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ACTUALITE DROIT DU TRAVAIL - Transfert du contrat de travail à l'international et protection du salarié

Écrit par Lepetitjournal Kuala Lumpur
Publié le 16 octobre 2013, mis à jour le 22 février 2014

 

Pour gérer la mobilité internationale de leurs salariés, les groupes français ont généralement recours à l'expatriation ou au détachement. Toutefois, une nouvelle tendance est en train de s'amorcer puisque l'on observe de plus en plus de Groupes français envoyer leurs salariés en transférant leur contrat de travail à une société du groupe située a l'étranger. 

Contrairement au détachement ou à l'expatriation, dans lesquels le contrat de travail français est maintenu ou suspendu, le transfert de contrat implique une rupture du contrat de travail avec la société mère, et la conclusion d'un nouveau contrat de travail, dénommé contrat local avec la filiale étrangère. 

 

L'obligation de rapatriement : un garde-fou extrêmement protecteur des salaries expatriés ou détachés à l'étranger
C'est au regard de ces évolutions et toujours dans un souci de protection des intérêts du plus faible que l'article L. 1231-5 du Code du travail met à la charge de la société mère établie en France, une obligation de rapatriement et de réintégration du salarié lorsque ce dernier est licencié par la filiale étrangère avec laquelle il était lié par un contrat de travail local.

En effet, en cas de licenciement par la filiale, l'article L.1231-5 du Code du travail impose à la société mère de rapatrier le salarié et de lui procurer un emploi ?compatible avec l'importance de ses précédentes fonctions en son sein?. Tout manquement à cette obligation s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. 

La jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de cassation toujours extrêmement soucieuse des intérêts des salariés, vient de rendre deux arrêts importants (cass. Soc. 9 janvier 2013 et cass. Soc 21 novembre 2012) qui renforcent une nouvelle fois cette obligation de rapatriement.

Dans le premier arrêt, la Cour de cassation affirme de nouveau que le seul fait que le salarié n'ait pas, avant son détachement, exercé des fonctions effectives au service de l'employeur qui l'a détaché, ne dispense pas celui-ci de son obligation d'assurer son rapatriement à la fin du détachement et de le reclasser dans un autre emploi en rapport avec ses compétences. La pratique consistant à embaucher un salarié et à le détacher le même jour ne permet donc plus à l'employeur d'éluder les obligations énoncées à l'article L.1231-5 du Code du travail. 

Ainsi, a-t-il été précisé que l'obligation de rapatriement et de réintégration s'imposait à la société mère, même si le contrat de travail liant au salarié a été rompu lors du détachement, ou si le contrat conclu avec la filiale avait été ensuite soumis au droit étranger.

Le second arrêt décide que, dès lors qu'un salarié expatrié fait l'objet d'une mesure de rapatriement en France sans bénéficier d'une offre de réintégration sérieuse, précise et compatible avec l'importance de ses précédentes fonctions au sein de la société mère et qu'aucun accord express de l'intéressé sur son nouveau poste n'est intervenu, la prise d'acte de la rupture aux torts de l'employeur est justifiée.

La mise en ?uvre de cette obligation de rapatriement
Le rapatriement se fait, en principe, vers le lieu où le salarié exerçait son activité antérieurement, soit le plus souvent, vers son pays d'origine. Enfin, le rapatriement doit intervenir au moment de la cessation des activités auprès de la filiale étrangère. En cas de retard, l'employeur devra verser au salarié une indemnité de frais de séjour, au titre de la période comprise entre la date de cessation de ses fonctions et celle de son retour effectif, sauf s'il est établi que le retard ne lui est pas imputable.

Une fois le salarié rapatrié, l'employeur doit lui fournir un emploi compatible avec ses précédentes fonctions au sein de la société, afin qu'il retrouve l'emploi occupé précédemment. Ce dernier doit lui préciser son poste et ses attributions, la rémunération et classification salariale.

Concrètement, sans devoir être exactement le même, le poste de reclassement devra correspondre aux fonctions précédentes et bien entendu à la qualification du salarié. Il ne saurait en aucun cas entrainer une baisse de niveau hiérarchique ou de salaire.

Néanmoins, si le reclassement du salarié au sein de la société mère s'avère impossible, cette dernière devra en tirer les conséquences qui s'imposent et licencier le salarié.

En conclusion
On observera que ces deux arrêts de la chambre Sociale de la Cour de cassation, démontrent une volonté persistante de voir conserver à la charge des groupes industriels internationaux une responsabilité à l'égard de leurs salariés, bien que ceux-ci aient préalablement été transférés de la société mère vers la filiale, et leur contrat de travail initial rompu.

Dès lors, l'on pourrait dès à présent conseiller aux groupes industriels de recenser l'ensemble des contrats de travail rompus lors d'un transfert à l'étranger et de les classer au sein des reclassements obligatoires.

 

 Elisabeth Lebard (www.lepetitjournal.com/kuala-lumpur.html) jeudi 17 octobre 2013


ELISABETH LEBARD

Résidente depuis huit ans en Malaisie, Elisabeth Lebard est avocate au barreau de Paris et travaille actuellement au cabinet Abdullah Chan. Composé de 3 associés et de 10 collaborateurs, le cabinet est specialiste dans le droit des affaires.

Contact : elisabeth@abdullahchan.my 

 

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Publié le 16 octobre 2013, mis à jour le 22 février 2014

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