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Rendez-vous artistique et harlémite avec Stéphanie Calla

Stéphanie CallaStéphanie Calla
Stéphanie Calla dans l’objectif de Will Vaultz
Écrit par Portraits de Femmes - avec le soutien de Rue du Paradis
Publié le 2 août 2019, mis à jour le 7 août 2019

Stéphanie Calla est galeriste à Harlem. Elle a grandi entre la Lorraine et la Belgique, où elle retourne chaque année pour ses vacances en famille. Cette maman de 3 garçons americano-franco-sénégalais, est arrivée aux États-Unis il y a presque 30 ans. Avant d’habiter Harlem, il a plus de deux décennies, elle a vécu en Caroline du Nord et dans le Bronx.

La vie l’a posée à Harlem et elle lui en est reconnaissante. Au début de ses années harlémites, Stéphanie travaille midtown. Rentrer chaque soir chez elle, lui donne l’impression de rentrer dans un village, calme et emprunt de respect et de solidarité : une véritable bouffée d’air. À l’époque, Harlem est différent. Le quartier n’est pas encore gentrifié et il a encore ses blessures des décennies passées. 

Proche de la communauté sénégalaise, Stéphanie est admirative des femmes afro-américaines, qui plus que les autres, doivent se battre à chaque instant. Elle apprend d’ailleurs énormément d’elles, pour qui elle a un profond respect. 

Son respect, elle le donne aussi à son nouveau quartier, tout comme son coeur. Harlem renaissance, jazz, poésie, elle vit l’histoire d’Harlem à chaque coin de rue, à chaque échange avec les plus anciens. Pas ceux qui sont là pour profiter du quartier, ceux qui en sont la mémoire, ceux qui ont vu Harlem « brûlée vive » par des années de crack, ceux qui ont envie de discuter, de raconter et de transmettre, pour peu qu’on leur donne un brin de notre attention et de notre temps.

Stéphanie fait partie de ceux qui regardent cette gentrification envahir « leur Harlem » d’un mauvais œil. Pour elle, « ce phénomène entraîne des conflits parce qu’il ne respecte pas l’histoire du quartier, la mémoire des gens ». C’est juste une accumulation de restauration d’immeubles et de constructions neuves qui égratignent l’histoire et défigurent l’architecture originelle du quartier. Des loyers qui flambent, des expatriés qui arrivent, des familles blanches américaines qui s’installent et au final, une culture afro-américaine qui se disloque, encore et toujours déconsidérée par les populations les plus aisées.

En 2007, Stéphanie achète une brownstone laquelle deviendra très vite une galerie d’art : La Maison d’Art. Expositions, conversations, spectacles, concerts, pièces de théâtre s’enchaînent au fil des mois, puis des années. Stéphanie développe sa clientèle ( politiciens, Onusiens, acteurs, écrivains... ) et son réseau d’artistes. Les locaux sont mis à l’honneur. Nombre d’artistes harlémites sont invités à exposer leur art ou à se produire dans cette Maison d’Art qui ne cesse d’attirer. Sans doute parce qu’elle a une histoire et une âme. C’est un peu comme si Stéphanie essayait, à sa manière, de freiner cette gentrification galopante. Mettre en avant des artistes afro-américains, hommes et surtout femmes, est la mission dont s’est investie Stéphanie. Les femmes du quartier sont une communauté à elles seules et elles se tiennent la main, parole d’Harlémite !

Sensible à leur cause, à leur combat et à leur courage, Stéphanie les soutient et les encourage par des expositions, des spectacles accueillis dans sa galerie, comme cette exposition qui fait parler d’elle en 2014 « In Her Skin ».

Empreinte de la culture Sénégalaise, Stéphanie raisonne en mode famille. Et La Maison d’Art est une famille ! Ce n’est pas que l’œuvre de Stéphanie, mais de tous les artistes qui sont devenus proches, puis amis, puis membres de la famille ; la famille de l’art, la famille dans toute sa diversité, la famille d’Harlem. Mais attention, Harlem l’authentique !

Stéphanie a appelé sa galerie « La Maison d’Art » mais c’est aussi la maison du bonheur. 

Rien n’est figé dans la vie, et surtout pas au-dessus de la 116e rue. Aujourd’hui, la Maison d’Art va quitter la 132e rue. Stéphanie le dit « il faut faire pousser les ailes ». Elle foisonne d’idées, toujours au service de sa communauté. Elle est impatiente de la suite, et nous aussi ! La Maison d’Art recherche sa nouvelle maison, et quand elle l’aura trouvée, nous ne manquerons pas de faire raisonner l’adresse.

Merci Stéphanie, toi aussi, tu es un peu l’âme d’Harlem !

 

Article rédigé par Rachel Scharly - rédactrice en chef de l’édition New York du Petit Journal