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HOMOPHOBIE - Malaise dans le milieu sportif

Écrit par Lepetitjournal Montreal
Publié le 11 mai 2015, mis à jour le 8 février 2018

 

Publiant un rapport, intitulé « Out on the field », sur l’homophobie au sein des milieux sportifs, 6 universités de 4 pays anglo-saxons, dont celle de Laval au Québec, ont supervisé les résultats d’un panel de 9500 personnes dont 1123 canadiens. Un nouveau pavé dans la marre, que l’on croit trop souvent tranquille en occident.

 

 

Le monde évolue mais les moeurs ont tendance à souvent prendre des trains de retard. C’est toujours le cas des homosexuels dans le monde entier. 

Selon une étude à l’initiative des organisateurs de la coupe du monde de rugby gai de Sydney « Bingham Cup Sydney 2014 » et réalisée par un panel de 7 experts universitaires de quatre pays anglo-saxons*, la situation des homosexuels n’est pas au beau fixe. Pas moins de 80% des personnes interrogées, sur un panel de 9500 personnes, affirment qu’elles ont été victimes ou témoins de comportements homophobes dans les milieux sportifs.

Un milieu qui est entendu au sens large puisque l’étude s’intéresse autant au milieu scolaire qu’aux tribunes des stades. Ainsi, 66% des sondés pensent qu’une personne homosexuelle assumée ne serait pas en sécurité en tant que spectateur d’un évènement sportif et 73% estiment que les milieux jeunes et scolaires ne sont pas sécurisants et propices au milieu LGB (lesbiennes, gays et bisexuels). 

 

Le Canada, le meilleur des moins pires

 

Inclus dans l’étude, le Canada sort bon élève d’un classement ou l’on préfèrerait ne pas apparaitre. Bien que les résultats globaux lui décernent la palme du « moins pire », le pays possède néanmoins le plus fort taux de violences physiques (21% sur un résultat global de 19%) et les plus fortes craintes au sein des classes d’éducation sportive. Malgré le rapport de consultation du groupe de travail mixte contre l’homophobie, rendu en mars 2007 au Québec, qui prévoyait une séries d’actions dans toutes les strates de la société y compris celle de l’éducation et du sport, l’égalité sociale ne semble toujours pas acquise**.

 

 " Puisque l’homosexualité n’était pas visible en soi, les athlètes gais et lesbiennes tendaient à demeurer dans le placard de peur d’être stigmatisés "  

 

En 2010, un document synthèse de la «Commission d’éthique de la science et de la technologie » évoquait encore le côté « tabou » de l’homosexualité en milieu sportif. 5 ans en arrière donc, et dans les mêmes termes, le document expliquait que « puisque l’homosexualité n’était pas visible en soi, les athlètes gais et lesbiennes tendaient à demeurer dans le placard de peur d’être stigmatisés. Les homosexuels restent dans l’ombre car le milieu sportif montre très peu d’ouverture face aux minorités sexuelles. »***

De nouvelles preuves remarquables qui démontrent que, malgré l’acceptation et la normalisation de l’homosexualité dans nos sociétés contemporaines, derrière les masques, se cachent, discriminations, violences et bassesses de langage. 

 

Une réalité bien connue

Sommes-nous réellement surpris par cette étude à l’heure où d’autres pays du monde condamnent les pratiques homosexuelles ? Sommes-nous ahuris d’apprendre que 27 % des hommes gais et 16% des lesbiennes déclarent avoir reçu des menaces verbales et que 19% des hommes gais et 9% des lesbiennes ont été physiquement attaqués ? Il serait inconvenant, voire insultant, de clamer haut et fort que la question de l’homophobie est réglée par l’application d’une loi pour le mariage par-ci, et la reconnaissance de l’adoption par-là. Etre homosexuel en 2015 n’est toujours pas une douce réalité acceptée même si les mentalités ont fait un littéral bond positif.

Le milieu sportif est un indicateur social remarquable qui a rarement été mis à l’étude. Un domaine que nous pourrions croire homogène, ouvert à tous, se révèle finalement comme un lieu d’insécurité où règne une doctrine vieille comme le monde. 

 

La norme hétérosexuelle dans le monde du sport

Miroir des comportements imprimés dans notre quotidien, le milieu sportif met en jeu les constructions du « corps homosexuel » que sous tend la norme hétérosexuelle régissant la féminité et la masculinité »****. « La norme hétérosexuelle, dominant le sport, réduit l’homosexualité masculine à une éfféminisation incompatible avec l’exigence de virilité de la pratique sportive, tout comme le soupçon de lesbianisme, qui plane souvent sur les pratiquantes de sport de haut niveau »****.

 

 

" La norme hétérosexuelle, dominant le sport, réduit l’homosexualité masculine à une "éfféminisation" incompatible avec l’exigence de virilité de la pratique sportive tout comme le soupçon de lesbianisme "

 

 

Certains gays ou lesbiennes préfèrent alors intégrer des clubs spécialisés, participant malheureusement un peu plus, à la perpétration de cette logique archaïque. Au Canada, les Gay Games et Outgames67 se développèrent pour permettre aux minorités sexuelles de pratiquer des sports de compétition sans subir de discrimination. Le choix d’une carrière en sport individuel est donc monnaie courante comme a pu l’expérimenter le lugeur olympique Canadien John Fenell. Ce sportif, qui était sorti courageusement du placard l’an passé lors des JO de Sotchi en Russie, choisit un sport individuel car cela lui empêchait de s’adapter aux inconvénients des sports collectifs. « Il y a toujours besoin de paraitre super-macho et hétérosexuel, ce qui est épuisant. Le langage et l’humour homophobes créent ce sous-entendu qui traduit que nous ne sommes pas les bienvenus » à t-il déclaré récemment.

 

Bien que l’Europe ne soit pas le sujet de ce rapport, nous sommes tous concernés et devons tirer des leçons de ce constat tristement attendu . Au même titre que de nombreux combats pour l’égalité, Il faudra encore de nombreux efforts et quelques années pour que des systèmes encrés fondent et s’évaporent dans les livres d’histoire. Le mois dernier, un club israélien dressait des drapeaux arc-en-ciel sur un terrain de foot*****… et demain ?

 

Sébastien Vergne (www.lepetitjournal.com/montreal) lundi 11 mai 2015 

 

* En partenariat avec une coalition d’organisations sportive LGBTI et mainstream incluant la fédération des jeux gay (fédération of gay games)
** « De l’égalité juridique à l’égalité sociale, vers une stratégie nationale de lutte contre l’homophobie » Commission des droits de la personne et des droit de la jeunesse du Québec, Mars 2007
*** « Le sport: entre éthique, science et technologie. La fin justifie t-elle les moyens ? » Commission de l’éthique, de la science et de la technologie du Québec, Septembre 2010
**** Quemener Nelly, « Sylvain Ferez, Le corps homosexuel en-jeu. Sociologie du sport gay et lesbien », Question de communication 2/2008 (N°14) ,p.332-333
***** Club créé par des supporters, l’Hapoël Katamon d’Israel avait dévoilé en avril dernier ses poteaux de corner contre l’homophobie.
 

Sources: 

 

° Rapports et documentation cité en astérisques

° Fondation émergence, « Parler du silence, l’homophobie dans le monde du sport », Campagne 2010

° Rapport « Out on the field » : http://www.outonthefields.com/index.html

logofbmontreal
Publié le 11 mai 2015, mis à jour le 8 février 2018

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