Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 0

EVENEMENT - Exodus - Déjà Vu

Écrit par Lepetitjournal Kuala Lumpur
Publié le 5 octobre 2016, mis à jour le 5 octobre 2016

Dimanche dernier Ruang by Think City s'ouvrait au public. Entre ses murs l'histoire résonne au travers des clichés de grands reporters et photographes de guerre. Ils sont six à avoir tissé à travers le temps le périple de ces millions de réfugiés qui ne sont bien souvent plus qu'un gros titre au journal télévisé. Au travers d'une exposition, d'un débat et d'un livre, Exodus ? Déjà Vu a voulu aller plus loin. En coulisses nous avons retrouvé Patrice Vallette, propriétaire de la Vallette Gallery et initiateur du projet.

Lepetitjournal.com Kuala Lumpur : D'où est venu le désir de créer une exposition consacrée aux travaux de photographes sur les réfugiés ?

Patrice Vallette : Tout a débuté alors que j'organisais une soirée en l'honneur de Coskun Aral, grand photographe de guerre turc, rattaché à l'agence SIPA et alors de passage à Kuala Lumpur. Cet art talk retraçait sa carrière, mais aussi son travail avec les réfugiés irakiens dans les années 90 qui avaient dû fuir la barbarie de Saddam Hussein. De là est née l'idée de construire un projet autour des réfugiés. Le contexte aujourd'hui est plus que dramatique et il est important pour toutes les sociétés. Cette crise nous oblige à faire face à des questions et à aller plus loin que la vue d'une simple accumulation d'évènements. Après des heures de recherches, il est apparue comme une évidence que ce sujet était bien trop important pour n'inclure que Coskun Aral. Nous étions tous deux d'accord sur le fait qu'il fallait plutôt penser à une échelle plus globale que multi-générationnelle, c'est-à-dire regroupant plusieurs générations de photographes différents. 

Quel a été votre processus de sélection dans le choix des photographes qui composent Exodus- Déjà Vu ?

Le sujet des réfugiés reste délicat. L'idée n'était pas de consacrer une exposition uniquement sur eux, mais d'aller plus loin, de raconter l'histoire de ces photographes, qui elle aussi est importante. Coskun Aral a une carrière remarquable, il est aussi le fondateur de la première chaine turque de documentaires. C'est aussi lui qui m'a présenté Roland Neveu, un très grand photographe des années 80. Ancien grand reporter pour le Times à New York, aujourd'hui photographe à Hollywood, ses ?uvres, comme celles de la chute de Phnom Penh et l'arrivée des Khmers Rouges s'exposent dans les musées du monde entier. Originaire d'Alep, Issa Touma est devenu d'une certaine façon la voix culturelle de la Syrie. Il gérait le centre d'art d'Alep et le festival d'art. Nous retrouvons aussi Rahman Roslan qui appartient à cette nouvelle génération de jeunes photographes malaisiens. Il est reconnu pour un de ses travaux sur le Myanmar et a déjà été publié par le Times ou Newsweek. Il est aussi artiste et curateur, il aime incontestablement créer et est une source intarissable d'histoires. Il était en Grèce et en Syrie en février et mars derniers et a rapporté des séries de clichés sur ce sujet. Sergev Ponomarev, grand reporter de guerre russe fait aussi partie de ce projet, c'est du reste sans aucune hésitation qu'il a accepté d'y participer. Les images qu'ils m'avaient envoyées après notre conversation ont par la suite étaient lauréates du Prix Pulitzer. Enfin, Nilüfer Demir, photographe turque nous a rejoint sur une idée de Coskun, qui avec ses confrères, a grandement contribué à la création et à la conception d'Exodus ? Déjà Vu. Nous retrouvons ainsi au sein de l'exposition l'une de ses photographies qui a bouleversé, mais aussi polarisé l'opinion publique sur la question des migrants, celle d'Alan Kurdi, ce petit garçon retrouvé sans vie sur la plage.

Vous avez aussi édité un livre dans le cadre de l'exposition, pouvez-vous nous en dire un peu plus ?

Publié par l'ITBM, ce livre était de mon regard important pour compléter et pérenniser l'exposition, il renferme 15 clichés par photographe. Ils sont par ailleurs trois à avoir prêté leur plume à cet ouvrage. Marina Mahathir dont les écrits forment le prisme de son regard sur l'humanité, en tant que femme, en tant que mère de famille, en tant que Malaisienne. Le Dr. M. Morat Erdogan, un écrivain turc et expert sur les relations internationales, d'ordre politique, stratégique et migratoire. Et enfin, le philosophe français Edgar Morin.

Exodus ? Déjà Vu est un projet dont la visée est de toucher le monde entier. Kuala Lumpur en est le point de départ. Un livre sortira ensuite en Turquie, puis un autre en France et en Allemagne. Ce type d'exposition permettra d'alimenter des débats dans des communautés qui vont plus loin que la politique.

Quels sont les objectifs au travers de cette exposition ?

J'espère profondément que la foule s'y pressera, ainsi qu'aux ateliers et aux rencontres organisées avec les photographes. Une fois que le projet est lancé, le travail est fait. Il faut laisser le public entrer dans cet événement. C'est plutôt à eux de réagir, notre rôle à nous était d'initier cette exposition. 
L'objectif principal est de donner la possibilité au public de regarder le sujet à travers un angle différent, à travers les photographes et cette génération d'images. On n'est ni dans l'historique, ni dans la politique. Avec ce qui se passe en Syrie, cette exposition nous permet de comparer 1975 et aujourd'hui. C'est une démarche culturelle mais l'idée est aussi de faire de l'éducation ? donner la possibilité à tous de pouvoir voir une exposition et participer à des activités, des ateliers, des rencontres avec des photographes ainsi que la projection du film 9 Days from My Window d'Issa Touma.

Exodus ? déjà vu, pourquoi ce titre ?
Cela a été un long périple. Nous voulions avant tout un titre qui ne soit pas traductible. Qu'est-ce qui est mieux qu' ?Exodus? ? Tout le monde comprend ?Exodus?, ça fait partie de l'histoire de l'humanité, la fuite. Quant à ?déjà vu?, c'est un terme assez connu, un concept compris par tout le monde ? c'est une situation dans le présent mais que nous avons déjà pu voir dans le passé.

C'était un projet d'envergure, vous êtes-vous heurté à des problématiques particulières ?

C'est une aventure de huit mois ? un énorme travail d'organisation, il a aussi fallu trouver des partenaires et réunir les fonds nécessaires. Ce travail n'aurait pas été possible sans l'aide de toute l'équipe, sans l'aide des gens qui ont participé depuis le début. Dans les coulisses c'est un véritable esprit de volontariat qui a régné, impliquant des personnes des quatre coins du monde, Colombiens, Français, Malaisiens, Allemands, Turcs... Ce qui me tient principalement, c'est l'objectif, c'est l'engagement, c'est la passion. On touche non seulement les réfugiés mais aussi la profession du photographe, l'implication des gens, leur participation, une belle opportunité de mondialisation.

Votre avis sur le photojournalisme, surtout dans le contexte de la guerre ?
Un vrai dévouement des journalistes. Ce qui est intéressant, c'est ce débat qui dit que le digital permet à tout le monde d'être photographe. Ce qui est important est l'homme et sa mission et le photojournaliste vit encore et on a besoin de cela. On a ce sentiment qu'aujourd'hui tout va vite mais l'homme reste là, sur le terrain et ramène ces images. Ce qui a changé dans le photojournalisme ce sont les moyens technologiques qui nous permettent de mieux travailler. La documentation elle est la même ; elle est juste de plus en plus en danger, puisque nous vivons dans un monde avec de moins en moins d'éthique et de principes. Cette exposition est un moyen de marquer une reconnaissance, car il n'y a jamais trop de reconnaissance pour les photojournalistes.

 

L'exposition se tiendra jusqu'au 9 octobre

Aujourd'hui à 14h, le film d'Issa Touma sera diffusé. 

Ouvert de 10h à 18h les 6 et 7 octobre et de 12h à 19h les 8 et 9 octobre.

Rencontre avec Rahman Roslan prévue le 8.

Pour plus d'informations, consultez leur site ou leur page Facebook 

 

(www.lepetitjournal.com/kuala-lumpur.html) jeudi 6 octobre 2016

Abonnez-vous gratuitement à notre newsletter!

logofbkl
Publié le 5 octobre 2016, mis à jour le 5 octobre 2016

Sujets du moment

Flash infos