compte. Qu'est-ce qui empêche, par exemple, que le médecin de l'ambassade puisse être agréé pour passer les visites médicales pour le renouvellement des permis poids lourds ? Qu'est-ce qui empêcherait, comme on l'avait demandé, qu'une préfecture, si possible de la région parisienne car c'est le point le plus habituellement fréquenté par les expatriés, soit celle de référence pour tous les expatriés qui n'ont plus d'adresse en France et ont besoin de refaire faire à un moment donné un permis de conduire ? C'est d'autant plus décevant qu'il n'y a pas d'enjeu financier. On peut toujours demander plus de bourses ou plus d'aides pour les écoles, mais on connait le contexte économique. Mais là, je crois sincèrement que c?est un manque d'appréhension, parce que ce genre de « petits » problèmes peuvent être compliqués par moment quand on est à l'étranger.

- Alors que le Japon vient récemment d'être frappé par une nouvelle série de puissants séismes, que faudrait-il faire pour favoriser les inscriptions sur les listes consulaires, notamment des jeunes qui sont souvent moins sensibilisés à la question ?

Tout d'abord j'étais avec Thierry Consigny et, immédiatement, il s'est rapproché des 14 personnes inscrites sur la liste consulaire dans la région de Fukuoka. En priorité une pensée à nos amis japonais qui sont, hélas, les premiers à déplorer des victimes. Qu'est-ce qu'il faudrait faire ? On le répète à chaque fois, il y a un vrai problème pour ceux qui passent brièvement dans un pays. Les détenteurs d'un visa vacances-travail sont l'exemple type. Quand on est jeune, tout va bien par définition. Et donc, l'inscription au consulat, alors qu'elle est très simple, on n'y pense jamais. Le bouche à oreille, la répétition sans cesse sur les sites qui sont là pour préparer le départ ne suffisent pas. Je suis persuadé que l'on ne force pas, comme on dit chez moi, « un âne qui ne veut pas boire » : on aura beau ne jamais cesser de le répéter, il y aura toujours des gens qui ne s'inscriront pas.

- Des avancées ont-elles été faites afin de faciliter les démarches administratives pour les Français de l'étranger ?

Je suis dans l'opposition, mais il faut savoir reconnaitre lorsque les choses vont dans le bon sens. L'Etat fait des progrès. Je pense qu'il a pris conscience des possibilités d'internet. On pourra bientôt réaliser la totalité des démarches d'inscription consulaire en ligne. Là où il y a un vrai progrès à faire, c'est notamment au niveau des caisses de retraite et de la sécurité sociale, où il n'y a toujours aucune coordination et très peu d'efforts pour passer à internet. Certaines caisses d'assurance  envoient encore le certificat de vie à faire remplir par la poste, et elles demandent à ce qu'on le renvoie de nouveau par la poste. Selon les pays, les papiers n'arrivent donc pas à temps, ce qui fait que certains ont parfois leur retraite suspendue.

- Depuis votre élection en tant que député des Français de l'étranger, quelles sont les problèmes qui vous semblent les plus urgents à résoudre pour nos compatriotes locaux ?

En fait il y a plutôt des bonnes surprises, notamment le lycée français. Je me souviens avoir visité le chantier lorsque j'étais ministre, puis être venu pendant la campagne électorale en 2012, juste au moment où la communauté française avait dangereusement baissé et où beaucoup d'élèves étaient partis. Trois ans après, on en est à discuter de comment on va agrandir l'établissement. Aujourd'hui, 8.106 Français sont inscrits sur les listes consulaires. La communauté a repris sa croissance et le lycée français n'a, du coup, aucun problème financier.

Dans les progrès annoncés, même si cela ne résoudra jamais tout, il y a aussi la ratification de la Convention de La Haye. C'est un premier pas pour essayer d'arranger progressivement les problèmes de mariages binationaux qui se terminent parfois par un divorce, avec des enfants qui se retrouvent au milieu.  

Troisième point positif, la création de l'OLES. Quelles que soient les opinions politiques ou les associations, tout le monde a tenu à s'impliquer. Malheureusement, on aura toujours des compatriotes qui risquent d'avoir des problèmes, et la solidarité entre Français sera toujours nécessaire. Il faut donc saluer ce genre d'initiative. Cela fait également un an que les conseillers consulaires sont élus, et je tiens aussi à saluer leur travail. Que ce soit celui des deux élus de ma formation politique, Thierry Consigny et Evelyne Inuzuka, mais aussi de Janick Magne. Ce sont à chaque fois des personnes qui ont pris la mesure de leurs responsabilités et qui essayent, avec les faibles moyens qui leur sont donnés, de faire le maximum.

Votre regard sur la France et la politique française a-t-il évolué depuis votre élection au poste de député des Français de l'étranger ?

Quand on vit à l'étranger ou quand on a l'opportunité ou la chance comme moi de visiter trois à quatre pays par mois, cela change forcément la vision que l'on a sur la France. Je suis convaincu que notre pays a quand même un avenir. Je ne fais pas partie des déclinistes. Je pense qu'on a des actifs durables : on a l'image d'un pays qui reste quand même le premier pays d'attrait touristique. On possède des infrastructures extraordinaires, des écoles et des formations parmi les meilleures sur la planète? On a des atouts qui font qu'on peut rebondir. Mais on a aussi des boulets et, petit à petit, on s'enfonce. Droite et gauche, ces dernières années, en sont responsables. Je pense à toutes les lourdeurs dans le monde du travail ou encore à la pression fiscale qui finit par asphyxier tous les efforts de nos entreprises. Ce qui m'inquiète le plus dans l'expatriation, c'est ceux qui se disent qu'ils ont un avenir un peu nuageux en France et qu'ils vont partir à l'étranger pour tenter leur chance.
Mon regard a évolué dans le sens où je pense que si notre pays ne se réforme pas, réellement, on risque cette fois de vraiment s'enfoncer. J'ai beaucoup du mal à expliquer à certains de nos concitoyens, qui pensent que le monde tourne autour de nous, que la France est le pays le plus beau pays et que tout le monde nous admire, que c'est peut-être vrai, mais que tout le monde nous concurrence aussi. Si on veut rester dans la compétition, si on veut pouvoir maintenir le niveau de vie  de nos compatriotes, on est condamné, obligé de se réformer. Si on continue de reporter sans cesse les efforts qu'ont faits d'autres pays, on aura vraiment un problème pour l'avenir. Je pensais auparavant qu'on devait se réformer, aujourd'hui je suis totalement convaincu qu'il faut non seulement le faire, mais rapidement.
(http://www.lepetitjournal.com/tokyo) mardi 19 avril 2016

logofbtokyo
Publié le 18 avril 2016, mis à jour le 6 janvier 2018

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