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RELATIONS COMMERCIALES - "Il faut changer l'image réciproque des deux pays", Guillermo Cambero

Écrit par Lepetitjournal Mexico
Publié le 6 avril 2014, mis à jour le 8 avril 2014

Guillermo Cambero est directeur d'un cabinet de conseil en commerce international à Guadalajara. C'est en tant qu'expert des questions économiques qu'il fait état de la situation des relations commerciales entre la France et le Mexique. Le thème économique sera au centre des échanges prévus entre François Hollande et Enrique Peña Nieto lors de la visite d'Etat du président français ce jeudi 10 et vendredi 11 avril.

"C'est à nous, les experts locaux, de motiver les entreprises en France ou au Mexique pour aboutir à une coopération plus étroite." Guillermo Cambero. (Photo Camille François)

Lepetitjournal.com/mexico : Les relations commerciales entre la France et le Mexique sont-elles anciennes ?

Guillermo Cambero : On peut dire qu'elles ont commencé véritablement au début du XIXème siècle, après l'indépendance du Mexique, quand les Barcelonnettes sont venus ouvrir leurs premiers commerces. Dès le XIXème siècle, de nombreux investisseurs français sont venus profiter des matières premières mexicaines et de la proximité du pays avec les Etats-Unis. Et puis le Mexique était aussi considéré comme une porte d'entrée pour le commerce en Amérique latine. Par contre pour ce qui est des Mexicains en France, nous n'avons pas de présence ancienne, c'est plutôt très récent et mineur.

Guillermo Cambero "J'ai passé 10 ans de ma vie en France"

Guillermo Cambero est venu pour la première fois en France pour étudier à l'université de Nantes, où il a obtenu un doctorat en droit avec une spécialisation en droit du commerce international. Il a été plus tard le responsable international de la Société Babin implantée à Nantes. Spécialiste des questions juridiques autour de l'entreprise, il s'occupait essentiellement des filiales en Espagne et au Maroc. Après avoir été conseiller en négoce international pour diverses sociétés européennes, Guillermo dirige aujourd'hui son propre cabinet d'avocats à Guadalajara et est associé notamment de LDG France (société spécialisée dans le commerce international des biens et des services).

Aujourd'hui, comment définir les relations commerciales entre les deux pays ?

Cela reste difficile car il y a eu quelques problèmes récents entre le Mexique et la France, notamment l'affaire Florence Cassez qui a véritablement affaibli les relations commerciales et culturelles. J'ai vu des entrepreneurs mexicains qui ne voulaient plus traiter avec des Français pour cette histoire. On ne connait pas toutes les raisons de l'affaiblissement des échanges entre les deux pays mais je dirais qu'il ne faut pas oublier que ce sont des cultures très différentes, qui se comprennent difficilement, notamment sur la manière de faire des affaires.

Quelles sont justement ces manières de faire des affaires ? Quelle est la vision des investisseurs mexicains du marché français et inversement ?

La France est loin du Mexique, les entrepreneurs mexicains ne comprennent pas la manière de faire des Français. Pour un Mexicain, c'est difficile de travailler avec des commerciaux français parce qu'il en a une vision plutôt fermée, très stricte. Ici on est habitué à faire des affaires à l'anglo-saxonne où l'on sait davantage se vendre : les gens sont dans la démonstration, ils se produisent et s'achètent. Chacun des partenaires veut faire de l'argent très rapidement. Les Français, au contraire, cherchent davantage à créer un rapport à long terme, à nouer un rapport de confiance entre les acheteurs et les vendeurs avant d'initier quoique ce soit. Pour un Mexicain qui n'est habitué à ce type de culture, ce n'est pas évident.

Et pour les investisseurs français c'est la même chose, ils ne comprennent pas et ne sont pas attirés par cette manière de procéder. Et puis surtout, ils ont une image très "insécuritaire" du pays, que ce soit au niveau personnel ou économique. 

Parmi toutes ces difficultés, n'y a-t-il pas quand même des points forts dans la relation commerciale de ces deux pays ?

Bien sûr, on peut trouver des points positifs. Malgré la mauvaise presse que font les médias français du Mexique en ne parlant que des narcotrafiquants, il y a quand même quelques entrepreneurs qui en ont une image plus réaliste. Il n'y a pas tous ces prétendus risques. La proximité avec les Etats-Unis est un vrai plus et le Mexique possède de nombreux avantages fiscaux et douaniers. Enfin, il faut ajouter la culture du pays et sa géographie qui participent également à son rayonnement : le soleil, une certaine gaieté, la nourriture, la fête? On compte quand même des investisseurs français qui sont attirés par ces aspects. 

François Hollande sera en visite d'Etat au Mexique le 10 et 11 avril prochains. Que peut-on attendre de cette visite ?

Toutes les personnes qui travaillent au renforcement des relations franco-mexicaines attendent des deux gouvernements qu'ils fassent plus d'efforts pour se rapprocher et changer l'image que chaque pays à de l'autre. Il s'agira de montrer aux Français qu'il n'y a pas cette insécurité nuisible aux affaires et parler davantage de la France aux Mexicains étant donné qu'elle a déserté nos médias. Elle est aujourd'hui moins connue qu'il y a dix ou vingt ans où la présence française était plus forte. On voudrait qu'à travers la rencontre entre les présidents François Hollande et Enrique Peña Nieto, les entrepreneurs mexicains apprivoisent la culture française et sa manière de faire des affaires. Il faut qu'on laisse de côté toutes les affaires diplomatiques qu'on a pu avoir, surtout celle de Florence Cassez.

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Guillermo Cambero a étudié et travaillé à Nantes et dirige aujourd'hui un cabinet d'avocats à Guadalajara.  (Photo Camille François)

Comment envisager la poursuite des relations entre les deux pays ?

Pour que les choses progressent, il faudra attendre une amélioration significative des affaires économiques en Europe. Si l'Europe montre des signes de récupération économique très rapides, ce sera plus facile pour nous de motiver des entrepreneurs mexicains. Actuellement ils ne s'intéressent pas à la France à cause de l'euro, de la crise économique, des restrictions douanières très fortes. Enfin, nous comptons vraiment sur les gouvernements pour changer les images réciproques des pays et c'est à nous, les experts locaux, de motiver les entreprises en France ou au Mexique pour aboutir à une coopération plus étroite. Aujourd'hui pour se développer et surtout pour ne pas mourir, une entreprise doit penser à l'international.

Propos recueillis par Camille François (www.lepetitjournal.com/mexico) Lundi 7 avril 2014

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Publié le 6 avril 2014, mis à jour le 8 avril 2014

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