Mais aussi : rachat du plus grand groupe de presse, aide de l’UE pour les réfugiés… C’est l’heure de notre bulletin économique mensuel. Découvrez-le sans plus tarder.
MÉDIAS - Le plus grand groupe de presse turc racheté par une holding proche du pouvoir
Le plus grand groupe de presse turc, Doğan, a annoncé qu’il s’apprêtait à vendre l’ensemble de ses titres pour 1,1 milliard de dollars (890 millions d’euros) à Demirören, une holding proche du pouvoir. Le groupe Doğan possède notamment les quotidiens Hürriyet ainsi que sa version anglaise Hürriyet Daily News, les journaux Posta et Fanatik, l’agence de presse DHA et les chaînes de télévision Kanal D et CNN-Türk. Le groupe Demirören lui avait déjà racheté le quotidien Milliyet en 2011.
Le milliardaire Aydın Doğan, fondateur du groupe éponyme, a tiré sa révérence le 22 mars dernier : "J’ai 81 ans. A ce stade, j’ai décidé de mon propre chef de cesser mes activités dans les médias." Les opposants y voient cependant une vente cédée sous la pression du gouvernement.
Les défenseurs de la liberté de presse en Turquie dénoncent la main mise du gouvernement sur les médias. "Cette vente consacre la mort du pluralisme et du journalisme indépendant", a déploré dans un communiqué Erol Önderoğlu, représentant de Reporters Sans Frontières (RSF) en Turquie. "A l’approche des élections générales de 2019, l’emprise du gouvernement sur les médias est désormais totale."
CHAUFFEURS - Les taxis d’Istanbul réclament l’interdiction d’Uber
Les chauffeurs de taxi stambouliotes dénoncent la concurrence déloyale d’Uber, géant mondial du VTC, et réclament à la justice l’interdiction de son application mobile. Le tribunal de commerce d’Istanbul a renvoyé le procès au 4 juin, dans l’attente d’un rapport d’experts. En Turquie, contrairement à la plupart des pays, Uber offre aux clients un service plus coûteux que les chauffeurs de taxis traditionnels. La concurrence est donc basée sur la qualité, plutôt que sur le prix.
Le 12 mars, les chauffeurs de taxi se sont rassemblés devant le palais de justice d’Istanbul. Depuis un mois, plusieurs incidents à l’encontre de véhicules et chauffeurs Uber ont été rapportés. Dans ce contexte, les téléchargements de l’application Uber ont quintuplé en dix jours, selon un rapport publié par le quotidien Habertürk le 21 mars.
Pour lutter contre la concurrence d’Uber et accroître la compétitivité des taxis traditionnels, la municipalité d’Istanbul a récemment lancé son application iTaksi. Elle a pour objectifs de coordonner les arrêts de taxis et d'assurer la sécurité des conducteurs et des passagers. Elle définit également l’itinéraire le plus court et le plus économique. Le système a déjà été installé dans 4.000 taxis d’Istanbul. Il en reste encore plus de 13.000 à équiper…
RÉFUGIÉS - L’UE débloque 3 milliards d’euros pour aider la Turquie
La Commission européenne a annoncé le 14 mars qu’elle débloquerait une deuxième enveloppe financière de 3 milliards d’euros pour aider la Turquie à accueillir les réfugiés syriens sur son sol. Ce versement avait été promis il y a deux ans, en mars 2016, dans l’accord migratoire controversé conclu entre l’Union européenne et Ankara. La Turquie s’est engagée à freiner l’arrivée de réfugiés syriens sur les côtes grecques. Elle a aussi accepté que l’UE lui renvoie tous les nouveaux migrants arrivant en Grèce. L’accord prévoit que pour chaque Syrien renvoyé en Turquie, un autre Syrien resté dans les camps de réfugiés en Turquie doit être envoyé en Europe.
Dans le cadre de cet accord, une première enveloppe de 3 milliards d’euros avait déjà été attribuée à plusieurs dizaines de projets pour améliorer l’accueil des plus de 3 millions de réfugiés syriens en Turquie. Ankara a dénoncé à plusieurs reprises les retards dans le versement promis par l’UE. En décembre 2017, la Commission européenne a annoncé que 1,85 milliard d’euros avait déjà été déboursé, soit à peine un peu plus de la moitié.
Selon le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, cet accord a permis de réduire de 97% les passages de migrants vers l’Europe. A Varna, en Bulgarie, lundi, les dirigeants de l’UE ont fait part au président turc Recep Tayyip Erdoğan de leurs "sujets de préoccupation", concernant les situations à Afrin (Syrie) et à Chypre, ainsi que sur l’érosion de l’Etat de droit en Turquie, tout en précisant vouloir préserver l’accord sur les migrants.
ARMÉE MARITIME - Le premier porte-avion militaire turc sera prêt en 2019
Le tout premier porte-avion de fabrication nationale en Turquie est actuellement en construction à Istanbul, et devrait être prêt en février ou mars 2019.
"90% des blocs sur le chantier sont construits. L’équipement du navire a débuté immédiatement après la construction. Le navire est constitué de 114 blocs, dont près de 10% ont déjà été assemblés", a déclaré Metin Kalkavan, président de la chambre de commerce maritime pour les régions d’Istanbul et de Marmara, l’Egée, la Méditerranée et la mer Noire (IMEAK).
Ce navire de 232 mètres de long, 32 mètres de large et 55 mètres de haut possédera un garage destiné à accueillir des véhicules lourds, comme des chars et conteneurs. Il comprendra également six zones d’atterrissage et une rampe de décollage. Sa construction a débuté en 2016.
Ce navire devrait permettre, selon le gouvernement, d’augmenter la mobilité des Forces maritimes turques. Il pourra être utilisé dans des combats militaires à longue distance ou des opérations de secours humanitaire. "Ce navire permettra à nos forces maritimes, à notre pays, de franchir un nouveau palier. Nous sommes le dixième pays à détenir ce navire. Seuls cinq à six pays le produisent. Nous, nous allons le produire et le détenir. Ce projet est très important et se poursuit avec succès", s’est félicité Metin Kalkavan.
PÉTITION - 1,7 million de signatures contre la privatisation de l’industrie sucrière
Le Syndicat des travailleurs de l’industrie alimentaire et sucrière (Şeker-İş) a récolté 1,7 million de signatures pour protester contre la privatisation des usines de sucre en Turquie. Le pays compte 33 usines sucrières, dont 25 appartiennent à l’Etat, 5 sont dirigées par des coopératives de producteurs et trois par des particuliers, comme le rapporte Daily Sabah.
Selon le président de la Confédération des syndicats turcs (Türk-İş), Ergun Atalay, seules cinq des quatorze usines concernées par le processus de privatisation continueraient de fonctionner, laissant craindre des licenciements de masse. Le sort des travailleurs d’usine et des producteurs de betteraves à sucre, qui ont été considérablement subventionnés, est remis en question. Ergun Atalay, lui, prône un modèle dans lequel les coopératives d’agriculteurs et de travailleurs pourraient exploiter ces usines, sous la supervision du gouvernement.
Le processus de privatisation des usines sucrières, comme de nombreuses autres entreprises publiques, a commencé en 2000, afin d’obtenir un financement du Fonds monétaire international (FMI). A l’époque, la Turquie tentait de restructurer son économie dans un climat d’instabilité politique. Après 2002, les gouvernements du Parti de la justice et du développement (AKP) ont continué à inciter les privatisations. Mais les usines sucrières sont parmi les entreprises les plus anciennes encore en activité. Le Parti républicain du peuple (CHP) et le Parti d'action nationaliste (MHP) sont opposés à la privatisation de cette industrie.
Solène Permanne (http://lepetitjournal.com/istanbul) jeudi 29 mars 2018