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Marceau, jeune Français à vélo en Inde : "J'ai mis 15 jours à m'adapter à la chaleur"

Le vélo de Marceau et Marceau avec une famille indienneLe vélo de Marceau et Marceau avec une famille indienne
Écrit par lepetitjournal.com Bombay
Publié le 12 mai 2023, mis à jour le 19 décembre 2023

Marceau est un jeune Français qui traverse l’Inde à vélo du nord au sud. Il a débuté son voyage à la fin du mois de mars 2023 à Kanyakumari, à l’extrême sud du pays et roule actuellement sur les routes du Rajasthan pour rejoindre Delhi. Son voyage de plusieurs milliers de kilomètres pendant la saison chaude est à la fois sportif, spirituel et solidaire. Marceau pédale pour la bonne cause, il récolte des fonds pour l’association Karuna-Shechen, créée en 2000 par le moine bouddhiste Matthieu Ricard. 

Nous avions déjà présenté Marceau et son projet avant son départ. La rédaction l’a rencontré lors de son passage à Bombay, voici ses impressions à environ mi parcours.
 

lepetitjournal.com : Bonjour Marceau et bravo pour cette première partie de ton voyage, tu as déjà parcouru combien de kilomètres ?

Marceau : Aujourd’hui, c’est le 29ème jour de mon voyage et j'ai parcouru environ 1500 km depuis Kanyakumari jusqu’à Chiplun dans le sud du Maharashtra sur mon vélo. 

Hier matin, j’ai décidé de prendre le train pour effectuer les 250 km restants jusqu'à Mumbai pour arriver avant le 1er mai dans le centre de méditation Global Vipassana Pagoda de Gorai, au nord de Mumbai. Aller méditer dans ce centre est une des raisons principales de mon voyage, comme je l'avais expliqué lors de l'interview précédente. Or j’ai appris il y a quelques jours que le centre est déjà complet le weekend prochain. Du coup, j’en profite pour visiter Bombay ce weekend et je partirai demain soir au centre de méditation où j'espère rester jusqu'au 5 mai.

 

Le centre de méditation Global Vipassana Pagoda près de Mumbai
Le centre de méditation Global Vipassana Pagoda près de Mumbai

 

Peux-tu nous parler de cette première partie du voyage jusqu’à Bombay sur ton vélo ? Quelles ont été les bonnes surprises ? Quels furent les obstacles les plus difficiles à surmonter ?

Commençons par les points positifs !

La bonne surprise, même si je le savais déjà un peu, c’est la bienveillance et la gentillesse des Indiens et la facilité de faire certaines choses. A plusieurs reprises, j’ai été accueilli gratuitement ou pour un prix très réduit chez des habitants, certains m’ont fait visiter leur village juste pour le plaisir de me le faire découvrir, un autre a réparé mon vélo avec les moyens du bord… Ils ne sont pas tous comme cela, bien sûr, mais dans la majorité des cas, mes nuits chez l’habitant se sont bien passées et j'ai été très bien accueilli.

 

Une autre facette de l’Inde que je connaissais un peu de mes voyages précédents, mais qui est apparue au grand jour cette fois-ci, est le fait que rien ne se passe jamais comme on l’a imaginé dans ce pays.

Par exemple, dans le Kerala, j’ai rencontré un jeune qui avait une entreprise de confection pour hommes. On a sympathisé et il m’a demandé si j’accepterais de faire des photos pour la promotion de ses vêtements. Je me suis retrouvé dans un studio de photographe professionnel à poser en pleine chaleur pendant trois heures, c'était pesant mais je l’ai fait volontiers parce que je voyais bien que cela lui faisait plaisir. Et à la fin, il m’a remercié et m’a annoncé que j’allais être partout dans le Kerala ! Jamais je n’aurais pensé que je figurerais sur des panneaux publicitaires en Inde !

 

Marceau posant pour un shooting d'une marque du Kerala
Marceau posant pour un shooting d'une marque du Kerala



En termes d’obstacles, c’est bien sûr la chaleur qui a été la plus grosse difficulté du voyage et ce n'est pas étonnant ! Aujourd’hui, la chaleur, je l'ai vaincue, physiquement et moralement ! 

 

La circulation, plus particulièrement dans le Kerala, a été aussi une des difficultés. Le plus dangereux sur la route, ce sont les bus locaux qui sont les spécialistes des queues de poisson et un bus qui te fait une queue de poisson c'est "flippant". Dans le Kerala, cela arrivait plus de dix fois par jour !

Les quinze premiers jours, j'ai souffert de maux de tête tous les après-midis et je profitais de mon voyage seulement les jours où je ne pédalais pas. 

J'avais prévu de me déplacer sur un rythme de deux jours de vélo suivi d’un jour de repos. Mais, les quatre premiers jours, je me reposais un jour sur deux parce que la fatigue était trop intense. J'ai dû chercher un équilibre pour ne pas souffrir de la chaleur et du stress du à la circulation et il m'a fallu quelques jours pour comprendre qu'il fallait partir dès que le jour se lève, soit vers 6 heures le matin et m’arrêter avant 13 heures.

 

coucher de soleil dans le Karnataka

 

 

Après avoir quitté le Kerala, tout allait beaucoup mieux, il y avait moins de dangers sur la route, moins d'humidité. Au bout de quinze jours, je m'étais adapté à la température et au vélo (j'étais parti sans entraînement) et je n'avais plus d'obstacles physiques à surmonter. Mais je ne profitais toujours pas de mon voyage, il y avait quelque chose qui manquait.

C’est seulement après m'être arrêté à Gokarna, un endroit assez touristique du Karnataka, que je me suis rendu compte que je m’étais créé des automatismes pour me protéger de la chaleur et de ses conséquences. Mais, même si je n’en avais plus autant besoin puisque mon corps et mon esprit s'étaient habitués aux conditions climatiques, je continuais à me forcer à partir le plus tôt possible pour arriver avant midi sans prendre le temps de m'arrêter ou de flâner si j'en avais envie.

 

Au 17ème jour, quand j'ai réalisé que j'avais plus ou moins vaincu la chaleur, j'ai enfin commencé à apprécier mes journées et c'est le 19ème jour que tout s'est vraiment mis en place et le voyage est devenu fluide.

 

As-tu eu des phases de découragement, de doute ?

Dès mon arrivée à Kochi, j'ai pris le train jusqu'à Kanyakumari, à la pointe sud de l'Inde, et j’ai été profondément choqué par l’extrême misère qui y régnait et pourtant c'était déjà la troisième fois que je venais en Inde et j’avais déjà été confronté à la pauvreté. Cela m’a fait douter de mon projet et pendant 2-3 jours, j’étais à cran, en proie à des questionnements, me demandant ce que je venais faire là. 

Finalement, en avançant sur mon vélo et en me recentrant sur la journée présente et sur les 90 km à parcourir et non les 4000 km du voyage, mes frayeurs et doutes se sont estompés. De plus, j'avais toujours en tête que si jamais cela ne va vraiment pas, je peux toujours prendre un train pour rejoindre un aéroport et rentrer chez moi. Cela aurait été vexant, mais savoir que je pouvais arrêter à tout moment m’a bien aidé. 

 

Marceau après 130 km à vélo dans le Gujarat
Marceau après 130 km à vélo dans le Gujarat

 

Un des objectifs de mon voyage était justement de découvrir comment j'étais capable de gérer la difficulté physique, mais aussi la difficulté mentale. Je voulais savoir si j'étais capable de trouver l'équilibre entre ce que j'ai envie de faire, ce que je n'ai pas envie de faire mais qu'il faut que je fasse et ce que je peux ne pas faire. 

 

Est-ce que c'est dur mais ça me fait quand même plaisir de le faire ? Ou est-ce que c'est dur et je n'ai même pas envie de le faire et je le fais juste pour tenir mon objectif de départ ?

 

J'ai mis quinze jours à me rendre compte de mes attentes et à trouver cet équilibre entre le voyage solidaire à travers la levée de fonds, sportif à travers le vélo et spirituel à travers la méditation et l'introspection.

 

D'ailleurs, même si voyager en vélo est propice à l'introspection, ce n'est pas toujours facile quand il faut slalomer entre les camions, les bus et les voitures en pleine chaleur. On est plutôt en mode survie !

 

En pratique comment se déroule ton  voyage ? Où te loges-tu ? Comment parviens-tu à discuter avec les gens sur place ?

Je me loge en général chez l'habitant. J’ai mis en place une routine : quand j'arrive à destination en début d’après-midi, je me douche, je fais une petite sieste, je lave mes vêtements et je cherche un endroit pour me loger le lendemain. Puis je médite un peu et en fonction du niveau de fatigue, je fais des étirements ou du yoga et après je vais découvrir les alentours.

Par exemple, dans le Maharashtra, j'ai passé une nuit dans une exploitation de mangues qui appartient à des médecins de Mumbai, c'était un endroit superbe et j’ai appris pas mal de choses sur la culture et la vente des mangues. 

 

Marceau et une famille indienne qui l'a accueilli

 

 

Pour communiquer, c’est moins compliqué qu’on pourrait le penser. Même dans les zones rurales, il y a toujours une personne qui a fait des études, qui est de retour dans son village pour les vacances ou autre et qui parle anglais. Et les Indiens sont très intéressés par les voyageurs étrangers et encore plus par celui qui se déplace en vélo en plein été. J’apprécie de pouvoir discuter et de découvrir tous ces endroits et les gens qui y vivent.

 

 

Je ne suis pas venu pour remporter une médaille pour avoir traversé l'Inde le plus vite possible, j'ai aussi envie de me rapprocher des gens et de la culture et il faut du temps. Je suis en train de trouver mon équilibre entre le nombre de kilomètres réalisés par jour et le temps passé sur place à découvrir.


 

As-tu déjà prévu la route que tu vas prendre pour atteindre le nord de l’Inde ?

Après les cinq jours de méditation, je vais reprendre mon rythme de 80-90 km par jour et traverser le Gujarat puis le Rajasthan. Je sais que cette région est plus touristique que celles que j'ai traversées jusqu'à présent et qu'on y parle plus anglais, ce sera donc plus facile pour discuter avec les locaux et nouer des relations. D’ailleurs, j'ai déjà été contacté par une professeure d'Udaipur qui souhaite que j'intervienne dans sa classe à l'université pour parler de mon projet

Il devrait aussi y avoir plus de possibilités de séjourner chez l'habitant. Sur les derniers 400 kilomètres entre le Karnataka et le sud du Maharashtra qui sont moins touristiques que le Kerala, cela a été plus compliqué de trouver où me loger. 

 

Marceau et un Indien qu'il a rencontré sur la route

 

 

Et enfin, j’ai plus ou moins décidé de n’aller que jusqu’à Delhi, même si au départ j’avais prévu de terminer mon voyage à Srinagar dans le Cachemire. Dès le début du voyage, j’ai limité le nombre de kilomètres parcourus par jour et je suis donc en retard sur mes objectifs. M’arrêter à Delhi réduit mon voyage de 800 km environ, mais me permet de disposer de plus de temps pour me rendre à Bodh Gaya au siège de l’association Karuna Shechen, pour laquelle j’ai organisé la cagnotte. Celle-ci se terminera le jour de mon départ de Bodh Gaya.


 


Finalement, après les 5 jours de méditation dans le Global Center Vipassana à Gorai au nord de Mumbai, Marceau a décidé de prendre le train jusqu'à Surat dans le Gujarat. Puis, il est reparti sur son vélo en direction du Rajasthan. À l'heure où nous publions son interview, il a déjà parcouru plus de 2000 km depuis le début de son voyage et est arrivé à Udaipur dans le Rajasthan.


 

 

Nous allons continuer à vous tenir informés du voyage de Marceau via nos réseaux sociaux. Pour lui proposer un accueil, un bout de route ensemble à vélo ou un partenariat, vous pouvez le contacter sur son compte Instagram. Pour l’aider, vous pouvez participer à sa cagnotte et faire parler de l’association Karuna-Shechen.

 

 

 

Logo de l'association Karuna Shechen

 

 

 

 

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