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PORTRAIT DE CARIOCA – L’art a “sauvé la vie“ de Fabio Fragozo

Écrit par Lepetitjournal Rio de Janeiro
Publié le 18 juin 2015, mis à jour le 6 janvier 2018

 

En vous promenant le long de la plage d'Ipanema, vous avez peut être déjà croisé ses ?uvres. Il est difficile de ne pas s'arrêter quelques instants, le temps d'observer plus en détails son travail : des ?uvres pleines de couleurs, de vie, de joie. Ces ?uvres sont à l'image de son peintre, Fabio Fragozo. Un peintre à qui le pinceau a changé la vie. Lepetitjournal.com a pu le rencontrer.

Fabio Fragozo a aujourd'hui 34 ans. Depuis l'âge de 23 ans, il est artiste peintre. Il se rappelle parfaitement son entrée dans la vie d'artiste puisque l'art lui a changé la vie. Fabio a grandi dans l'une des fameuses favelas de Rio de Janeiro, la ?Cidade de Deus?, dépeinte dans Le film La cité de Dieu de Fernando Meireilles comme étant un univers pauvre et violent. Aujourd'hui, le fonctionnement dans cette favela a évolué depuis la pacification en 2009. Le trafic de drogue est toujours présent, mais les armes ne sont plus aussi présentes qu'avant. Avant la pacification, il était normal de croiser des trafiquants de drogue armés. De fait, particulièrement à cette époque, être un adolescent, dans une favela où le trafic de drogue était une chose commune, n'était pas une chose facile.

Avant la peinture, une adolescence difficile

Un peu perdu, ne sachant que faire de sa vie, n'ayant pas de projets particuliers et par manque d'opportunités, il passait la plupart de son temps chez son voisin, Ney, à fumer de la marijuana. Mais, tous les jours, à une certaine heure, Ney, âgé de

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six ans de plus que lui, devait quitter son domicile pour peindre et aller vendre ses ?uvres. Un jour, son voisin lui dis: ?Tiens, prend le pinceau et peint?. Fabio, très surpris réponds: ?Mais tu es fou, toi, je ne sais pas peindre, moi ! Non, je ne vais pas prendre ton pinceau !?. Le seul dessin qu'il savait faire était un bonhomme, comme tous les enfants. Cette idée de peindre lui a tout de même occupé l'esprit pendant quelques heures jusqu'au lendemain: ?D'accord, je vais prendre ton pinceau et je vais peindre?. Son premier tableau représentait une plage d'Ilha Grande, une île à 150 kilomètres de Rio de Janeiro. Ney ayant pour habitude de vendre ses tableaux sur un marché de Copacabana, il a exposé le tableau de Fabio pour tenter de le vendre. De retour à la favela, Ney a tendu un billet de 20 reais à  Fabio pour la vente de son tableau. Fabio, stupéfait, a donc repris le pinceau et s'est remis à peindre. Mais, cette fois-ci, il a peint deux tableaux. Le voisin revient le jour suivant avec 40 reais. Fabio a commencé à croire en lui et a réalisé qu'il avait finalement, peut-être, des chances de s'en sortir. Le jeune homme est allé à l'école jusqu'à l'âge de 15 ans. Faiblement diplômé, un casier judiciaire pas vierge, il a compris que la meilleure voie pour s'en sortir serait à travers la peinture et non à travers le trafic de drogue.

Une vie plus confortable

Cela fait maintenant dix ans que Fabio est régulièrement présent sur la plage d'Ipanema. Un casque sur les oreilles pour écouter de la samba ou de la bossa nova, il est face à ses tableaux, vendus entre 50 et 2000 reais. Sur sa gauche, les passants. Sur sa droite, la plage. Il s'y situe du lundi au vendredi face à la rue Farme de amoedo entre les postes 8 et 9, de onze heures à seize heures, heure à laquelle il va chercher sa fille de cinq ans, Cécilia. Fabio lui a déjà transmis sa passion pour la peinture et ?elle adore?. Serait-ce une future artiste ? Parallèlement, le peintre fait également parti d'un projet, Alegria da favela visant à transmettre sa passion pour la peinture aux enfants des favelas. Il souhaiterait ainsi que la peinture change leurs vies, comme cela s'est passé pour lui.

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Le fait de sortir de cet univers, lui a fait connaitre un autre monde. Désormais, pour lui, ?dehors, tout est différent mais je n'en avais pas conscience avant. L'art m'a sauvé la vie?. Fabio est devenu une autre personne. Il n'habite plus dans la favela, mais à côté, avec sa femme et sa petite fille et a pu se payer un appartement plus confortable, dans une résidence avec piscine. Il est resté ami avec ses anciens amis dont Ney, son ancien voisin. Avant, il mettait quatre heures de bus pour aller jusqu'à Ipanema et revenir, mais maintenant, il a sa voiture. Ipanema l'inspire, il a davantage d'espace et il apprécie quand les passants s'arrêtent pour complimenter son travail ou simplement en faisant un signe du pouce pour dire ?Muito bem, parabéns? (Très bien, félicitations). D'ailleurs, Fabio n'oublie pas l'une des rencontres qui lui a permis de faire une exposition en Belgique. En effet, un jour, une Paulista est tombée sous le charme de ses tableaux. Etant donné qu'elle en a acheté plus d'un, Fabio s'est déplacé jusqu'à l'hôtel pour lui transporter. Et, à ce même moment, Fabio a fait la connaissance d'une famille espagnole qui a également admiré ses tableaux et lui a finalement proposé de faire une exposition en Belgique et de rendre visite à ses amis qu'il a pu connaitre par le biais de son travail sur la plage d'Ipanema, à Londres, Paris, Barcelone, Madrid?. Il a pu connaitre les plus célèbres musées d'arts présents en Europe. Fabio ne pensait pas pouvoir un jour prendre l'avion et encore moins aller si loin.

Les tableaux de Fabio sont ainsi le résultat d'un mélange entre la plage, le beau temps, les rencontres, l'océan, la musique et ? ?les jolies filles qui passent?.

Léa MOUGEOLLE (www.lepetitjournal.com ? Brésil) vendredi 19 juin 2015

lepetitjournal.com Rio
Publié le 18 juin 2015, mis à jour le 6 janvier 2018

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