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CULTURE - Symphonie transatlantique à Konserthuset

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Publié le 2 juin 2017, mis à jour le 2 juin 2017

 

 

Amériques d'Edgar Varèse est un chef d'?uvre essentiel de la musique du XXème siècle. Jeudi 1er et samedi 3 juin, l'Orchestre Philharmonique Royal de Stockholm présente cette ?uvre, une des plus difficiles techniquement à mettre en place de l'époque moderne. La rédaction s'est rendue à la Konserthuset hier soir. Récit d'une soirée sublime. 

Au programme pour accompagner l'oeuvre de Varèse : le Concerto pour violon n.1 de Chostakovitch, compositeur soviétique qui envoûta le Nouveau Monde, et la Symphonie d'instruments à vent de Stravinsky, qui passa la seconde moitié de sa vie à New York. En présentant le temps d'une soirée ces trois compositeurs, il ne pouvait en être autrement: le concert était placé sous le signe du romantisme. Mais point question ici de musique fleur bleue, mais plutôt de l'exacerbation moderne de toutes les émotions et de tous les sentiments constitutifs de l'Humain. Frustration, peur, force, amertume, grandeur, tristesse et soulagement ne sont que quelques-unes des étapes du voyage que proposait jeudi soir l'Orchestre Philharmonique Royal de Stockholm.

Merveilleuse Alina

 

Le concert s'ouvre sur le Concerto pour violon n.1 de Dmitri Chostakovitch. Et quelle ouverture ! Le dramatisme et la force de l'?uvre, magnifiquement interprétée par l'orchestre dirigé de main de maître par le Finlandais Sakari Oramo, font vibrer les malleus et dresser les poils des bras. Le morceau d'environ trente-cinq minutes est un véritable marathon pour le soliste et demande une virtuosité hors pair. La jeune violoniste russe Alina Ibraguimova, enveloppée dans son élégant cocon de soie violine, relève le défi sans sourciller. Mieux : alors que l'audience retient son souffle, c'est comme touchée par une grâce sauvage qu'elle joue des tensions et des dissonances, marchant telle une funambule sur la fine corde de la justesse. Tremblante de fatigue et l'archet désintégré, elle achève le morceau sous une longue ovation debout du public stockholmois. Rare et Inoubliable.

Après une courte pause nécessaire pour se remettre du flot d'émotions, seule une partie de l'orchestre est de retour sur scène. Il s'agit de la section des vents. Reculés au fond de la scène, ils interprètent la Symphonie d'instruments à vent d'Igor Stravinsky. L'oeuvre-hommage au compositeur français Claude Debussy est l'articulation parfaite entre la première partie du concert et Amériques d'Edgar Varèse. Malgré sa complexité, l'?uvre de celui dont le Sacre de Printemps inspira le chef d'?uvre de Varèse permet de faire redescendre la tension, et la douceur des vents agit comme une virgule suave.

Enfin est venu le climax de la soirée. La totalité de l'orchestre investit à nouveau la scène pour jouer le cultissime Amériques d'Edgar Varèse.

L'?uvre est jouée pour la première fois à Konserthuset et ses représentations sont rares. En cause: la difficulté à réunir tous les éléments impératifs à son exécution. Outre la sirène d'alarme et le fouet que le compositeur aimait à expérimenter au sein d'orchestres romantiques, ce n'est pas moins de trente percussionnistes qu'exige la partition originale!

La relation entre le compositeur français et Stockholm ne date pas d'hier. C'est en effet dans la capitale suédoise qu'Edgar Varèse avait créé, juste après une première à Paris et avant une tournée américaine, son ?uvre Déserts pour orchestre et bandes magnétiques.

Précurseur durant toute sa vie, celui qui composa son premier opéra à douze ans n'avait de cesse de mêler les dernières avancées technologiques à ses partitions, devenant ainsi un pionnier de la musique électroacoustique.

Welcome to New York

Amériques est la première ?uvre composée par Varèse après son arrivée aux Etats-Unis en 1915. Le morceau, qui n'est pas sans rappeler les musiques des films muets de la Fox et de la Goldwyn de la même époque, est si visuel qu'il est possible d'entrevoir çà et là les grands boulevards new-yorkais, les voitures rapides, et le bouillonnement parfois stressant de la grosse pomme qui, trente ans auparavant, inspirait déjà Dvo?ák et sa Symphonie Du Nouveau Monde.

Les polyphonies complexes et les acrobaties rythmiques sont finement ciselées par l'impressionnant orchestre. Plus d'une centaine d'âmes musiciennes communient pour exécuter avec précision et brio une des ?uvres modernes les plus importantes.

L'occasion de découvrir ou redécouvrir cette pièce magistrale dans d'aussi bonnes conditions ne devrait pas apparaître aussitôt. Par chance, il reste quelques places pour la représentation de samedi 3 juin à 15h!

 


 

Notez que Stockholm entend rendre la culture accessible au plus grand nombre et notamment aux jeunes. Pour celles et ceux de moins de 26 ans, le tarif est réduit de 50%. Les étudiants aussi peuvent obtenir une réduction sur leur billet, leur permettant ainsi de bénéficier de très bonnes places et d'aller plus souvent au concert. On retrouve ce type de réductions dans d'autres institutions culturelles de la ville telles que Dramaten, Kulturhuset ou l'Opéra Royal, n'hésitez pas à vous renseigner !  

Informations Pratiques :

Amériques à Konserthuset (Hötorget) :

Samedi 3 juin 2017, 15h, entre 200 et 375kr (plein tarif)

Benjamin Jung et Sarah Chabane (lepetitjournal.com/stockholm), 2 juin 2017

photos © Jan-Olav Wedin

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