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PASCALE FABART ET CRISTINA PEREIRA - "Solidariedade França-Brasil est le fruit d’un travail commun de 30 ans"

Écrit par Lepetitjournal Rio de Janeiro
Publié le 16 mai 2016, mis à jour le 19 mai 2016

Association de référence à Rio menée par une équipe franco-brésilienne depuis 1986, Solidariedade França-Brasil (SFB) commémore cette année ses 30 ans. Trente années de défense des droits des enfants des quartiers défavorisés de la banlieue de Rio. Lepetitjournal.com vous propose ainsi une semaine spéciale SFB avec trois entretiens. Le premier concernant la gestion de l'ONG avec Pascale Fabart, la directrice, et Cristina Pereira, l'une des fondatrices.

Lepetitjournal.com : Le but de SFB était de créer une ONG solidaire entre la France et le Brésil et depuis 30 ans, elle a accompli de nombreuses actions avec succès. Comment avez-vous réussi à coordonner votre culture et regard français sur des problématiques propres au Brésil? 
Pascale Fabart :
SFB est le fruit d'un travail commun tout au long de ces 30 dernières années, de l'engagement de nombreuses personnes réunies pour l'amélioration de la société brésilienne. C'est aussi une histoire d'amitié de 30 ans entre la France et le Brésil et aujourd'hui, je me sens partie intégrante de cette construction collective. Lorsque j'ai découvert Rio, je me suis heurtée à une réalité sociale violente, inacceptable. Certes, en France les inégalités existent, mais elles ne sont pas aussi criantes, notamment en ce qui concerne l'éducation et la santé. C'est pourquoi je me suis lancée corps et âme dans cette aventure. Je suis allée sur le terrain, j'ai vu la force de caractère de ces femmes qui travaillent notamment dans les crèches communautaires pour la petite enfance. J'ai vu leur lutte pour défier la précarité de leur quartier. Pour améliorer les conditions de santé des familles, pour garantir aux enfants et adolescents une éducation de qualité et des conditions de vie dignes. Leur courage me donne à apprendre et à penser.En fait, j'ai découvert un pays aux multiples facettes : tout en nuances, avec des problématiques différentes d'une région à l'autre. J'ai pu me rendre compte de la chance que nous avons en France d'avoir un système éducatif et de santé justes, le même pour tous et qui fonctionne. En travaillant chez SFB, j'ai appris également à mieux comprendre le fonctionnement des institutions brésiliennes. J'ai découvert par exemple que la société civile brésilienne peut s'organiser comme partenaire à part entière dans la définition et la mise en ?uvre des politiques sociales publiques, contrairement à la France où les institutions dotées de prérogatives et délégations de compétences précises couvrent tous les champs de l'éducation et de la santé. Pour cette raison, l'une des lignes d'actions de SFB est justement de renforcer l'incidence de la société civile sur les politiques publiques liées à l'enfance et à l'adolescence.

Depuis ses débuts, SFB a élargi ses champs d'action (formation, santé...), comment les problématiques rencontrées dans les communautés de la baixada fluminense ont-elles évolué au fil des ans ? 
Cristina Pereira :
SFB a toujours été une institution travaillant sur la dure réalité d'une manière proche et solidaire. Nous étions des jeunes avec de la sensibilité, du talent et une disponibilité mis au service d'un désir profond de changement de cette réalité. Je pense que c'est la différence que l'on a apporté, ne pas être seulement des formateurs mais aussi solidaires des groupes dont nous nous occupions, par rapport aux fonctionnaires de la mairie et des autres institutions qui ne faisaient pas cela. C'est avec fierté que je vois aujourd'hui tous les progrès apportés dans les communautés de la banlieue de Rio. Des crèches gérées en partenariat avec la mairie, des agents de santé reconnus, des éducateurs formés avec des diplômes acquis durement, de beaux espaces communautaires et, enfin, beaucoup de bonnes actions réalisées ces trente dernières années qui se poursuivront grâce à l'effort, le soutien, le travail et surtout la solidarité de tous ceux qui participent au sein de cette grande institution.
Pascale Fabart :
Pour moi, la problématique est la même depuis le début : améliorer l'accès et la qualité de la prise en charge des enfants en éducation et en santé. Certes, depuis 30 ans, on observe des avancées significatives. Par exemple, il y a 30 ans, la petite enfance (0 à 5 ans) ne faisait pas partie des lignes directrices du plan national d'éducation. Aujourd'hui, l'accueil des enfants 0 à 5 ans dans des structures éducatives est déjà encadré par des lois. Mais ces avancées ne sont pas encore suffisantes. Aujourd'hui au Brésil, les droits des enfants en santé et en éducation ne sont pas encore pleinement garantis et ceci est d'autant plus criant dans les quartiers défavorisés. Par contre, si la problématique reste la même, ce qui a changé c'est la manière dont SFB y répond et les stratégies mises en place. Au début, les projets développés par SFB tournaient essentiellement autour de la construction de crèches communautaires. Ensuite, une nouvelle ambition s'est imposée. Il ne suffisait plus de bâtir des crèches, il fallait aussi accompagner la formation de leurs responsables sur différents thèmes : hygiène, nutrition, pédagogie, organisation administrative, etc. Il était de plus fondamental que chaque structure puisse être autonome notamment d'un point de vue financier. Ainsi, avec les membres des communautés, nous avons cherché les appuis locaux les plus pertinents et pérennes, par exemple auprès des services publics, à travers notamment la signature d'accords de subventions entre les mairies et les crèches. Aujourd'hui, SFB a élargi son champ d'action. Nous continuons à développer des projets auprès des éducateurs des centres communautaires tout en élargissant la formation aux professeurs des écoles publiques (programme droit à l'éducation). En santé, nous continuons notre travail de promotion et de prévention auprès des familles et des communautés défavorisées et développons des projets de formation des professionnels de la santé de la famille (programme droit à la santé). Enfin, nous intervenons également au niveau de la définition des politiques publiques, car nous nous sommes rendus compte que pour avoir un impact effectif en défense des droits des enfants, il ne suffit pas de travailler à la pointe auprès des professionnels de la petite enfance en santé ou en éducation, mais il faut également intervenir au niveau des politiques publiques liées á l'enfance, c'est le troisième volet de notre action (programme mobilisation pour les droits).

SFB est aujourd'hui une référence dans son secteur, soutenue par de grandes institutions et entreprises, et pourtant, sa pérennité est aussi une mission que l'on imagine difficile. Comment la menez-vous ? 
Cristina Pereira :
A l'époque, nous disions que SFB devait travailler pour ne plus être nécessaire dans le futur. C'était notre

utopie dans le sens d'Eduardo Galeano du terme. Ce serait fantastique si nous n'avions plus besoin d'institutions comme SFB, luttant pour des droits évidents et qui aident à améliorer notre réalité. Mais nous sommes loin de cela? Ainsi, SFB doit poursuivre son travail d'excellence et mettre le talent de son équipe au service de la recherche de financement. SFB a toujours innové avec ses idées, travaillant pour trouver des solutions à des problèmes que beaucoup pensaient compliqués à résoudre dans les domaines de la construction, de la santé, de la formation, de la recherche de partenariats?
Pascale Fabart : SFB fête aujourd'hui ses 30 ans, donc la question de la pérennité de notre institution est un point essentielle. Je pense que cette pérennité passe par une dimension financière, mais pas uniquement. Certes, SFB compte depuis 30 ans sur le soutien de partenaires, entreprises, fondations, instituts ou associations nationales et internationales. Ce travail de recherche de fonds est un travail de longue haleine, où tout est remis à plat chaque année. C'est une mission difficile, surtout en temps de crise, que nous menons en partenariat avec les membres de notre Conseil d'administration, qui sont bénévoles et très fortement investis. SFB compte également sur des donateurs privés et des levées de fonds à travers l'organisation d'événements institutionnels. Par ailleurs, SFB a toujours cultivé un lien étroit avec les institutions françaises. Déjà, il y a 30 ans, l'association comptait sur le soutien de l'ambassade de France au Brésil. Nous avons également eu à plusieurs reprises le soutien du ministère des Affaires étrangères, et c'est le cas à nouveau en 2016. Enfin, nous comptons également aujourd'hui sur le soutien fondamental du consulat général de France à Rio et de la Chambre de commerce France-Brésil. Mais la pérennité de SFB passe également par son éthique, le sérieux du travail réalisé, l'expertise d'une équipe dédiée et la cohérence des actions menées au fil des années. Nos différentiels de travail comme notre propre méthodologie ou le fait de systématiquement développer nos projets à partir d'initiatives, demandes et potentialités de la population locale sont des dimensions également de cette pérennité. Sans parler de la transparence, qui est pour nous une priorité absolue. Ainsi, tous les ans, nous réalisons un audit externe de nos comptes.

Propos recueillis par Corentin CHAUVEL (www.lepetitjournal.com - Brésil) mardi 17 mai 2016

*Photos : Cristina Pereira et Pascale Fabart (photo 1) / Cristina Pereira (photo 2)

- Voir le site de Solidariedade França Brasil

Deux conférences de Roland Villard au bénéfice de SFB

Le chef français interviendra lors de deux événements à La Maison du consulat général de France à Rio (voir notre agenda) :

- Jeudi à 19h sur l'"histoire de la gastronomie française"

- Jeudi 25 octobre à 19h sur l'"influence de la culture brésilienne dans la gastronomie française"

Le tarif est de 50 reais pour chaque conférence ou 80 reais pour les deux. Tous les bénéfices seront reversés à SFB.

lepetitjournal.com Rio
Publié le 16 mai 2016, mis à jour le 19 mai 2016

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