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DELPHINE MOULIN - "Les événements tests sont très importants pour la préparation des Jeux Olympiques de Rio"

Écrit par Lepetitjournal Rio de Janeiro
Publié le 12 novembre 2015, mis à jour le 13 novembre 2015

On trouve plusieurs Français au sein du Comité organisateur des Jeux Olympiques de Rio. Parmi eux, Delphine Moulin, venue apporter son expérience glanée ces dernières années au sein du Comité international olympique (CIO) pour diriger l'organisation des épreuves tests. Lepetitjournal.com s'est entretenue avec l'ancienne sportive.

Lepetitjournal.com : Pouvez-vous nous raconter votre parcours, éminemment sportif ?
Delphine Moulin :
En effet, je suis sportive depuis le plus jeune âge. J'ai atteint un niveau national en golf, tennis et volley-ball. J'ai ainsi rapidement voulu travailler dans les événements sportifs, notamment les Jeux Olympiques. Cela a commencé par les championnats du monde d'athlétisme en 2003 à Paris avant que je n'intègre le CIO à Lausanne où je m'occupais de la coordination des Jeux d'hiver puis des projets spéciaux. J'ai travaillé sur quatre éditions. En 2007, j'ai quitté le CIO pour monter ma propre structure de management d'événements, dans la culture et surtout le sport, aidant notamment les candidatures (Annecy 2018), les fédérations, les organisateurs? Enfin, après dix ans dans le métier, j'ai voulu partir ailleurs, me poser, arrêter de voyager, et la ville qui me tentait était Rio. Ici, j'ai commencé par travailler pour le cabinet du président du Comité Rio 2016 avant de prendre en charge il y a environ deux ans et demi les événements tests. Ce n'est pas un projet très connu, mais il est très important pour la préparation des Jeux.

En quoi consistent justement ces événements tests ?
C'est une obligation de tester toutes les disciplines olympiques, mais nous nous étions engagés à tester également les disciplines paralympiques, pour être prêt le jour J. En priorité, on teste l'aire de compétition (sport, résultats, gestion des athlètes). On n'a pas le droit à l'erreur sur cette partie-là. Au total, je suis chargée de 45 événements tests. Il y en avait plus au départ, mais nous avons dû optimiser pour des contraintes budgétaires et opérationnelles. C'est déjà un programme très lourd sur 10 mois. Parmi ces événements, il y en a cinq sur lesquels on va tout tester (sécurité, transports, spectateurs, etc.) : aviron, hippisme, que l'on a déjà organisé cet été (hiver brésilien), et à venir, le plongeon, la gymnastique et l'athlétisme paralympique.

Douze événements tests ont déjà eu lieu, un premier bilan ?
Pour moi, c'était déjà un grand défi parce que ces événements étaient les plus complexes car en extérieur : il y a la

dépendance climatique, l'intégration dans la ville (fermeture de routes, communication?), etc. Tout le comité est passé en mode opérationnel, et c'est un grand succès parce qu'en dehors du BMX où il y a eu des problèmes avec la piste, tous les événements ont été délivrés, se sont bien passés et on a eu de bons retours. On a appris beaucoup de ce qu'il faut faire ou refaire, c'est d'ailleurs le but de ces tests : se tromper pour faire mieux. Puis on a réussi à engager la population, notamment sur le triathlon et le cyclisme, où il y a eu un engouement local, sans oublier notre engagement dans des projets d'éducation avec les écoles et les communautés. Désormais, on va appliquer toutes ces leçons pour les prochains événements à venir.

Y a?t-il eu des épreuves sur lesquelles de grands changements devront être apportés, l'épreuve de nage en eau libre avait été critiquée par l'athlète française notamment ?
Il y a des ajustements, par exemple la qualité des routes, la gestion des flux de spectateurs, ou la piste de BMX à revoir. Il y a aussi l'appréhension des espaces : on ne teste pas de la même façon le site de Deodoro et celui de Copacabana par exemple. Quant à la nage en eau libre, entre le premier et le deuxième jour, on a ajusté les zones de départ et d'arrivée qui étaient beaucoup trop proches du bord. Le premier jour, il y a eu beaucoup de vagues, mais c'était justement intéressant de voir comment cela se passait dans ces conditions. Toutes ces situations, ces problèmes, font que c'est comme cela que l'apprend. 

La pollution de l'eau de la Lagoa et de la baie de Guanabara a beaucoup fait parler, mais les athlètes ne s'en sont pas plaints, cela a dû vous rassurer ?
En effet, on a eu des retours positifs des athlètes donc c'est rassurant. On connaît la qualité de l'eau et les problèmes, mais cela n'empêche pas que la compétition en tant que telle se soit bien déroulée et que les athlètes soient contents. Pour la voile, ils ont cette chance de naviguer en ville, avec un panorama incroyable et un terrain de jeu intéressant en termes de compétition en raison du vent, des courants, etc.

Il y a sept événements tests à venir en cette fin d'année, pour la plupart au Riocentro, comment s'annoncent-ils ?
Les problématiques d'organisation sont différentes. Ce sont surtout des événements indoor et dans un lieu comme le Riocentro qui a un concessionnaire, donc on passe d'un partenaire public à Copacabana, la ville de Rio, à un partenaire privé. Puis, en fin d'année, on va ouvrir le parc olympique de Barra avec le tennis, ce qui va être intéressant, tout comme le canoë slalom à Deodoro, avec un nombre d'athlètes important ou encore la boxe au Riocentro avec une retransmission télévisuelle. Aujourd'hui, nous sommes beaucoup plus rôdés. Puis en 2016, on commencera à tester les sites en fin de construction donc les problématiques seront encore différentes.

Près de la moitié de la première série d'événements tests était fermée au public, les prochains seront-ils plus ouverts ?
Pas vraiment, nous sommes encore dans une phase d'optimisation où on teste ce qui doit être testé. Pour certains événements où il y aura la télévision, il y aura quelques spectateurs avec une politique d'engagement plus que de véritable billetterie. En effet, la gestion des spectateurs amène une complexité que nous ne pouvons pas gérer pour ces événements. Autrement, les championnats organisés par les fédérations internationales (par exemple la natation ou l'athlétisme) proposeront eux une ouverture au public.      

Le Comité organisateur est finalement très international, c'est indispensable pour un tel événement ?
Je pense en effet que c'est important qu'il y ait des personnes qui connaissent les Jeux pour apporter leur expérience. Après, il faut voir comment on les implique et comment est leur position dans l'organisation locale, leur compréhension de la culture. En fonction des pays, il faut vraiment bien penser à cette intégration. Parce qu'il faut transmettre, c'est essentiel, mais il faut avoir une logique de contribution et ne pas arriver en disant par exemple : "A Londres, c'était comme cela alors il faut faire les choses comme cela". Pour ma part, j'ai aussi beaucoup appris de la culture brésilienne.

Ressentez-vous un engouement croissant des Cariocas pour les Jeux Olympiques ?
Même si la presse internationale ne parle pas trop des événements tests, je trouve qu'il y a quand même un engouement grâce à la large couverture des médias brésiliens qui font notamment découvrir les sports moins connus dans le pays. Mais je pense que les Brésiliens se mettront à s'intéresser aux Jeux l'année prochaine. Aujourd'hui, les Cariocas savent au moins ce que sont les événements tests et la marque Aquece Rio, donc c'est un bon signe.

Les membres du Comité national olympique et sportif français étaient très positifs au sujet des infrastructures sportives, mais ont émis des inquiétudes quant aux transports, quel est votre sentiment ?
La difficulté du transport, c'est la configuration de la ville, mais des mesures vont être prises pour que cela fonctionne. Je ne suis pas très inquiète, dans le sens où la circulation sera limitée et qu'il y aura les lignes olympiques. Près de 2.500 athlètes sont déjà venus pour les tests et on a eu que des retours positifs de leur part, avec une envie de revenir, ils ont eu une belle expérience.

Et après ces événements tests, quelle sera votre mission durant les Jeux Olympiques et Paralympiques ?
Je ne sais pas encore. Là, je suis très focalisée sur mon projet que je termine en mai. Il y a des choses qui me plaisent, on verra en fonction de l'évolution de l'organisation.

Vous étiez venue à Rio pour vous installer, donc vous resterez après les Jeux Olympiques ?
Pour moi, c'était avant tout un choix d'expérience de vie plutôt que de travail, je ne compte pas aller à Tokyo par exemple (pour les JO 2020, ndr). C'est compliqué de comprendre un nouveau pays et sa culture? J'aimerais bien continuer à travailler dans le domaine, mais différemment, et je pense que je vais retourner en Europe après cinq ans d'expérience ici.

Enfin, vous aviez travaillé sur la candidature d'Annecy aux Jeux d'hiver 2018, que pensez-vous de celle de Paris 2024 ?
Je pense qu'il y a des chances car l'équipe est de qualité, j'ai l'impression qu'il y a une bonne intégration au niveau de tous les acteurs sportifs et politiques, ce qui est le plus important. La question qui revient pour moi est toujours la même : pourquoi on veut les Jeux et qu'est-ce qu'on veut en faire ? Je pense notamment qu'on n'avait pas répondu à cette question pour Paris 2012 et pour Annecy, ou en tout cas, les partenaires n'avaient pas la même vision. Sans ligne de conduite, message clair et objectif, c'est trop complexe à organiser. Mais en tout cas, je suis confiante et je serais contente que Paris ait les Jeux.

Propos recueillis par Corentin CHAUVEL (www.lepetitjournal.com - Brésil) vendredi 13 novembre 2015

- Voir le calendrier des événements tests de Rio 2016

Les bonnes adresses de Delphine Moulin à Rio

"En termes de bistrots, j'aime le CT Boucherie à Leblon, le Oui Oui à Botafogo, le Volta au Jardin Botanique. J'aime bien prendre mon brunch à l'Emporio Jardim dans le même quartier, ou dîner à Horto, dans tous ces petits restaurants comme le Jojô Café. Et boire une bière sur la mureta de Urca.

Au niveau culturel, j'adore passer du temps à l'Instituto Moreira Salles (Gavea), pour voir les petites expositions et manger une tarte sur la terrasse, et tous les lieux conçus par Oscar Niemeyer, dont le MAC, à Niteroi. Je trouve aussi la nouvelle Praça Maua vraiment intéressante, le monastère de São Bento pour se laisser bercer par les chants grégoriens, la Fabrica Bhering qui lance une approche culturelle à Rio.

Côté sportif, on a la chance que la nature soit dans la ville, j'aime bien marcher, faire les randonnées sur les hauteurs qui offrent des vues incroyables. J'aime aussi faire du bateau dans la baie, ou encore courir toutes les semaines autour de la Lagoa. Enfin, j'aimais bien surfer à Grumari ou Prainha. Maintenant, j'amène la planche sur la plage et je m'y repose?"

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Publié le 12 novembre 2015, mis à jour le 13 novembre 2015

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