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Elsa Fayner, revue XXI “Si l’histoire est bien racontée, ça fait l’effet d’une série”

elsa fayner XXIelsa fayner XXI
Crédit portrait : Elodie Ratsimbazafy
Écrit par Natacha Marbot
Publié le 15 mai 2023, mis à jour le 6 juin 2023

Des reportages à dévorer comme des romans.” Voilà l’ambitieuse promesse de la revue XXI, qui au rythme des saisons amène ses lecteurs et lectrices dans des reportages et des enquêtes plus étonnantes les unes que les autres. À l’autre bout du monde ou en bas de chez soi, il n’y a pas de petite aventure. À l’occasion du renouvellement de l’équipe éditoriale, la rédaction a rencontré Elsa Fayner, nouvelle rédactrice en chef de la revue. 
 

Comment votre parcours vous a-t-il amenée à XXI ? 

Journaliste depuis 2003, j’ai longtemps été pigiste, en freelance, car j’aime l’indépendance. En mars 2022, XXI m’a contactée pour me proposer une mission ponctuelle : créer une collection de livres. Puis la situation a évolué, l’équipe a changé et on m’a proposé de reprendre la rédaction en chef. XXI est une revue que je connais bien, je la lis depuis ses débuts. 

Après tout un travail de consultation des lecteurs, nous avons décidé d’une nouvelle mouture de XXI, en gardant l’ADN : les histoires vraies et le plaisir de lecture. C’est une revue totale, qui allie textes, dessins, photographies et maintenant même le son, avec le lancement des podcasts. 


À l'ère de l’info rapide, est-ce difficile d’accrocher les lecteurs sur des formats longs ?  

Si l’histoire est bonne et surtout bien racontée, ça fait le même effet qu’une série qu’on regarde avant de se coucher que qu’on arrive pas à arrêter. Les grandes sagas type Ken Follett ont beaucoup de succès, les gens aiment les formats longs quand ils sont happés. C’est à nous de faire en sorte que les articles soient passionnants du début à la fin. Ça implique peut-être de faire évoluer l’écriture aussi, ce qui était passionnant en 2012 n’est pas la même chose qu’en 2023 ou qu’en 2042. 

 

Qu’est-ce qui a changé ? 

Beaucoup de choses ! Notamment l’arrivée des smartphones, de Netflix, des séries. Quand XXI a été lancé (ndlr: en 2008), il n’y avait pas de revue pareille, avec des longs formats, c’était nouveau. Aujourd’hui ça l’est moins, alors il faut se renouveler. Je crois beaucoup au renouveau par le biais de la forme de l’écriture. J’ai envie d’explorer l’écriture poétique, théâtrale même ! De l’écriture à la première personne, à la deuxième, voire même en chorale. Nous incitons alors les journalistes à “se lâcher” sur la forme, ce sont presque des exercices littéraires. 

 

Quelles sont les valeurs véhiculées par XXI ? 

Les valeurs évoluent avec les équipes, aujourd’hui nous sommes trois et je pense que les valeurs dépendent de nos envies, nos personnalités, nos obsessions et nos rencontres. Ce qui nous guide, c’est l’envie d’être étonnés, de surprendre et d’étonner. Ce ne sont pas tant des valeurs qu’une démarche. XXI est vendu en librairie quatre fois par an à 19€, donc l’enjeu n’est pas le même que pour la presse classique. Nous devons trouver les tendances de fond, anticiper, chercher les angles morts et aller sur place, prendre le temps. Je souhaite que XXI soit un carrefour de pensées, de générations. Pour moi, il n’y a rien de plus politique, engagé et radical que le questionnement.  

 

Comment faire vivre un média sans publicité aujourd’hui ? 

XXI n’appartient à aucun grand groupe - mais à un petit groupe qui rassemble la Revue dessinée, Topo, 6 mois et XXI. Nous ne vendons pas de publicité, et ne tenons que grâce aux lecteurs. Nous avons eu des difficultés pendant le Covid, XXI a publié 3 numéros qui sont restés sur des étagères car les librairies étaient fermées. Or chaque numéro coûte très cher à produire, donc l’entreprise a souscrit à un emprunt à l’Etat, et le prix du papier a augmenté de 50% en un an. C’est difficile pour une PME comme la nôtre. Nous avons d’ailleurs lancé une campagne de financement participatif car nous menons beaucoup de projets de front : une collection de livres, des podcasts et bientôt un site internet avec nos archives.