Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 0

DECOUVERTE – Sur la trace des voiliers traditionnels indonésiens

Écrit par Lepetitjournal Singapour
Publié le 9 septembre 2011, mis à jour le 14 novembre 2012

A environ 176 km de Makassar, en Indonésie, se trouve le village de Bontobahari où depuis des générations les habitants construisent les bateaux traditionnels en bois appelés, Pinisi

Bontobahari, situé dans le sous-district de Bulukumba, en Sulawesi du Sud est également surnommé "Butta Panritta Lopi" " territoire des constructeurs de bateaux ou de navires" en raison des chantiers navals traditionnels : "Bantilang" qui bordent ses côtes. Depuis des générations, les habitants de ce petit coin d'Indonésie, encore préservé du tourisme de masse, se transmettent leur savoir faire en matière de fabrication des bateaux traditionnels en bois : les pinisis.

Le pinisi, un voilier chargé d'histoire
Depuis toujours, les mers de l'archipel indonésien ont été des voies naturelles de migration, de communication et de commerce. Il est à rappeler que c'est grâce à la navigation et au commerce que de nombreux peuples vivant dans les quelques 17.000 îles de l'archipel ont pu être unifiés et découverts. C'est au cours du 19e siècle que les marins de Sulawesi commencèrent à combiner les bateaux tanjaq rectangulaires avec des bateaux venus d'Europe et d'Amérique qu'ils pouvaient voir naviguer sur les mers de l'archipel. Le résultat est le bateau que l'on connaît aujourd'hui sous le nom de pinisi.
Le premier authentique pinisi de Sulawesi fut ainsi construit vers 1900 pour le compte d'un capitaine originaire du village de Bira, dans le sous district de Bulukumba.
Véritables bateaux marchands dont seul le capitaine disposait d'une petite cabine alors que l'équipage dormait sur le pont, il faudra attendre les années 70 pour que plusieurs milliers de pinisis forment la plus grande flotte marchande du monde, connectant entre elles les îles de l'archipel indonésien. Équipés à l'origine de deux mâts et de 7 voiles,  le mât d'artimon, à de nos jours, disparu au détriment d'une cabine et d'un moteur.
Ces nouveaux bateaux sont en général plus petits (35 mètres) conçus pour la croisière touristique et sont même destinés aux marchés russes et norvégiens préservant ainsi la tradition maritime de ces pays et devenant l'icône des voiliers en Indonésie et dans le monde entier.

Diaporama photo A.H.Sharm et credit photo Welenreng

Porteur de valeurs ancestrales quotidiennes
La construction d'un pinisi suit toujours des rites particuliers  liés à la croyance Bugis, l'un des groupes ethniques de Sulawesi du Sud. Avant chaque étape, l'équipe chargée de la construction du navire composée du "Punggawa", le chef-constructeur,  des autres experts les "Sawi" et les apprentis "Calon Sawi" entretiennent les traditions et valeurs transmises depuis des  générations.  
Tout débute lors de la recherche du bois qui s'effectue au 5eme et 7eme jour du mois de la construction. Selon les croyances des habitants de Bontobahari ces numéros sont porteurs de chance. En effet, le chiffre 5 - "naparilimai dalle'na" - signifie que la fortune est à portée de main (comme les cinq doigts sur une main tendue), tandis que le chiffre 7 - "natujuangngi dalle'na" - signifie que la fortune arrive toujours.
Avant d'abattre l'arbre Welengreng - espèce difficile à trouver et  plus résistants à l'eau que le teck qui  était utilisé auparavant pour la structure - le chef-constructeur dirige le rite de sacrifice du coq au profit du départ du génie de l'arbre de sorte que ce dernier ne perturbe pas son abattage à l'aide d'outils traditionnels.
Il est à noter qu'aucuns clous ne sont utilisés dans sa construction, seules les chevilles en bois sont permises et un bois de qualité, des arbres suffisamment grands sont la base de la construction d'un pinisi qui peut mesurer plus de 50 mètres.
Avant la mise à l'eau, le rite de sacrifice d'une chèvre ou d'un bœuf marque la fin des travaux de fabrication. Cette  mise à l'eau se faisant lorsque l'eau monte à midi et dure en général plusieurs jours, des prières l'accompagnant. L'assemblage des voiles marquera la fin de la construction près de 6 mois après.

Les traditions séculaires de la communauté locale  tendent malheureusement à disparaitre, jugés trop surnaturelles ; toutefois sans cette cohésion de groupe et l'esprit d'entraide qui anime les "Bantilang", le pinisi ne pourrait être construit. La beauté de ces voiliers s'exprimant bien entendu dans leur forme et dans la finesse du travail effectuée. Une vraie richesse qui continuera à perdurer au fil du temps…

A.H. Sharm (www.lepetitjournal.com-Singapour) vendredi 9 septembre 2011


logofbsingapour
Publié le 9 septembre 2011, mis à jour le 14 novembre 2012

Sujets du moment

Flash infos