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FRANÇAISE DE KL – Claire Sancelot, du minimalisme au zéro déchet

Écrit par Lepetitjournal Kuala Lumpur
Publié le 14 mars 2016, mis à jour le 15 mars 2016

Mariée à un Malaisien, cette Française a longtemps vécu à New-York avant de poser durant 10 ans ses bagages à Hong Kong. C'est à Bangsar, dans son nouveau home sweet home que nous l'avons rencontrée. Ici pas de placards ou de tiroirs qui étouffent sous le point des affaires, rien ne déborde. 

Plus qu'une philosophie, le minimalise s'est pas à pas installé dans leurs vies. Le déclic s'est fait il y a cinq ans, peu après la naissance de leur fille aînée, à l'ère où les magasins de puériculture ont un produit pour chaque chose, et où après une semaine avec un nourrisson à la maison la poubelle vomit quantité de couches. ?Lorsque l'on jette nos poubelles elles ne disparaissent pas, elles vont quelque part. Ses premières couches sont encore à Hong-Kong. Qu'est-ce que l'on donne à nos enfants comme planète ? Une poubelle !?, débute Claire. Et en effet, 38.100 couches jetables seraient utilisées chaque minute à travers le monde. Depuis le 1er janvier, ce sont déjà plus de 3.200.000 couches qui sont venues s'ajouter au nombre croissant des ordures ménagères. Pour ne citer qu'elle, en Malaisie péninsulaire, selon les derniers chiffres communiqués par l'Universiti Putra Malaysia, en 2005, la production de déchets solides ménagers s'élevait à 19.100 tonnes par jour, contre 16.200 quatre ans plus tôt.

De la prise de conscience au changement 

Pour Claire, il y a un vrai travail à faire qui se construit sur le long terme. Au fil des mois et des années l'espace se vide pour laisser place à l'essentiel. ?On vient de sociétés très matérialistes. Nous avons voulu changer de vie et nous libérer des choses pour être plus mobiles. On se sent plus libres. Je n'ai rien à voler et pas d'attachement aux choses. On a le minimum fonctionnel et ça nous suffit?. C'est très certainement ce sentiment de liberté auquel donne naissance le minimalisme qui déroute. Cette jeune cadre dynamique qui a voyagé deux mois avant de s'installer en Malaisie avec trois jeunes enfants et seulement deux valises, explique que chaque objet à un poids, qu'il soit sentimental ou matériel. Se détacher volontairement de ce poids c'est alors un pas vers la sérénité, car beaucoup d'angoisses liées au matérialisme et à l'apparence disparaissent. 

Les chambres de ses enfants n'ont rien à envier à n'importe quelle petite fille. Jouets, livres et déguisements sont rangés de façon ordonnée, à côté d'une garde robe très coquette. Et pourtant une grande majorité de ces choses ont trouvé au sein de cette famille une seconde vie. Pour Claire pas question d'acheter neuf. Non pas par souci d'économie mais car cela nourrit ce vent consumériste, c'est remplir ses poubelles, pour au final jeter et polluer. La jeune maman se remémore l'école hong-kongaise où allaient ses enfants, horrifiée par les journées à thème, violette, pays,? ce qu'elle définit comme de la ?fast fashion? engendre selon elle, non seulement une addiction humaine, mais aussi un impact sur la planète. Ainsi, lorsqu'elles vont aux anniversaires de leurs camarades, ses filles offrent et reçoivent des cadeaux de seconde main et refusent toujours les petits sacs remplis de souvenirs. On s'interroge sur le comment ses enfants perçoivent cela dans une société où l'on juge parfois peut-être, un peu trop souvent, les gens sur l'aspect matériel. Claire cite l'exemple de sa fille qui ?ne prend jamais les ballons dans les anniversaires, car ils s'envolent, vont dans la mer, et ça étouffe les dauphins. C'est l'explication d'une enfant de cinq ans? souligne t-elle tendrement, rappelant que l'on ?crée des consommateurs qui n'apprécient pas le moment présent?. Le mot d'ordre sous ce toit, privilégier l'expérience.

A Hong-Kong, facebook s'était fait le relai d'une page de troc dans le condominium. Pour Claire il n'y a cependant pas de recette parfaite, chacun fait comme il le souhaite, ?le principal étant d'être heureux avec ses valeurs. Lorsque je vois ma cuisine et ma poubelle, je suis heureuse de tendre vers le zéro déchet. C'est ce que l'on appelle la frugalité volontaire, si ce n'est pas volontaire, alors on ne peut pas être heureux?.

Cela n'empêche pas Claire d'avoir du goût pour les belles choses, ou une sensibilité pour la mode. Quelques paires de Louboutin ont trouvé leur place dans son dressing. Mais pour elle les gardera à vie. 

Un mode de vie zéro déchet

Au-delà de ce qui se voit, cette approche a aussi changé foncièrement la vie de cette famille. Pas de plats préparés, ici on cuisine en utilisant des produits bio, et tout le monde mais la main à la pâte. Un moment qui n'a rien d'une corvée quotidienne, mais plutôt d'un instant partagé en famille. Même si Claire en convient, il peut-être plus difficile en Malaisie de trouver un choix pléthorique de produits issus d'une agriculture biologique ou responsable, elle s'adapte et cuisine simplement. Elle achète à des petits producteurs locaux, commande sur internet. Sur son balcon on trouve un compost, constitué à partir de feuilles séchées récoltées auprès des jardiniers de leur condominium. Certes le bio est plus cher, mais pour Claire c'est ce qu'elle définit comme le prix de la ?vraie nourriture?.

En 2009, la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes française communiquait les résultats d'une enquête menée sur 3.500 échantillons de fruits et légumes, et mettait en lumière que 62% des fruits testés et 30% des légumes comportaient des résidus de pesticides. L'utilisation intensive de ces produits chimiques ou encore les OGM, sont autant de facteurs qui engendrent des pathologies pour l'être humain, mais aussi des désastres écologiques pour la planète s'alarme Claire. Zéro déchet c'est aussi pour elle réapprendre à consommer différemment, et préserver sa santé sur le long terme. Claire nomme la France qui a dégringolé de sa place de numéro un en termes de production agricole, citant Claude & Lydia Bourguignon, ingénieurs agronomes français qui ont créé le laboratoire d'analyse de sol (LAMS) et qui estiment à une quinzaine d'années, le temps nécessaire pour ramener ces sols appauvris par les produits chimiques, à une situation normale.  

De la surconsommation à la surpoubellisation, des chiffres qui font peur

Même si l'on sent doucement un éveil des consciences, on se demande comment la jeune femme a vu évoluer cette métamorphose profonde du système de consommation ces dernières années. Elle cite des gourous du genre, comme la Française Bea Johnson auteure de Zero Déchet, ou l'ouvrage de Dominique Loreau l'Art de la simplicité, un livre qui l'a  éclairée et inspirée. Petit à petit un mouvement mondial s'est ainsi tissé, au sein duquel les réseaux sociaux ont aussi une véritable importance. Reste aux gouvernements d'y répondre. 

En 2012, le rapport What a Waste : A Global Review of Solid Waste Management, faisait état du fait que le volume de déchets solides ménagers à travers le monde s'élevait à 1.3 milliards de tonnes par an. Une production qui représente un coût de gestion des déchets solides de 205 milliards de dollars. Ces chiffres, loin de baisser devraient quasiment doubler d'ici 2025 pour des pays comme la Chine, en passant à 2.2 milliards de tonnes et 375 millions de dollars. Une forte hausse sera notamment à prévoir dans les pays à faibles revenus. Dans les principaux producteurs on retrouve la Chine, les Etats-Unis, le Brésil, l'Inde et le Mexique. L'Asie du Sud-Est faisant partie des régions du monde dans lesquelles cette quantité augmente le plus vite.

 

Découvrez le site de Claire Sancelot.

Facebook : Zero Waste Kuala Lumpur

 

Alexandra Le Vaillant (www.lepetitjournal.com/kuala-lumpur.html) mardi 15 mars 2016

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Publié le 14 mars 2016, mis à jour le 15 mars 2016

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