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D’où vient le sésame des simits turcs ?

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Un million de simits vendus chaque jour en Turquie
Écrit par Lepetitjournal Istanbul
Publié le 24 août 2020, mis à jour le 18 février 2021

(Cet article a été publié une première fois en novembre 2017.)

Quiconque a mis les pieds à Istanbul a sans doute vu ces roulottes marchandes de simits, ou a même déjà goûté à ces délicieux petits pains au sésame. Mais d’où viennent ses petites graines ?

Le simit, c’est cet incontournable pain de forme circulaire sublimé par les graines de sésames qui le recouvrent. Quand on sait que les Turcs en consomment au total environ un million par jour, on se dit qu’il en faut des paquets de cette petite graine… Or la production locale ne suffit pas. 

Selon Ilhan Çağırgan, professeur-chercheur à l’université Akdeniz qui mène des recherches sur le sésame depuis plus de 20 ans, la Turquie consomme 150.000 tonnes de ces petites graines chaque année mais n’en produit que 15.000 à 16.000 tonnes par an. Un ratio difficile à avaler pour les producteurs de simits, qui sont dans l’obligation d’importer le sésame d’Afrique. 

Le prix du simit a doublé

Le sésame, qui appartient à la famille des pédaliacées, est une plante annuelle originaire d’Asie tropicale. Le fruit de la plante consiste en une capsule cannelée comprenant les graines de sésame, soit la partie consommée qui est riche en lipides, protéines et en sucre. Au moment de la récolte, il faut bien faire attention à ne pas endommager ces petites capsules. Pour cette raison, la récolte se fait très régulièrement à la main plutôt qu’à l’aide d’un outil technique comme une moissonneuse-batteuse. Cela explique pourquoi la production de sésame est plus importante en Afrique qu’en Turquie, car le coût de la main d’oeuvre y est moindre. 

Ilhan Çağırgan travaille depuis 1994 à l’élaboration d’une moissonneuse-batteuse précise, qui n’endommagerait pas les capsules de sésame. Il a aussi développé en laboratoire des capsules plus résistantes, pour réduire les pertes lors de la récolte. Le chercheur affirme que la côte égéenne, la côte méditerranéenne ainsi que le sud de la Turquie présentent des conditions favorables à la culture du sésame et que celle-ci pourrait devenir l’une des cultures les plus importantes de l’agriculture dans ces régions. 

Un enjeu majeur selon lui pour la Turquie, qui serait alors moins dépendante des pays africains pour le sésame et aux variations de son prix sur le marché de l’export. Des variations qui ne sont pas sans impact sur le prix de vente du petit pain turc… Il y a moins d’une dizaine d’années, le simit était encore vendu 0,50 livre turque dans les rues d’Istanbul, contre 1 TL à 1,5 TL aujourd’hui, voire plus cher en boulangerie. Cette augmentation est en partie justifiée par la hausse du coût du sésame et du blé. Si bien que le syndicat turc de fonctionnaires Kamu-Sen s’est déjà servi du simit pour justifier une demande d’augmentation de salaire, transformant le petit pain en  indicateur de pouvoir d’achat.

Graines de l’Antiquité

Preuve supplémentaire que ces petites graines de sésame valent de l’or dans l’empire du simit : en 2016, des graines vieilles de 2.800 ans découvertes lors de fouilles archéologiques dans la province de Van, dans l’est de la Turquie, ont été transférées en laboratoire dans l’espoir de les "ramener à la vie". Elles avaient été trouvées dans trois jarres de céramiques, stockées au château de Çavuştepe construit au 8ème siècle avant J.-C. et dont il ne reste que les structures, citernes, temples et fortifications. Rafet Çavuşoğlu, qui dirige les fouilles entreprises en 2014, a précisé que ces graines avaient été cultivées à Gürpınar, dans la région de Van. 

Tandis que chercheurs et archéologues s’attellent à conserver la culture ancestrale de ces petites graines en Turquie, à Istanbul, les gourmands sont toujours aussi nombreux à faire la queue devant les vendeurs de simits pour décrocher leur précieux sésame… 

 

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