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SOLIDARITE SANS FRONTIERES - Rohingyas : “ces gens ont une histoire, mais personne n'en parle“

Écrit par Lepetitjournal Kuala Lumpur
Publié le 20 février 2017, mis à jour le 20 février 2017

Solidarité sans frontières est une association française qui vient en aide aux réfugiés Rohingyas venus s'installer en Malaisie. En plus d'apporter soins et accompagnement, elle prévoit la création d'un « village » à Langkawi pour leur permettre de vivre en totale autonomie.  

«Si on ne s'occupe pas d'eux, qui le fera ? », Othman 35 ans, d'origine marocaine, est tombé amoureux de l'Asie après un voyage entre l'Indonésie et la Malaisie. Son tourisme, il le consacre aux autres. Son temps libre, il l'occupe à venir en aide à des familles de Rohingyas venus se réfugier en Malaisie pour fuir les persécutions dont elles sont victimes dans l'Etat d'Arakan, dans l'ouest du Myanmar. 

Viols, meurtres d'enfants, enlèvements : les exactions de l'armée birmane contre les Rohingyas dans le nord de ce petit Etat birman, s'apparentent à des crimes contre l'humanité, selon les conclusions d'un rapport du Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l'Homme (HCDH) publié vendredi 3 février 2017.
En Malaisie, ils seraient près de 46.000 Rohingyas enregistrés auprès de l'UNHCR, mais officieusement les chiffres monteraient pratiquement à 100.000. Dans le pays, le nombre de ces demandeurs d'asile ne cesse de croître alors que le Bangladesh, pays où ils trouvaient auparavant refuge, expulse dorénavant cette minorité qui compterait encore 66.000 personnes sur place.

Depuis plusieurs mois, une politique d'hostilité est menée entre le Myanmar et la Malaisie à la suite de propos du Premier ministre malaisien évoquant un "génocide" de la minorité musulmane rohingyas. En réponse, la Birmanie a cessé d'émettre des permis pour autoriser ses citoyens à travailler en Malaisie.  

« Ces gens ont une histoire, ce ne sont pas uniquement des réfugiés » 

Particulièrement préoccupé par la situation de cette minorité, qu'il connaît sur le bout des doigts, Othman entend bien mener son combat.
Après avoir vécu quelques années à Bordeaux, en plus de son empathie et de ses ambitions, ce grand brun originaire de Casablanca, a emmené dans ses bagages Solidarité Sans Frontières, une association créée par des amis qu'il aidait en France.

«A Bordeaux nous venions aussi en aide à des réfugiés, mais aussi des sans-abris et toute autre personne ayant besoin d'aide. » C'est dans les couloirs d'une mosquée de Bordeaux que cette volonté d'aider lui est venu.

Désormais installé en Malaisie où il compte bien reconstruire sa vie loin de la France, ses projets ne cessent de naitre. «Cette association c'est un premier pas ici pour débuter quelque chose de plus important par la suite. » précise t il. 

Othman est débordé par l'idée d'aider. Dans l'hôpital Rawatan Harian de Klang, il court d'un service à l'autre. « Aujourd'hui je dois gérer 11 personnes, une femme enceinte qui doit être auscultée, une autre qui a un bras cassé et des enfants qui doivent suivre des tests pour savoir s'ils ont la tuberculose ou non ». 

« Ces gens ont une histoire, mais personne n'en parle. Ce ne sont pas seulement des réfugiés », dit-il en regardant un couple dont la femme a un bras cassé depuis 2 ans. « Ce sont des passeurs à la frontière Thaïlandaise qui lui ont fait ça », confie t il. 

Son mari, lui, a des séquelles psychologiques depuis qu'il a été torturé par des militaires birmans. L'homme de petite taille courbe l'échine lorsqu'il se déplace pour suivre Othman. Inutile de parler sa langue pour comprendre ce qu'il a enduré. Son regard suffit. Le plus dur reste sans aucun doute de regarder droit dans les yeux ce que la plupart ne veulent pas voir, et comprendre.
Othman, lui, a compris. « Ce n'est pas bien compliqué de redonner de l'espoir à des gens qui ont tout perdu. Il suffit de leur redonner de la confiance et de leur montrer qu'ils ne sont plus seuls désormais ». 

A côté d'eux, une élégante jeune femme dissimule sa grossesse sous une longue tunique noire brodée de perle. « Elle a 26 ans, est enceinte de 7 mois et son mari a disparu depuis qu'ils sont arrivés en Malaisie. Elle a déjà perdu un enfant de 1 an. » 

Un village à Langkawi construit par et pour des Rohingyas 

«C'est au total plus d'une dizaine de famille que nous aidons actuellement, mais ils sont des milliers à avoir besoin d'aide», souligne le jeune homme. 

Actuellement, toutes ces familles vivent en communauté du côté de Klang, dans des baraquements de fortune. Selon Othman, l'hygiène y serait déplorable. ?C'est un véritable nid à maladie. Tous les enfants y sont tombés malades?. 

Mais l'association Solidarité sans Frontières, en plus de venir en aide aux réfugiés Rohingyas, ne compte pas s'arrêter là, avec un autre projet en devenir : « The100villages ». 

Ce projet ambitieux devrait permettre à des familles entières de Rohingyas de vivre en totale autonomie dans une dizaine de maisons construites par et pour eux, sur l'île de Langkawi. 

C'est Othman et les autres bénévoles de son association qui chaperonnent le tout après avoir réussi à lever les fonds nécessaires grâce à une action de crowdfunding. «On veut qu'ils se sentent chez eux, qu'ils puissent vivre en totale autonomie : potager, poules, école, tout a été pensé.»  Voilà la promesse d'une nouvelle vie loin du passé. 

  

Guillaume Almalech-Asmanoff (www.lepetitjournal.com/kuala-lumpur.html) mardi 21 février 2017

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Publié le 20 février 2017, mis à jour le 20 février 2017

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