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REPORTAGE – A Ipanema, l’opération "Toplessaço" vire à l’événement voyeuriste

Écrit par Lepetitjournal Rio de Janeiro
Publié le 22 décembre 2013, mis à jour le 23 décembre 2013

Plus de 9.000 femmes avaient confirmé leur présence sur les réseaux sociaux à la manifestation pour réclamer l'autorisation du topless sur les plages brésiliennes. Mais seules une dizaine d'entre elles ont osé tirer le haut de leur maillot de bain samedi matin à Ipanema, face à plus de cent journalistes, photographes et "curieux", presque tous masculins. Lepetitjournal.com a assisté à ce triste spectacle.

Une demi-heure avant le début de l'opération "Toplessaço", fixée samedi à 10 h au niveau de la rue Joana Angélica à Ipanema, le flop semble déjà imminent. Assis autour des tables en plastique ou regroupés entre confrères sur le terre-plein central de l'avenue Vieira Souto, une vingtaine d'hommes, photographes et journalistes, règlent leurs appareils et scrutent avec attention les femmes passant à proximité du kiosque.

Si certaines ont prévu de participer à l'événement, aucune ne s'arrête. Un cycliste passe et lance à haute voix une blague sur le topless, déclenchant une salve de rires. Trois hommes, affublés de perruques et de faux seins en plastique, viennent se trémousser sur un air de musique brega. Les cinq femmes journalistes présentes discutent entre elles, un peu à l'écart.

"Enlève-le, enlève-le"
A 11h, aucune participante du "Toplessaço" ne s'est encore manifestée. La jeune femme de 23 ans à l'origine de l'événement, Ana Rios, arrive finalement à midi, accompagnée d'amis. D'autres femmes les rejoignent sur la plage et se font rapidement encercler par les photographes et journalistes, qui sont désormais une cinquantaine.

Si trois d'entre elles tirent sans hésiter leur haut de maillot de bain et prennent la pose, tout sourire, d'autres hésitent

avant de se lancer. Les badauds s'agglutinent et sortent leurs portables pour grappiller quelques images de seins nus. Un père, hilare, fait signe à son fils adolescent de s'approcher. D'autres crient "Enlève-le, enlève-le", à l'attention de celles qui ont gardé leur maillot. Les femmes aux seins nus conservent leur calme et leur lancent des regards dédaigneux. 

"Mon corps n'est pas à vendre"
"Mon corps, mes droits", "La liberté offense ?", "Mon corps n'est pas à vendre", les slogans peints sur les poitrines découvertes dénoncent l'hypocrisie autour du topless, considéré comme un délit par la loi qui le définit comme un acte "obscène".

"Il y a trente ans, le topless était déjà vu comme quelque chose d'immoral. Si une ou deux femmes essayaient de faire du topless, les réactions étaient même parfois violentes, certains leur jetaient du sable", se souvient Eduardo, venu soutenir le mouvement. "C'est pour ça que je suis là, pour protester contre des mentalités faussement moralistes et ancrées dans le passé", ajoute-t-il. Comme Eduardo, quelques hommes sont venus témoigner leur soutien aux participantes du Toplessaço. Cinq amis bombent leur torse, sur lesquels de faux seins sont dessinés à la peinture rouge.

"Nous ne nous attendions pas à ce spectacle"

"Tout ce 'cirque médiatique' nous conforte dans notre action : nous ne sommes pas des objets, nous ne nous résumons pas à une poitrine et des fesses. Et pourtant, c'est exactement la sensation que j'ai en ce moment-même", confesse Ana Rios, qui se refuse à considérer la manifestation comme un échec.

Face à la foule qui se presse autour des femmes en topless, un couple de participants a du mal à cacher son désarroi : "L'approche des journalistes et des photographes a été très agressive et a découragé des femmes de participer. Le corps de la femme est de nouveau vu comme un objet et ce n'était pas notre objectif. Nous ne nous attendions pas à ce spectacle, mais finalement, c'était peut-être inévitable et cela nous montre le chemin qu'il nous reste à parcourir pour que le topless ne soit plus vu comme quelque chose de tabou."

Morgann JEZEQUEL (www.lepetitjournal.com - Brésil) lundi 23 décembre 2013

lepetitjournal.com Rio
Publié le 22 décembre 2013, mis à jour le 23 décembre 2013

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