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WOMEN AND WATER – Relever le défi de l'eau potable avec Sarah Hauser

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Jianca Lazarus
Écrit par Clotilde Richalet
Publié le 17 janvier 2021, mis à jour le 27 avril 2021

Women and Water est un projet humanitaire sur une idée originale de la windsurfeuse calédonienne Sarah Hauser et en association avec Beyond the surface International et Changing Tides Foundation. L’idée principale de Sarah et de son associée Emi Koch est de travailler avec la communauté locale de Lobitos au Pérou, sur le problème de pénurie d’eau dans le village, et de relever les défis de l'eau potable, de l'assainissement et de l'hygiène ; main dans la main avec les femmes du village.  

 

La genèse du projet

En 2018 Sarah Hauser était en compétition sur l’International Windsurfing Tour qui allait s’arrêter au Pérou. Sarah avait envie d’allier sa passion pour le sport à une action humanitaire qui aurait un impact positif sur la population locale.

Avant d’arriver au Pérou, elle organise donc une levée de fond à travers le surf-oil : une pratique sportive sur une planche de surf qui lévite au-dessus de l’eau. Elle trouve une plateforme qui permet aux gens de faire un don équivalent à un pari. Par exemple :  donner 1 euros par seconde passée sur la plus longue vague. C’était une façon ludique de récolter des fonds, et cela combinait sa passion pour les sports d’eau, et son envie d’agir pour une cause qui aiderait les gens.

 

woman and water
Photo : Michelle Park Senyard

 

C’est grâce à des connaissances travaillant pour l’association Changing Tides Foundation, que Sarah entend parler de Beyond the Surface International et rencontre Emi Koch qui travaille à Lobitos au Pérou depuis des années. Les discussions par appels sur Skype s’enchainent et les 2 femmes décident de travailler ensemble sur un nouveau projet.

Il faudra l’énergie et la volonté de toutes les personnes de ces associations réunies pour que le projet Women and Water aboutisse.  

 

Le site de Lobitos

Lobitos est un village du littoral nord du Pérou. Aujourd’hui un petit village de pêcheurs, il a autrefois été occupé par les Anglais, son paysage est principalement composé d’extracteurs et de plate-forme pétrolières.

 

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Photo : Jianca Lazarus

 

En 1968, le gouvernement dirigé par l'armée péruvienne prend le contrôle de l’exploitation pétrolière et en 2008 le gouvernement militaire est renversé. L'armée se retire et démantèle  toutes les infrastructures restantes, y compris l'usine de dessalinisation installée par les entreprises qui approvisionnaient la communauté locale en eau potable. Aujourd'hui laissé « à sec » dans le désert, Lobitos reçoit un approvisionnement limité et instable d'eau non filtrée pompée chaque semaine dans la ville. Le double problème de Lobitos est que non seulement il n’y a pas d’eau potable, mais étant donné que l’eau arrive du village voisin : l’eau n’est même pas toujours acheminée.

Si l’on rajoute à cela que pendant les grosses pluies les robinets peuvent être endommagés, que la corruption locale tend à acheminer l’eau vers les hôtels plutôt que vers les habitations locales… on peut dire que la situation est plus que précaire.

 

La naissance de Women and Water :

C’est donc après avoir pris connaissance de cette situation et après de nombreux brain-stormings, que Sarah et Emi se fixent 2 axes principaux pour leur action avec Women and Water  :

avoir un impact positif sur la communauté à travers l’installation d’un système d’acheminement d’eau potable

inciter les femmes de la communauté à prendre des initiatives et faire grandir en elles un sentiment de leadership pour accomplir des changements positifs pour leur communauté

 

Les résultats :

Installation de 10 filtres purificateurs d’eau en 2018  et de 25 en 2019

1 désalinisateur d’eau en cours d’acheminement

des workshops artistiques pour développer la responsabilité et créativité des enfants du village aux causes environnementales liés à l’océan

des prises de conscience par des dizaines des jeunes femmes que leur avenir est entre leurs mains via le « women empowerment ».

Le tout dans la bonne humeur! 

 

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Photo : Michelle Park Senyard

 

COAST TO COAST  - Changing Tides Foundation  - BEYOND THE SURFACE INTERNATIONAL 

Women and Water est le résultat d’un travail de groupe et d’un effort commun entre passionnés venant de différentes associations. Voici leurs actions plus en détail.

En 2018 l’association a installé 10 purificateurs d’eau au village. Ces filtres purificateurs d’eau s'installent sur les robinets :  cuisine ou salle de bain.

 

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Photo : Michelle Park Senyard

 

Ces 10 premiers filtres ont été distribués de manière stratégique et communautaire.

« Ce n'est pas le tout d’amener des filtres là-bas, il faut aussi que la communauté leur fasse confiance. Quand l'habitude est que l'eau soit du poison: comment assimiler qu’en faisant passer l’eau dans un petit filtre d’à peine 10 cm tu peux maintenant la boire quand on te tend un verre d’eau ! Même nous on avait un peu peur ! » m’explique Sarah.

Mais encore une fois, tout est question de confiance avec la communauté.

 

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Photo : Michelle Park Senyard

 

Fondé avec Nicolás Landa, un vidéaste de Lima, l’association Coast to Coast est engagée dans la justice sociale et la production documentaire. Grâce à des ateliers audiovisuels participatifs, l’association permet aux enfants du village de développer des compétences techniques et créatives à travers l’image. L’association travaille sur le concept du workshop avec des enfants : leur apprendre le storytelling, la photographie et la vidéo. Ça leur donne les moyens de raconter leurs propres histoires. Sarah m'explique: 

On met souvent des mots dans la bouche de ces enfants (avec de bonnes intentions) mais c'est aussi important de leur donner un moyen de communiquer et de raconter eux-mêmes leurs difficultés et leurs visions du monde, avec leurs propres mots. Et pour ça la photographie est un outil magique.

Les appareils photos en mains, les enfants vont réaliser leurs propres images, et essayer de représenter ce que l’eau signifie pour eux.

 

education humanitaire feminisme
Photo : Michelle Park Senyard

 

education humanitaire feminisme
Photo : Jianca Lazarus

 

Grâce à ces liens et à cette confiance que Sarah et Emi ont établi avec la communauté, elles peuvent travailler main dans la main avec la population.  

C'est une expérience extrêmement enrichissante pour nous. C'est un échange, une passion qui se partage.

m'explique Sarah. 

 

Women empowerment

 

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Photo : Jianca Lazarus

 

Il existe également l’action de Waves International qui est une « non profit » organisation composée des volontaires qui viennent donner des cours de surf gratuitement aux enfants les plus démunis de la communauté. Mais habituellement ce sont souvent les garçons qui en profitent. Ils sont ceux qui ont le droit de sortir de la maison plus facilement, les parents étant très protecteurs de leurs filles.

Avec Women and Water Sarah a voulu changer cela, et elle a organisé des sorties surf avec les filles. Ici encore l’importance de la confiance entre l’association et la communauté a été primordiale. Sarah a fait du porte-à-porte avec de petites affiches qu’elle distribuait ou affichait dans les rues du village. Elle a essayé de gagner la confiance des parents pour qu'ils leur laissent prendre leurs filles pendant une journée.

Elle me raconte leur première sortie:

« Notre première expérience a été intense et magnifique avec de grands moments d'émotion en emmenant les filles surfer pour la première fois. Les filles avaient des questions sur quoi porter ?  Garder ou non ses vêtements sous la combinaison, où de se changer ? Être seulement entre femmes et pouvoir danser et rire ensemble était magique. Pouvoir discuter et répondre à leurs questions avant de les amener surfer sans qu'il y ait la présence des garçons : on a réussi à créer un endroit où elle pouvait s'exprimer librement. Où elle pouvaient essayer de surfer, tomber, pleurer, se réconforter, se remettre debout, c'était magique de les observer et de les accompagner. Certaines pensaient ne jamais pouvoir prendre une vague de leur vie, et on leur a donné le sentiment que rien n’est impossible, qu’avec un peu d’entre-aide et de courage : tout est possible. »

 

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Photo : Jianca Lazarus

 

Ce fut également pour Sarah l’occasion de faire une projection de son film ‘Girl on Wave’. Elle a pu répondre à des questions des filles et leur expliquer comment créer son propre chemin quand on a des rêves.

Sur ce sujet Sarah m’explique tout en finesse : 

C'est tout un équilibre, c'est toute une danse de créer cette inspiration sans pour autant être hors de portée, parce que l'on vient de mondes complètement différents.

 

Le retour et l’évolution en 2019

Lors de leur retour à Lobitos en 2019 avec Changing Tides foundation, c’est 25 filtres qui ont pu être installés. Les workshops ont continué et de 10 participantes en 2018 elles sont passées à 30 en 2019.

Sarah se souvient d’un moment particulièrement touchant :

Ce moment où nous avons traversé les rues de Lobitos avec les planches de surf, avec toutes ces femmes en combinaison qui riaient ; on était fières ! C'était vraiment une invasion féminine dans les rues de la ville et c'était magique.

En 2019 elles ont pu communiquer avec la maire de Lobitos, qui est aujourd’hui une femme, et elles ont obtenu l'accord et levé les fonds pour construire un désalinisateur à Lobitos !

Cette machine de désalement à énergie solaire sera capable de produire 10.500 litres d'eau potable par jour au cours des 10 prochaines années et sera gérée par le groupe de femmes.

Quel accomplissement pour Women and Water de passer de 10 filtres à 25, et maintenant de construire ce désalinisateur.

Tout a été ralenti en 2020 à cause de la pandémie de Covid-19, mais les projets sont toujours en cours et viables. Sarah est optimiste sur le futur des actions menées :

« L’idée est d’organiser un Festival annuellement, d’une durée d’environ 2 semaines, pendant lequel on organiserait ces mêmes activités. Et que le reste de l'année soit ponctué par les workshops, pour pouvoir identifier de futurs leaders qui sur place pourront aider à perpétuer le programme. »

 

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Photo : Jianca Lazarus

 

Le futur

Sarah veut continuer à développer Women and Water, à soutenir et motiver la prochaine génération.

« Je me sens vraiment dans une deuxième phase de ma carrière, où j'ai envie de partager ; que ce soit avec WOMEN AND WATER, ou avec mon activité de fitness trainer avec NC6. Je suis passionnée par le mouvement je veux partager ce que j'ai appris à travers les années. »

Le travail avec WOMEN AND WATER est loin d’être fini m’explique Sarah, puisque pour entretenir le désalinisateur il faudra une équipe et il faudra mettre en place la régulation et le partage dans la communauté.

 

Le mot de la fin est pour Sarah :

« Le rêve est que ces actions provoquent un cercle vertueux ; que ces opportunités ne soient pas seulement des idéaux mais que l'on montre à ces jeunes femmes comment prendre les choses en main.

Qui sait elles deviendront peut-être sauveteur en mer ou prof de surf, des métiers auxquels elles n’auraient même pas pensé auparavant!

Tout ça au fond c’est pour leur offrir des opportunités : WOMEN AND WATER c’est croire en son destin. »

 

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Photo : Jianca Lazarus

 

Ci-dessous les liens des différentes associations citées dans l'article: 

https://www.hauserlifestyle.com/

https://www.coast2coastmovement.com/womenandwater

https://www.beyondthesurfaceinternational.org/

https://www.changingtidesfoundation.org/

 

Clotilde richalet
Publié le 17 janvier 2021, mis à jour le 27 avril 2021

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