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ENTRETIEN – Olivier Baube, directeur de l’AFP de Rome

Écrit par Lepetitjournal Rome
Publié le 21 juillet 2016, mis à jour le 22 juillet 2016

 A.F.P. : trois lettres qui font rêver plus d'un apprenti journaliste. A Rome, la célèbre Agence France Presse est implantée depuis 60 ans. A sa tête : un homme, Olivier Baube. Arrivédans la capitale italienne il y a tout juste 2 ans, mais journaliste depuis toujours, il nous a reçu au bureau de Rome pour partager avec nous son expérience.

 

Derrière une lourde porte émeraude se cache un grand bureau partagé par trois journalistes affairés. Deux écrans de télévisions font défiler en boucle les mêmes images barrées d'un bandeau rouge et blanc, caractéristiques des chaînes d'info en continu. A peine installé, Olivier Baube se connecte sur Twitter : « Maintenant, ça fonctionne presque comme une agence de presse » assure-t-il. Armé de deux écrans, le journaliste jongle entre les plateformes, les coups de fils, tantôt en italien, tantôt en anglais. La Dolce Vita, ça sera pour plus tard. 

 

Lepetitjournal.com : Pourriez-vous vous revenir sur votre parcours ?

Olivier Baube : J'ai une formation en sciences politiques mais je n'ai pas fait d'école de journalisme. Je suis d'une génération où il était encore vaguement possible d'être journaliste sans faire d'école. Et je ne me voyais pas faire autre chose que journaliste.

J'ai commencé par envoyer deux cent demandes de stage à tout ce qui pouvait exister comme média. J'ai été accepté au Nouvel Economiste, puis je suis passé par Le Point. Au bout de plusieurs stages, je ne trouvais pas de poste alors j'ai décidé de partir. J'ai pris un billet d'avion pour l'Afrique du Sud sans rien y connaître. Là-bas, j'ai travaillé un peu pour l'AFP. Aucun journaliste n'avait le droit d'y aller, à cause de l'Apartheid, moi j'y suis allé avec un visa de touriste et j'y suis resté un an. J'ai continué en tant que pigiste et je suis finalement entré à l'AFP en 1987.

 

Lepetitjournal.com : Qu'est-ce qui vous a amené jusqu'à Rome ?

OB : J'étais déjà venu à Rome il y a 20 ans et je connaissais un peu l'Italie. Mais l'expatriation c'est aussi un projet familial, il faut des destinations qui aient un sens pour tout le monde. C'est ce qui fait la complexité de la chose maintenant.

 

Lepetitjournal.com : Comment se compose la journée d'un agencier AFP ?

OB : On arrive au bureau vers 8h, on commence par regarder nos mails, les nouvelles venant des agences locales et des journaux. On a des évènements attendus : aujourd'hui [le 7 juillet 2016 NDLR], le verdict dans l'affaire Vatileaks et le premier conseil municipal de Virginia Raggi. Pour les Vatileaks il nous faut appeler un expert en droit pour comprendre ce qui peut se passer après le verdict car on ne peut pas écrire n'importe quoi. Les gens nous font confiance donc en principe, si l'AFP le dit, c'est que c'est vrai. C'est notre marque de fabrique : on doit donner de l'information fiable, vérifiée, objective, claire et rapide. Imaginons qu'à la télévision un bandeau apparait disant « le Pape est mort ». Qu'est-ce que je fais ? La démission de Benoit XVI est arrivée un peu près comme ça, personne ne s'y attendait. Brutalement, le Pape a démissionné, ce qui ressemble à une blague. Le premier réflexe c'est donc se jeter sur le téléphone pour appeler le porte-parole du Vatican et lui demander des explications.

 

Lepetitjournal.com : Imaginions que vous avez l'exclusivité sur une information ?

OB : Avant c'était simple, la source de l'information c'était nous, les agences de presse. Il n'y avait personne d'autre. Aujourd'hui s'il y a un attentat à Fiumicino, ce n'est pas moi qui vais le savoir en premier. C'est la personne qui est là-bas et qui va le tweeter. Ce qui fait encore la différence c'est qu'un tweet n'est pas parole d'évangile. Si l'AFP donne une information, on considère qu'elle a été vérifiée. Etre le premier c'est quasiment impossible aujourd'hui. Par contre on doit être très réactif. S'il se passe quelque chose, il faut multiplier les angles.

 

Lepetitjournal.com : Quelle personnalité italienne vous a le plus marqué ?

OB : Je suis Matteo Renzi avec un certain intérêt. Je trouve que c'est un personnage intéressant au niveau politique. Il est un peu atypique, c'est un personnage controversé mais intéressant, qui veut faire bouger les choses. Après on peut discuter éternellement sur le fait qu'il le fasse vraiment. Je suis curieux de voir comment ça va se terminer.

 

Lepetitjournal.com : Voyez-vous des différences entre le France et l'Italie dans la manière de traiter l'information ?

OB : Ici, les journaux se passionnent pour la politique, beaucoup plus qu'en France. Ils ont des armées de journalistes politiques et se régalent de la moindre petite polémique. Les journaux sont beaucoup plus fournis et complets, c'est aussi un peu difficile à lire quelquefois car c'est souvent un peu verbeux. La presse italienne n'est pas en très bonne santé mais elle résiste mieux que la presse française : il y a plus de titres, les tirages sont plus gros, même s'ils perdent tous les ans des lecteurs. Ils sont comme tout le monde, les gens lisent de moins en moins de papier. Le modèle économique n'est pas encore au point car la baisse du papier n'est pas compensée par l'augmentation du digital. La presse est en perte de vitesse partout et le produit phare de l'AFP c'est le texte, or le texte rapporte de moins en moins parce que de nombreuses personnes considèrent l'information comme gratuite.

Propos recueillis par Manon Botticelli (Lepetitjournal.com de Rome- Vendredi 22 juillet 2016

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Publié le 21 juillet 2016, mis à jour le 22 juillet 2016

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