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RELIGION - Les Chiites d'Egypte vivent en secret

Écrit par Lepetitjournal Le Caire
Publié le 19 avril 2013, mis à jour le 9 janvier 2018

En Egypte, les Chiites seraient entre 700.000 et 2 millions. Peu visible, cette communauté se fond dans la masse des Sunnites, parce qu'elle ne jouit d'aucune reconnaissance officielle. Et parce que les différences, finalement, ne sont pas si nombreuses

Les portes du Caire islamique, héritage des fondateurs chiites. (photo LPJ)
"Dieu est grand, il n'y a pas d'autre Dieu que Dieu et Mahomet est son prophète". Pour Mohamed Al Drini, la prière commence comme celle de tous les musulmans. Tous les vendredis, il se rend à la mosquée et chaque année, il respecte la période du ramadan.

Et pourtant, Mohamed n'est pas considéré comme un musulman ordinaire en Egypte : il est chiite, un "mauvais musulman, pire que les infidèles"même, selon certaines doctrines extrémistes en provenance d'Arabie Saoudite. "Régulièrement, les wahhabites saoudiens lancent des fatwas (avis juridiques) contre les Chiites", explique celui que l'on présente ici comme le représentant de la communauté chiite en Egypte.

Il y a quelques années, Mohamed Al Drini a fondé le Conseil Suprême d'Ahl-Bayt, une organisation qui se présente comme non sectaire, "dédiée à tous ceux qui vénère les prophète Mahomet et sa famille, y compris son petit-fils martyr Hussein".

Dilemme de succession

La précision est importante, car les Chiites se considèrent comme les descendants directs d'Ali, cousin du prophète et père d'Hussein. Ali qui, pour les Chiites, aurait du être le successeur naturel de Mahomet. Mais après la mort du prophète, c'est Abu Baker, fidèle compagnon de Mahomet, qui prendra les rênes de la jeune communauté musulmane.

Cette divergence de vues séparera à jamais les Chiites et les Sunnites. Aujourd'hui, les musulmans chiites ne représenteraient que 10 % de l'Oumma, la communauté musulmane et se concentrent essentiellement en Iran et en Iraq, tandis qu'ils sont réduits à l'état de minorité dans les autres pays musulmans (essentiellement au Liban, en Syrie et dans certains pays du golf arabique)

Peu de différences

Pourtant, dans les faits, mises à part ces considérations de succession, rien ne sépare vraiment les deux principales branches de l'islam. Les doctrines sont identiques, les piliers de la foi sont les mêmes et la prière se fait aux mêmes endroits. "Mais en Egypte, toute forme d'organisation structurée, en dehors de l'autorité officielle, dérange" explique Mohamed, qui ne voit aucune autre justification à la politique de répression du régime contre les Chiites. "Nous sommes tous musulmans, frères en religion, mais l'Etat a peur de nous".

Alors de temps à autres, l'Autorité sévit. De retour de voyage dans le golfe, Mohamed Al Drini a été retenu à l'aéroport du Caire et interrogé pendant plusieurs heures. En 1994, déjà, il avait été emprisonné pour son implication dans la communauté chiite.

Pour certains analystes, la répression s'explique par la peur des connections secrètes que lieraient les Chiites d'Egypte avec leurs coreligionnaires d'Iran et d'Iraq. De là à craindre une révolution khomeyniste au Caire, il n'y a qu'un pas que le régime utilise pour refuser, toujours, une reconnaissance légale aux chiites.
"Une aberration historique", selon Mohamed Al Drini, qui rappelle que "Le Caire a été fondé par les Fatimides, qui étaient chiites !"

Arnaud Saint Jean (www.lepetitjournal.com/le-caire) Dimanche 21 avril 2013 (réédition )


Publié le 19 avril 2013, mis à jour le 9 janvier 2018

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