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PORTRAIT D’EXPAT – Delphine Macquet : Suédoise convertie ?

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Publié le 10 mai 2016, mis à jour le 3 août 2016

 

Peu frileuse, Delphine Macquet, expatriée connectée et studieuse, a transformé sa méconnaissance de la Suède en une quête de tous les instants. Portrait d'une fine observatrice des cultures et des langues.

Arrivée à Stockholm avec son mari et ses deux filles il y a un an, Delphine Macquet s'amuse du cliché de la femme d'expat' et part, frondeuse, à la découverte d'un pays dont elle ne connait rien. En sillonnant les rues de la capitale à l'automne, la trentenaire hyperactive s'imprègne des noms de rue, des enseignes et des différents quartiers. De déambulations en démarches, elle se prépare aux cours intensifs de suédois qu'elle va bientôt suivre à Folkuniversitet. Les niveaux s'enchainent et voilà Delphine arrivée au seuil du fameux B2, portée par une volonté forte de pouvoir communiquer au quotidien. « Je me suis vite sentie frustrée de ne pouvoir répondre quand on me posait des questions au supermarché ou dans des situations de la vie quotidienne où la communication orale est requise ». Organisée, elle suit les cours du matin puis potasse l'après-midi, et n'hésite jamais à s'essayer à des phrases toujours plus élaborées en classe. Cette élève modèle fait feu de tout bois et répond aux emails en suédois en demandant à ce qu'on lui indique ses erreurs pour progresser.

Aujourd'hui capable de converser dans la langue de Strindberg pendant un déjeuner entier, Delphine émaille son français d'expressions suédoises typiques, sans même s'en rendre compte. « Je pratique dès que je peux, en lisant les courriers, en regardant des séries sous-titrées en suédois comme Bron ou Äkta människor ». Passage obligé pour les parents d'enfants en bas âge : Princesse Sofia, où l'injonction häxa (jeter un sort) est si redondante qu'elle fait désormais partie du vocabulaire suédois de la famille. « Ma petite dernière commence à parler suédois en classe. Je suis restée bouche-bée quand la maitresse me l'a annoncé ». Ou quand culture et langue s'immiscent au sein d'un quotidien tout d'abord très français et désormais mâtiné de Suède. « C'est très agréable de progresser dans la langue car tout se débloque avec autrui. Lorsqu'on fait l'effort d'essayer, on a l'impression que l'on devient ?l'un des leurs?. Aujourd'hui, je me sens moins stupide. » Le week-end, la famille explore la banlieue de Stockholm ou s'offre quelques jours plus loin, en pleine nature. « Cet été, nous avons été en vacances à Gotland, comme les Suédois, et cet hiver, nous nous rendrons en Thaïlande? en bons Suédois. »

Réinventer sa vie professionnelle

Anciennement « Market intelligence Manager » pour un groupe américain en banlieue parisienne, Delphine décide de ne pas perdre la main à son arrivée en Suède. Elle rédige des comptes rendus de toutes les conférences auxquelles elle assiste et se renseigne sur le coaching. « J'ai commencé une formation à distance avec une semaine par mois à Paris. Dès janvier, je vais avoir des rapports de coaching à rendre et je co-coacherai une personne de ma classe ». La jeune femme complète ces nouveaux acquis avec un module de gestion des talents au CNAM et un séminaire sur le droit du travail suédois. De quoi obtenir un diplôme niveau BAC+5 fin juin 2016 et décrocher ses premiers clients en septembre.

« Je souhaiterais m'orienter sur les relations interculturelles mais dans l'acceptation la plus large du terme ?culture? (nationale, générationnelle, professionnelle) en entreprise et dans le cadre de mobilités, ainsi que sur les coachings individuels notamment de transition. Je trouve essentiel de ne pas dire ?Les Suédois sont comme ci ou comme ça? et de développer sa compréhension de sa propre culture pour aborder l'autre culture à l'aune de ces réflexions. Le pays où l'on se trouve n'est pas un problème en soi, il faut surtout s'interroger sur les limites et les priorités de la personne que l'on coache. Une fois ses besoins définis, on peut passer au mentorat, c'est-à-dire à l'accompagnement dans la recherche des ressources et à l'aide à l'embauche. »

De différences en concordances

Et c'est une nouvelle fois grâce à son approche passionnée de la langue et sa curiosité envers une culture « pleine de différences où le clivage est plus difficile à identifier qu'en Chine, par exemple » que Delphine peut envisager cette reconversion sereinement. « Ici, les différences sont plus larvées, j'ai parfois du mal à dire ce que je ne comprends pas. Au final, la Suède n'est pas si proche de nous que ça. Partir à la découverte des Suédois et de leur langue m'a permis de mieux comprendre les silences et les réactions, même si le flegme de la population m'irrite encore parfois. De plus, le fait de ne jamais recevoir de refus clair est quelque chose de difficile à accepter pour moi. J'ai l'impression que la Suède abrite un peuple en constante opposition ; tout est extrêmement réglementé mais il existe des situations dans lesquelles les règles volent en éclat. »

Des différences culturelles qui continuent de questionner Delphine au quotidien et qu'elle observe avec intérêt pour mieux guider ses futurs clients. « En Suède, tout doit être lagom. Par exemple, je ne trouve pas que les Suédois soient individualistes, comme on l'entend souvent ; Ils mettent surtout l'accent sur leur temps personnel et, de fait, respectent celui des autres, notamment dans le travail. Et puis, pour les enfants, c'est un pays génial. Mon ainée n'est jamais revenue de l'école en se plaignant de moqueries quant à ses difficultés en suédois. Il y a toujours quelqu'un pour la prendre sous son aile. »

Avec l'espoir de rester en Suède encore plusieurs années et l'ambition de poursuivre sur une autre expatriation, Delphine Macquet s'est bel et bien fait une place dans son pays d'accueil et n'a ? surtout ? jamais dévié de son objectif de départ : « Avoir une activité intellectuelle en propre pour contrer le blues du statut de femme d'expat' ressenti à l'arrivée. Aujourd'hui, quand on nous demande ce que nous faisons en Suède, je laisse mon mari répondre pour lui et j'explique mon propre projet. Se remettre en question est un projet en soi ! ».

Crédits photo : famille Macquet

La rédaction lepetitjournal.com/stockholm Lundi 19 octobre 2015

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