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POPULATION - Argent, veau ou riz gratuit, rien n'y fait, le Japon rural se dépeuple inexorablement

Écrit par Lepetitjournal Tokyo
Publié le 9 septembre 2014, mis à jour le 6 janvier 2018

 

Lasse de se dépeupler inexorablement, à l'image du Japon rural, la petite ville de Mishima, dans le sud-ouest du Japon, a eu une idée audacieuse: offrir un veau ou 500.000 yens en liquide (environ 3.650 euros) à tout nouveau résident

Las, l'opération n'a guère fait recette: en plus de 20 ans, une seule personne a accepté le veau... au tout début. "C'est dur d'attirer les gens avec un seul veau", concède Yuji Miyata, un responsable municipal. L'argent sonnant n'a guère fait mieux. Comme Mishima, d'autres municipalités rivalisent d'imagination à travers l'archipel pour inviter de nouveaux habitants. Hida propose 60 kilos de riz chaque année et ce pendant dix ans, tandis qu'à Nikaho (nord), la mairie donne accès gratuitement à ses "onsen", célèbres bains japonais d'eau chaude volcanique. A 100 kilomètres au nord-ouest de Tokyo, Nanmoku fait cadeau des soins médicaux et de la cantine, mais rien n'y fait. "On n'arrive pas à arrêter l'hémorragie", déplorent les autorités. Ce village détient un triste record national: 57% des habitants sont âgés de 65 ans ou plus. Fin juin, on comptait 2.254 âmes dans la bourgade et si rien n'est fait pour augmenter la natalité et freiner l'exode rural, elles ne seront pas plus de 700 en 2040, selon des estimations du gouvernement. Les études les plus pessimistes prédisent que le Japon ne comptera plus que 86 millions d'individus en 2060, contre environ 127 millions actuellement. Il y a de quoi s'alarmer: le déclin est bel et bien amorcé et les 65 ans et plus représentent désormais un quart de la population, une part qui pourrait s'élever à 40% en 2060.

Bancs des écoles clairsemés
Sur la côte nord-est du pays, celle-là même qui a été ravagée il y a trois ans et demi par le tsunami du 11 mars 2011, le port d'Ayukawa n'est plus que l'ombre de lui-même. L'oeil humide, Kinji Suzuki, 77 ans, une dent de cachalot en pendentif, se rappelle les départs joyeux pour ces campagnes de chasse à la baleine en Antarctique qui faisaient vivre le village. C'était il y a une cinquantaine d'années. A Oshika, la ville qui englobe Ayukawa, on ne compte plus aujourd'hui que 3.280 habitants, contre près de 14.000 en 1955, selon des statistiques régionales. Le Japon rural se vide, ceux qui restent sont vieux, au point que la moyenne d'âge des paysans est de 65 ans. Les bancs des écoles sont clairsemés, les services communaux et sociaux deviennent trop coûteux à maintenir. Selon le groupe d'étude privé Japan Policy Council, la moitié des communes du pays pourraient carrément disparaître d'ici à 2040, faute de femmes à la campagne. Les jeunes désertent vers les villes, notamment Osaka, Nagoya et la mégalopole de Tokyo et sa région, qui compte à elle seule 35 millions d'habitants, plus d'un quart de la population du Japon. "Le pays va être déséquilibré, ce n'est pas demain qu'il faut s'occuper de ce grave problème, mais aujourd'hui!", avertit l'ancien ministre Hiroya Masuda, président du Japan Policy Council. A la fin de cette année, le premier ministre Shinzo Abe compte dévoiler un train de mesures pour tenter d'enrayer le déclin démographique du pays avec l'objectif de stabiliser la population à 100 millions de personnes dans les cinq décennies à venir. "L'Etat est conscient de la crise, et c'est donc une tâche très importante que de créer une société vigoureuse dans les zones rurales", plaidait il y a peu le porte-parole du gouvernement, Yoshihide Suga. A l'occasion du récent remaniement, un nouveau portefeuille a d'ailleurs été spécialement mis en place pour revitaliser les régions. Pour Hideo Kumano, chef économiste à l'Institut de recherche Dai-ichi Life, les gens ne resteront ou reviendront que si des "mesures efficaces" sont prises pour développer les campagnes. "Si mes enfants décident un jour de partir, il me sera difficile de les retenir", s'inquiète Manami Suzuki à Otsuchi, qui porte encore les stigmates du tsunami de 2011. "Je n'arrive pas à imaginer comment sera cette ville dans 30 ans", souffle-t-elle.
(http://www.lepetitjournal.com/tokyo avec AFP) mercredi 10 septembre 2014

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Publié le 9 septembre 2014, mis à jour le 6 janvier 2018

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